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Archive pour mars 2022

« Si vous croyiez en Moïse, vous croiriez aussi en moi, car c’est de moi qu’il a parlé. »

jeudi 31 mars 2022

Moïse a dit : « Le Seigneur notre Dieu vous suscitera, du milieu de vos frères, un prophète semblable à moi » (Dt 18,15). Moïse explique lui-même (…) ce qu’il vient d’annoncer : « C’est cela précisément que tu as demandé au Seigneur ton Dieu sur le mont Sinaï, au jour de l’assemblée, lorsque tu as dit : ‘Nous n’écouterons pas davantage la voix du Seigneur notre Dieu et nous ne regarderons plus ce grand feu : ce serait notre mort’ » (v. 16).

Moïse affirme avec force qu’un rôle de médiateur lui a été assigné alors, puisque l’assemblée des juifs était encore incapable de contempler des réalités qui la dépassaient : vision de Dieu extraordinaire et terrifiante pour les yeux, sons de trompettes étranges et intolérables pour les oreilles (Ex 19,16). Le peuple avait donc la prudence de renoncer à ce qui excédait ses forces, et la médiation de Moïse remédiait à l’infirmité des hommes de sa génération : il était chargé de transmettre au peuple assemblé les commandements divins.

Mais si tu cherches à découvrir sous ce symbole la réalité préfigurée, tu comprendras qu’elle vise le Christ, « Médiateur entre Dieu et les hommes » (1Tm 2,5) : c’est lui qui avec sa voix humaine, voix reçue lorsqu’il est né pour nous d’une femme, transmet aux cœurs dociles la volonté sublime de Dieu le Père, qu’il est seul à connaître en tant que Fils de Dieu et Sagesse de Dieu, « scrutant tout, même les profondeurs de Dieu » (1Co 2,10). Nous ne pouvions pas atteindre avec nos yeux de chair la gloire inexprimable, pure et nue, de celui qui est au-delà de tout — « l’homme ne pourra pas voir ma face, dit Dieu, et rester en vie » (Ex 33,20). Alors le Verbe, le Fils unique de Dieu, devait se conformer à notre faiblesse en revêtant un corps humain (…) selon le dessein rédempteur, pour nous révéler la volonté de Dieu le Père, comme il disait lui-même : « Tout ce que j’ai appris de mon Père, je vous l’ai fait connaître » (Jn 15,15), et encore : « Je ne parle pas de moi-même, mais le Père qui m’a envoyé a commandé lui-même ce que je dois dire et faire connaître » (Jn 12,49).

Saint Cyrille d’Alexandrie (380-444)

 

 

 

mercredi 30 mars 2022

 

 

 

 

 

« Les morts vont entendre la voix du Fils de Dieu. »

mercredi 30 mars 2022

[Le Christ parle :]
Ceux qui ne m’ont pas reconnu n’en ont pas bénéficié ;
j’ai été caché pour ceux qui ne me possédaient pas.
Je suis auprès de ceux qui m’aiment.
Tous mes persécuteurs sont morts ;
ceux qui me savaient vivant m’ont cherché.
Je suis ressuscité, je suis avec eux,
je parle par leur bouche.
Ils ont repoussé ceux qui les persécutent ;
sur eux j’ai jeté le joug de mon amour.
Comme le bras du fiancé sur sa fiancée (cf Ct 2,6),
ainsi est mon joug sur ceux qui me connaissent.
Comme la tente des fiançailles est dressée chez le fiancé,
mon amour protège ceux qui croient en moi.

Je n’ai pas été réprouvé,
même si j’ai semblé l’être.
Je n’ai pas péri,
bien qu’ils l’aient imaginé.
Le séjour des morts m’a vu
et il a été vaincu,
la mort m’a laissé partir,
et beaucoup avec moi.
J’ai été pour elle fiel et vinaigre ;
je suis descendu avec elle, dans son séjour,
autant qu’il avait de profondeur.
La mort s’est relâchée,
elle n’a pas pu supporter mon visage.
J’ai tenu parmi ses morts
une assemblée de vivants (1P 3,19; 4,6).
Je leur ai parlé avec des lèvres vivantes,
en sorte que ma parole n’ait pas été pas vaine.
Ceux qui étaient morts ont couru vers moi ;
ils ont crié et dit : « Aie pitié de nous,
Fils de Dieu, agis avec nous selon ta grâce.
Fais-nous sortir des liens des ténèbres,
ouvre-nous la porte, que nous sortions vers toi.
Nous voyons que notre mort
ne s’est pas approchée de toi.
Soyons délivrés, nous aussi avec toi,
car tu es notre Sauveur. »

Quant à moi, j’ai entendu leurs voix,
J’ai recueilli leur foi en mon cœur.
Sur leurs fronts je traçais mon nom (Ap 14,1) ;
ils sont libres et ils m’appartiennent.

Odes de Salomon (texte chrétien hébraïque du début du 2e siècle)

 

 

« Veux-tu être guéri ? »

mardi 29 mars 2022

Les miracles du Christ sont des symboles des différentes circonstances de notre salut éternel (…) ; cette piscine est le symbole du don précieux que nous fait le Verbe du Seigneur. En peu de mots, cette eau, c’est le peuple juif ; les cinq portiques, c’est la Loi écrite par Moïse en cinq livres. Cette eau était donc entourée par cinq portiques, comme le peuple par la Loi qui le contenait. L’eau qui s’agitait et se troublait, c’est la Passion du Sauveur au milieu de ce peuple. Celui qui descendait dans cette eau était guéri, mais un seul, pour figurer l’unité. Ceux qui ne peuvent pas supporter qu’on leur parle de la Passion du Christ sont des orgueilleux ; ils ne veulent pas descendre et ne sont pas guéris. « Quoi, dit cet homme hautain, croire qu’un Dieu s’est incarné, qu’un Dieu est né d’une femme, qu’un Dieu a été crucifié, flagellé, qu’il a été couvert de plaies, qu’il est mort et a été enseveli ? Non, jamais je ne croirais à ces humiliations d’un Dieu, elles sont indignes de lui ».

Laissez parler ici votre cœur plutôt que votre tête. Les humiliations d’un Dieu paraissent indignes aux arrogants, c’est pourquoi ils sont bien éloignés de la guérison. Gardez-vous donc de cet orgueil ; si vous désirez votre guérison, acceptez de descendre. Il y aurait de quoi s’alarmer, si on vous disait que le Christ a subi quelque changement en s’incarnant. Mais non (…) votre Dieu reste ce qu’il était, n’ayez aucune crainte ; il ne périt pas et il vous empêche vous-même de périr. Oui, il demeure ce qu’il est ; il naît d’une femme, mais c’est selon la chair. (…) C’est comme homme qu’il a été saisi, garrotté, flagellé, couvert d’outrages, enfin crucifié et mis à mort. Pourquoi vous effrayer ? Le Verbe du Seigneur demeure éternellement. Celui qui repousse ces humiliations d’un Dieu ne veut pas être guéri de l’enflure mortelle de son orgueil.

Par son incarnation, notre Seigneur Jésus Christ a donc rendu l’espérance à notre chair. Il a pris les fruits trop connus et si communs de cette terre, la naissance et la mort. La naissance et la mort, voilà, en effet, des biens que la terre possédait en abondance ; mais on n’y trouvait ni la résurrection, ni la vie éternelle. Il a trouvé ici les fruits malheureux de cette terre ingrate, et il nous a donné en échange les biens de son royaume céleste.

Saint Augustin (354-430)

 

 

« L’homme crut à la parole que Jésus lui avait dite. »

lundi 28 mars 2022

« La Parole de Dieu est vivante et efficace, plus affilée qu’un glaive à deux tranchants. » (He 4,12) Par ces mots l’apôtre montre à ceux qui cherchent le Christ — Parole, Force et Sagesse de Dieu — tout ce qu’il y a de force, tout ce qu’il y a de sagesse dans la Parole de Dieu. Cette Parole était au commencement auprès du Père, éternelle avec lui (Jn 1,1). Elle a été révélée en son temps aux apôtres, annoncée par eux et reçue humblement dans la foi par le peuple des croyants.

Il y a donc une Parole dans le Père, une Parole dans la bouche des apôtres, et une Parole dans le cœur des croyants. La Parole dans la bouche est l’expression de la Parole qui est dans le Père ; elle est l’expression aussi de la Parole qui est dans le cœur de l’homme. Lorsque l’on comprend la Parole, ou qu’on la croit, ou qu’on l’aime, la Parole dans le cœur de l’homme devient intelligence de la Parole, ou la foi en la Parole, ou l’amour de la Parole. Lorsque ces trois se rassemblent en un seul cœur, tout à la fois on comprend, on croit et on aime le Christ, Parole de Dieu, Parole du Père. (…) Le Christ habite en cette personne par la foi, et par une admirable condescendance, il descend du cœur du Père dans le cœur de l’homme. (…)

Cette Parole de Dieu (…) est vivante : le Père lui a donné d’avoir la vie en elle-même, comme lui a la vie en lui-même (Jn 5,26). C’est pourquoi elle est non seulement vivante, mais elle est Vie, comme il est écrit : « Je suis la Voie, la Vérité, la Vie » (Jn 14,6). Et puisqu’elle est Vie, elle est vivante pour être vivifiante, car « tout comme le Père ressuscite les morts et leur rend la vie, ainsi le Fils donne la vie à qui il veut » (Jn 5,21).

Baudouin de Ford (?-v. 1190)

 

 

 

Le chemin des fils

dimanche 27 mars 2022

Si quelqu’un veut tendre à la perfection, parti du premier degré, qui est celui de la crainte, état proprement servile, (…) il s’élèvera par un progrès continu, jusqu’aux voies supérieures de l’espérance. Celle-ci (…) attend la récompense. (…) Mais elle n’est pas encore parvenue à ce sentiment du fils qui, se confiant en l’indulgence et la libéralité paternelle, ne doute pas que tout ce qui est à son père ne soit également sien.

Le prodigue de l’Évangile n’ose plus même y aspirer, après qu’il a perdu, avec le bien de son père, jusqu’à son nom de fils. Voyez : il a envié les gousses que mangeaient les pourceaux, c’est-à-dire le mets sordide du vice ; et on lui refusait de s’en rassasier. Alors, il est rentré en soi-même. Touché d’une crainte salutaire, il s’est pris d’horreur pour l’immondicité des pourceaux, il a redouté les tourments cruels de la faim. Ces sentiments font de lui en quelque sorte un esclave. Mais, songeant au salaire dont on paye les mercenaires, il convoite leur condition, et il dit : « Que de mercenaires chez mon père ont le pain en abondance ; et moi, je meurs de faim ici. Je retournerai chez mon père, et lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et devant vous ; je ne suis plus digne d’être appelé votre fils ; traitez-moi comme l’un de vos mercenaires. » (Lc 15,17-19) Cependant, le père a bondi a sa rencontre. Cette parole d’humble repentir que dicte la tendresse, il l’accueille avec plus de tendresse encore. Non, il ne veut pas accorder à son enfant des biens d’une moindre valeur ; mais, lui faisant franchir immédiatement les deux degrés inférieurs, il le restitue dans sa dignité de fils.

Et nous aussi, hâtons-nous de monter, par la grâce d’une indissoluble charité, à ce troisième degré des fils, qui regardent comme étant à soi tout ce qui appartient à leur père ; méritons de recevoir en nous l’image et la ressemblance de notre Père des cieux. Alors, à l’imitation du Fils véritable, nous pourrons proclamer : « Tout ce qu’à mon Père est à moi. » (Jn 16,15)

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

« Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »

samedi 26 mars 2022

Si nous nous sentons pressés du désir de plaire au Roi des cieux, efforçons-nous de ne goûter que la gloire d’en-haut. En effet, celui qui l’a goûtée méprisera toute gloire terrestre. Mais je ne serais surpris que quelqu’un puisse mépriser cette dernière s’il n’a pas goûté la première. (…)

Celui qui demande à Dieu des dons pour prix de ses efforts a posé des fondations instables. Celui qui se regarde comme un débiteur recevra soudain une richesse inattendue. (…) Il est une gloire qui vient du Seigneur ; il a dit en effet : « Ceux qui me glorifient, je les glorifierai » (1 R 2,30). Et il en est une qui dérive des artifices du diable, car il est dit : « Malheur à vous quand tout le monde dira du bien de vous » (Lc 6,26). Tu reconnaîtras clairement la première à ce que, la considérant comme un dommage, tu la repousseras par tous les moyens, et que partout où tu iras, tu cacheras ta manière de vivre ; la seconde, à ce que tu feras même les moindres choses pour être vu des hommes (cf. Mt 6,1). L’impure vaine gloire nous suggère de feindre la vertu que nous n’avons pas, en nous disant : « Qu’ainsi votre lumière brille aux yeux des hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres » (Mt 5,6). (…)

Quand nos flatteurs, ou plutôt nos séducteurs, commencent à nous louer, remettons-nous brièvement en mémoire la multitude de nos péchés, et nous nous reconnaîtrons indignes de ce qui se dit ou se fait en notre honneur. (…) Les hommes simples ne sont pas souvent contaminés par le poison de la vaine gloire, parce que celle-ci est le rejet de la simplicité et l’hypocrisie de la conduite.

Saint Jean Climaque (v. 575-v. 650)

 

 

 

Solennité de l’Annonciation du Seigneur

vendredi 25 mars 2022

Ô Marie, [c’est en toi] qu’apparaît aujourd’hui la force et la liberté de Dieu. Car voici qu’après la délibération du conseil divin, si grave et si grand, c’est à toi que l’ange est envoyé pour révéler le mystère de ce conseil et demander ton adhésion ; et le Verbe ne descend pas dans ton sein que tu n’aies donné ton libre consentement ; il attend à la porte de la volonté qu’il te plaise d’ouvrir à celui qui désire venir en toi. Et il n’y serait jamais entré si tu ne lui avais pas ouvert par ta réponse : « Je suis la servante du Seigneur : qu’il me soit fait selon ta parole ».

Preuve éclatante de la force et de la liberté de notre volonté ! Sans elle, ni bien ni mal ne peuvent se produire ; ni démon, ni créature qui puissent la contraindre au péché si elle ne veut pas ; et par ailleurs, rien qui puisse la forcer à faire le moindre bien si elle le refuse. Oui, elle est bien libre, cette volonté humaine que rien ne peut réduire ni au bien ni au mal sans son consentement. Il frappait à la porte de ta volonté, ô Marie, le Dieu éternel, et si tu n’avais pas voulu ouvrir, Dieu ne se serait pas incarné en toi.

Rougis donc, ô mon âme, en voyant aujourd’hui Dieu lui-même s’apparenter à toi en Marie ; aujourd’hui tu peux voir que, bien que créée sans que tu l’aies voulu, tu ne seras pas sauvée que tu n’y consentes, puisque Dieu frappe à la porte, il attend que Marie consente à ouvrir.

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)

 

 

jeudi 24 mars 2022

 

 

 

 

Connaître Dieu dans les combats

jeudi 24 mars 2022

[Sainte Catherine a entendu Dieu lui dire :] C’est par la connaissance et la haine de vous-mêmes, et par la connaissance de ma Bonté que vous parvenez à la perfection ; aussi, l’âme ne connaît-elle jamais mieux si je suis en elle, qu’au moment de ces combats. Et comment ? Je vais te le dire !

Si en se voyant au milieu de ces luttes, elle prend bien conscience que ces assauts lui déplaisent, et qu’en même temps il ne dépend pas d’elle de s’en délivrer tout en refusant d’y consentir, elle peut alors connaître qu’elle n’est rien. Car, si elle était quelque chose par elle-même, elle se mettrait à l’abri de ces tentations, qu’elle voudrait ne pas subir. Ainsi, par ce moyen, elle s’humilie dans la vraie connaissance d’elle-même, et à la lumière de la très sainte Foi, elle accourt à Moi, le Dieu éternel, dont la Bonté garde sa volonté droite et sainte, pour l’empêcher au temps des multiples assauts, de céder à l’ennemi, en consentant aux tentations dont elle se sent assiégée.

Vous avez donc bien raison de vous réconforter par la doctrine de mon doux Verbe d’amour, mon Fils unique, au temps des afflictions, ou de l’adversité, ou des tentations des hommes et du démon ; car ce sont des moyens d’accroître votre vertu et de vous faire atteindre à la grande perfection.

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)