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Archive pour la catégorie ‘Carême 2021’

« Afin que tout homme qui croit obtienne par lui la vie éternelle. »

mardi 13 avril 2021

La figure est une manière d’exposer, par imitation, les choses que nous attendons. Par exemple, Adam est la préfiguration de l’Adam qui devait venir (1Co 15,45) et la pierre [au désert pendant l’Exode] est le Christ figurativement ; l’eau qui coule de la pierre est la figure de la puissance vivifiante du Verbe (Ex 17,6; 1Co 10,4), car il a dit : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive » (Jn 7,37). La manne est la préfiguration du « pain vivant qui est descendu du ciel » (Jn 6,51) ; et le serpent placé sur une hampe est la figure de la Passion, de notre salut consommé sur la croix, puisque ceux qui le regardaient étaient sauvés (Nb 21,9). De même, ce que dit l’Écriture des Israélites sortant d’Égypte a été raconté comme une préfiguration de ceux qui sont sauvés par le baptême ; car les premiers-nés des Israélites ont été sauvés (…) par la grâce accordée à ceux qui avaient été marqués du sang de l’agneau pascal et ce sang préfigurait le sang du Christ. (…)

Quant à la mer et à la nuée (Ex 14), en ce temps-là elles conduisaient à la foi par l’admiration ; mais pour le futur, elles figuraient la grâce qui devait venir. « Qui est sage ? Il comprendra ces choses ! » (Ps 106,43) Il comprendra que la mer, préfigurant le baptême, séparait de Pharaon comme le baptême nous fait échapper à la tyrannie du diable. Jadis la mer a étouffé en elle l’ennemi ; aujourd’hui meurt l’inimitié qui nous séparait de Dieu. De la mer, le peuple est sorti sain et sauf ; et nous, nous remontons des eaux comme revivant d’entre les morts, sauvés par la grâce de Celui qui nous a appelés. Quant à la nuée, elle était l’ombre du don de l’Esprit, qui rafraîchit nos membres en éteignant la flamme des passions.

Saint Basile (v. 330-379)

 

 

Témoins de la résurrection

samedi 10 avril 2021

On aurait pu s’attendre à ce que notre Seigneur, une fois ressuscité, se montre au plus grand nombre de gens possible, et surtout à ceux qui l’avaient crucifié. Tout au contraire, nous voyons par l’histoire qu’il se manifeste seulement à quelques témoins choisis, et spécialement à ses disciples immédiats. C’est ce que saint Pierre reconnaît lui-même quand il déclare : « Dieu l’a ressuscité le troisième jour. Il lui a donné de se montrer, non pas à tout le peuple, mais seulement à quelques témoins que Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et bu avec lui après sa résurrection » (Ac 10,40-41).

À première vue, cela nous semble étrange. Nous sommes disposés, en effet, à nous faire de la résurrection une idée bien différente, à nous la représenter comme une manifestation éclatante et visible de la gloire du Christ. (…) En nous la figurant ainsi comme un triomphe public, nous sommes conduits à imaginer la confusion et la terreur qui auraient saisi ses bourreaux si Jésus s’était présenté vivant devant eux. Mais, remarquons-le, un tel raisonnement revient à concevoir le Royaume du Christ comme un royaume de ce monde, ce qui n’est pas juste. Ce serait nous représenter le Christ comme étant déjà venu à ce moment-là juger le monde, ce qui n’arrivera qu’au dernier jour. (…)

Pourquoi se montrer seulement « à quelques témoins choisis d’avance » ? Parce que c’était le moyen le plus efficace de propager la foi dans le monde entier. (…) Quel aurait été le fruit d’une manifestation publique qui s’impose à tous ? Ce nouveau miracle aurait laissé la foule telle qu’il l’avait trouvée, sans changement efficace. Déjà ses anciens miracles n’avaient pas convaincu tout le monde (…) ; qu’auraient-ils pu dire et sentir de plus qu’auparavant, même « si quelqu’un ressuscite d’entre les morts » (Lc 16,31) ? (…) Le Christ se montre pour susciter des témoins de la résurrection, des ministres de sa parole, les fondateurs de son Église. Comment la foule, avec sa nature changeante, aurait-elle pu le devenir ?

Saint John Henry Newman (1801-1890)

 

 

« Touchez-moi, regardez ! »

jeudi 8 avril 2021

« Voyez mes mains et mes pieds : c’est bien moi. » Il y a, je pense, quatre raisons pour lesquelles le Seigneur montre aux apôtres son côté, ses mains et ses pieds. Premièrement, pour prouver qu’il était vraiment ressuscité et nous enlever tout sujet de doute. Deuxièmement, pour que « la colombe », c’est-à-dire l’Église ou l’âme fidèle, établisse son nid dans ces plaies, comme « au creux du rocher » (Ct 2,14) et y trouve un abri contre l’épervier qui la guette. Troisièmement, pour imprimer dans nos cœurs, comme des insignes, les marques de sa Passion. Quatrièmement, pour nous avertir et nous demander d’avoir pitié de lui et de ne pas le transpercer de nouveau des clous de nos péchés.

Il nous montre ses mains et ses pieds : « Voici, dit-il, les mains qui vous ont façonnés (cf Ps 118,73) ; voyez comme les clous les ont transpercés. Voici mon cœur, où vous êtes nés, vous les fidèles, vous mon Église, comme Ève est née du côté d’Adam ; voyez comme la lance l’a ouvert, afin que vous soit ouverte la porte du Paradis, que tenait fermée le Chérubin de feu. Le sang qui a coulé de mon côté a écarté cet ange, a émoussé son glaive ; l’eau a éteint le feu (cf Jn 19,34). (…) Écoutez avec soin, recueillez ces paroles, et vous aurez la paix avec vous. »

Saint Antoine de Padoue (v. 1195-1231)

 

 

 

« Notre cœur n’était-il pas brûlant tandis qu’il nous ouvrait les Écritures ? » (Lc 24,32)

mercredi 7 avril 2021

Quelle est la raison intime de la fécondité de la parole de Dieu ? C’est que le Christ est toujours vivant ; il est toujours le Dieu qui sauve et vivifie. (…) Or, toute proportion gardée, ce qui est vrai de la personne même de Jésus, l’est aussi de sa parole ; et ce qui était vrai hier l’est encore de nos jours.

Le Christ vit dans l’âme du juste ; sous la direction infaillible de ce Maître intérieur, l’âme (…) pénètre dans la clarté divine ; le Christ lui donne son Esprit, auteur premier des Saints Livres, pour qu’elle y « scrute jusqu’aux profondeurs même de l’infini » (cf. 1 Co 2,10) ; elle contemple les merveilles de Dieu à l’égard des hommes ; elle mesure, par la foi, les proportions divines du mystère de Jésus, et ce spectacle admirable, dont les splendeurs l’éclairent et l’illuminent, la touche, l’attire, la ravit, la soulève, la transporte, la transforme. Elle éprouve à son tour ce que ressentaient les disciples d’Emmaüs quand le Christ Jésus daignait leur interpréter lui-même les livres saints : « nos cœurs n’étaient-ils pas ardents, tandis qu’il nous entretenait et nous dévoilait les Écritures ».

Quoi d’étonnant dès lors que l’âme, charmée et conquise par cette parole toute vive « qui pénètre jusqu’aux moelles » (He 4,12), fasse sienne la prière de ces disciples : « Seigneur, demeurez avec nous ! Ô vous, le Maître incomparable, lumière indéfectible, infaillible vérité, seule vraie vie de nos âmes ! » Prévenant ces pieux désirs, l’Esprit Saint « fait entendre en nous ses gémissements inénarrables » (Rm 8,26), qui constituent la vrai prière, ces désirs véhéments de posséder Dieu, de ne plus vivre que pour la gloire du Père et celle de son Fils Jésus. L’amour, agrandi et ardent au contact de Dieu, envahit toutes les puissances de l’âme, la rend forte et généreuse pour accomplir parfaitement toutes les volontés du Père, pour se livrer pleinement au bon plaisir divin.

Bienheureux Columba Marmion (1858-1923)

 

 

Le mardi de Pâques

mardi 6 avril 2021

« Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers mon Père. » Qu’est-ce à dire ? Qu’on touche mieux le Christ par la foi que par la chair. Toucher le Christ par la foi, c’est le toucher en toute vérité. Ainsi la femme qui souffrait de pertes de sang : elle s’approche du Christ, pleine de foi, et touche son vêtement. (…) Et le Seigneur, pressé par des foules, n’est touché que par cette femme (…) parce qu’elle a cru (Mc 5,25s).

Aujourd’hui, mes frères, Jésus est dans le ciel. Quand il demeurait parmi ses disciples, et qu’il était revêtu d’une chair visible et qu’il possédait un corps palpable, on le voyait, on le touchait. Mais aujourd’hui qu’il siège à la droite du Père, qui d’entre nous peut le toucher ? Et pourtant, malheur à nous, si nous ne le touchons pas. Nous tous le touchons, nous qui croyons. Il est au ciel, il est loin, et les distances qui le séparent de nous ne sont pas mesurables. Mais crois, et tu le touches. Que dis-je ? Tu le touches ? Si tu crois, tu as auprès de toi celui en qui tu crois. (…)

Voulez-vous savoir comment Marie voulait le toucher ? Elle le cherchait mort et ne croyait pas qu’il devait ressusciter : « Ils ont enlevé mon Seigneur du tombeau ! » (Jn 20,2) Elle pleure un homme (…) « Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers mon Père. Tu me touches avant que je ne sois monté vers mon Père, et tu ne vois qu’un homme en moi. Que te donne cette foi-là ? Laisse-moi monter vers le Père. Je ne l’ai jamais quitté, mais j’y monterai pour toi, si tu me crois l’égal du Père. » Notre Seigneur Jésus Christ n’a pas quitté son Père, lorsqu’il est descendu d’auprès de lui. Et lorsqu’il est remonté d’auprès de nous, il ne nous a pas non plus abandonnés. Car au moment de monter et de siéger à la droite du Père, si loin, il dit à ses disciples : « Je reste au milieu de vous jusqu’à la fin des temps » (Mt 28,20).

Saint Augustin (354-430)

 

 

Le lundi de Pâques

lundi 5 avril 2021

L’Évangile nous dépeint la course joyeuse des disciples : « Tous deux couraient ensemble, mais l’autre disciple courut en avant, plus vite que Pierre, et arriva le premier au tombeau » (Jn 20,4). Qui ne désirerait aussi chercher le Christ siégeant à la droite du Père, et pour obtenir de le trouver au terme de sa quête, qui ne chercherait à courir en esprit, lorsqu’il se remémore avec tant de joie la course à toutes jambes de tels apôtres ? Pour nous encourager en ce désir, que chacun de nous redise avec élan ce verset du Cantique des Cantiques : « Entraîne-moi à ta suite, nous courrons à l’odeur de tes parfums » (3,4 LXX). Courir à l’odeur des parfums, c’est marcher sans relâche, du pas de son esprit, vers notre Créateur, réconforté par la sainte odeur des vertus.

Telle a bien été la course digne d’éloges de ces très saintes femmes qui, d’après les évangiles, avaient suivi le Seigneur depuis la Galilée et lui sont restées fidèles au moment de sa Passion, alors que les disciples s’étaient enfuis (Mt 27,55) ; elles ont couru à l’odeur des parfums, en esprit, et même selon la lettre, car elles ont acheté des aromates pour oindre les membres du Seigneur, comme en témoigne Marc (16,1).

Frères, à l’exemple des soins empressés des disciples, hommes et femmes, auprès du sépulcre de leur Maître (…), proclamons à notre manière les joies de la résurrection du Seigneur. Il serait bien dommage qu’une langue de chair taise la louange due à notre Créateur, en ce jour où sa chair est ressuscitée. Cette résurrection magnifique nous incite à proclamer la grandeur de l’Auteur d’une telle joie, et à annoncer la victoire remportée contre notre vieil ennemi (…) : avec le fauteur de mort lui-même, la mort est aujourd’hui délogée ; aujourd’hui, par le Christ, la vie est rendue aux mortels. Aujourd’hui les chaînes du démon sont brisées ; la liberté du Seigneur est accordée en ce jour aux chrétiens.

Saint Odilon de Cluny (961-1048)

 

 

« Jour d’allégresse et de joie » (Ps 117,24)

dimanche 4 avril 2021

Quelle belle fête de Pâques ! Et quelle belle assemblée ! Ce jour contient tant de mystères, anciens et nouveaux ! En cette semaine de fête ou plutôt d’allégresse, par toute la terre les hommes se réjouissent, et même les puissances du ciel se joignent à nous pour célébrer dans la joie la résurrection du Seigneur. Exultent les anges et les archanges, qui attendent que le roi des cieux, le Christ notre Dieu, revienne vainqueur de la terre ; exultent les chœurs des saints, qui proclament « celui qui s’est levé avant l’aurore » (Ps 109,3), le Christ. La terre exulte : le sang d’un Dieu l’a lavée. La mer exulte : les pas du Seigneur l’ont honorée. Qu’exulte tout homme, rené de l’eau et de l’Esprit Saint ; qu’exulte Adam, le premier homme, délivré de l’ancienne malédiction. (…)

Non seulement la résurrection du Christ a instauré ce jour de fête, mais encore elle nous procure, au lieu de la souffrance, le salut, au lieu de la mort, l’immortalité, au lieu des blessures, la guérison, au lieu de la déchéance, la résurrection. Autrefois, le mystère de la Pâque s’accomplissait en Égypte selon les rites donnés par la Loi ; le sacrifice de l’agneau n’était qu’un signe. Mais aujourd’hui nous célébrons, selon l’Évangile, une pâque spirituelle, qui est le jour de la résurrection. Là, on immolait un agneau du troupeau (…) ; ici, c’est le Christ en personne qui s’offre en agneau de Dieu. Là, une bête de la bergerie ; ici, non pas un agneau, mais le bon pasteur lui-même, qui donne sa vie pour ses brebis (Jn 10,11). (…) Là, les Hébreux traversent la mer Rouge et entonnent en l’honneur de leur défenseur une hymne de victoire : « Célébrons le Seigneur ; il s’est couvert de gloire » (Ex 15,1). Ici, ceux qui ont été jugés dignes du baptême chantent en leur cœur l’hymne de la victoire : « Un seul saint, un seul Dieu, Jésus Christ, dans la gloire du Dieu Père. Amen ». « Le Seigneur règne, vêtu de majesté », s’écrie le prophète (Ps 92,1). Les Hébreux traversent la mer Rouge et mangent la manne dans le désert. Aujourd’hui, en sortant des fonts baptismaux, on mange le pain qui descend du ciel (Jn 6,51).

Proclus de Constantinople (v. 390-446)

 

 

Le samedi saint (Veillée Pascale)

samedi 3 avril 2021

« Il y a un temps pour la joie, dit Salomon, et un temps pour la tristesse. » (cf. Qo 3,4) La tristesse est passée, le temps de la joie est arrivé, la vraie joie qui provient de la résurrection du Christ. (…)

Pour toi, il est monté, victorieux des enfers, il a brisé les portes d’airain, il a rompu les barres de fer, il s’est emparé des forteresses de l’enfer, il a écrasé les têtes du dragon. De tes ennemis, il a fait un immense carnage ; il a attaché dans la fosse le prince des enfers. Il a tué la mort et il a mis aux fers l’auteur de la mort. (…) Ensuite, il a retiré les siens des ténèbres et il a rompu leurs liens. Il s’est associé les âmes de tous les justes marchant à la lumière de son visage et exultant en son nom. Elles ont été exaltées dans sa justice, elles qui avaient été humiliées pour leurs injustices.

Dans son passage aux enfers, le Seigneur Jésus fut seul, ainsi que l’a chanté David en sa personne, disant : « Pour moi, je suis seul, tandis que je passe. » (cf. Ps 140,10) Seul à l’entrée, mais nullement seul à la sortie, car il a ramené avec lui d’innombrables milliers de saints. Il est tombé en terre et il est mort, de sorte qu’il a porté beaucoup de fruit (cf. Jn 12,24). Il s’est laissé tomber comme une semence pour récolter en moisson le genre humain. (…) Oui, morts aux péchés en nous-mêmes à la fontaine baptismale, par le bain de la régénération nous renaissons au Christ, afin de vivre à celui qui est mort pour tous. Aussi l’Apôtre dit-il : « Vous tous qui avez été baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ. » (cf. Ga 3,27) D’un seul grain viennent donc des moissons nombreuses. (…)

C’est de lui aussi que l’Apôtre dit : « C’est pourquoi Dieu l’a exalté et lui a donné le Nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse, au ciel, sur terre et dans les enfers. » (Ph 2,9-10) Oui, les enfers fléchissent le genou devant lui par frayeur, la terre par son rachat, les cieux par félicité.

Saint Amédée de Lausanne (1108-1159)

 

 

 

Le vendredi saint : Célébration de la Passion du Seigneur

vendredi 2 avril 2021

Père, la tête de ton Fils Jésus qui fait trembler les archanges, est frappée par un roseau ; son visage dans lequel les anges désirent plonger leur regard (1 P 1,12), est conspué de crachats, blessé de gifles ; sa barbe est arrachée, il est frappé de coups de poing, traîné par les cheveux. Et toi, Dieu très clément, tu te caches, tu te dissimules et préfères qu’un seul, ton Unique, soit couvert de crachats et giflé plutôt que tout le peuple périsse (cf. Jn 11,50). A toi la louange, à Toi la gloire, parce que des crachats, des gifles et des coups de poing tu as extrait le contrepoison qui chasse de notre âme le venin de l’antique serpent. (…)

« Ses mains qui, d’après l’épouse du Cantique, sont des globes d’or, garnis de hyacinthes » (cf. Ct 5,14), furent percées par les clous. Ses pieds, auxquels la mer s’offrit pour qu’il puisse y marcher dessus, furent cloués à la croix. Son visage qui est comme le soleil à son zénith, se couvrit de la pâleur de la mort. Ses yeux très aimés, auxquels aucune créature n’est invisible, furent fermés dans la mort. Peut-il y avoir douleur aussi grande que ma douleur ? Au milieu de tout cela, seul vint à son secours le Père, dans les mains duquel il confia son esprit en disant : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit » (Lc 23,46). Et, sur ces mots, inclinant la tête ― lui qui n’avait aucun autre lieu où reposer sa tête (Mt 8,20) ― il expira. (…)

Prions, frères bien-aimés, et demandons avec insistance et piété au Seigneur Jésus Christ qui a redonné la vue à l’aveugle-né et à Tobie, d’éclairer les yeux de notre âme par la foi en son Incarnation et par l’amertume de sa Passion, afin que nous méritions de contempler le même Fils de Dieu, Lumière née de la lumière, dans la splendeur des saints, dans la clarté des anges. Que vienne à notre secours celui qui vit et règne avec le Père et l’Esprit pour les siècles des siècles.

Saint Antoine de Padoue (v. 1195-1231)

 

 

Le jeudi saint

jeudi 1 avril 2021

Soyez obéissants jusqu’à la mort, à l’exemple de l’Agneau sans tache qui a obéi à son Père jusqu’à la mort honteuse sur la croix. Songez qu’il est le chemin et la règle que vous devez suivre. Tenez-le toujours présent devant les yeux de votre esprit. Voyez combien il est obéissant, ce Verbe, la Parole de Dieu ! Il ne refuse pas de porter le fardeau des peines dont son Père l’a chargé ; au contraire, il s’élance, animé d’un grand désir. N’est-ce pas ce qu’il manifeste lors de la Cène du Jeudi saint quand il dit : « J’ai désiré d’un grand désir manger cette pâque avec vous avant de mourir » (Lc 22,15) ? Par « manger la pâque », il entend l’accomplissement de la volonté du Père et de son désir. Ne voyant presque plus de temps devant lui (il se voyait déjà à la fin, quand il devait sacrifier son corps pour nous), il exulte, se réjouit et dit avec joie : « J’ai désiré d’un grand désir ». Voilà la pâque dont il parlait, celle qui consistait à se donner lui-même en nourriture, à immoler son propre corps pour obéir au Père.

Jésus avait célébré bien d’autres pâques avec ses disciples, mais jamais celle-ci, ô indicible, douce et brûlante charité ! Tu ne penses ni à tes peines ni à ta mort ignominieuse ; si tu y avais pensé, tu n’aurais pas été si joyeux, tu ne l’aurais pas appelé une pâque. Le Verbe voit que c’est lui-même qui a été choisi, lui-même qui a reçu pour épouse toute notre humanité. On lui a demandé de nous donner son propre sang afin que la volonté de Dieu s’accomplisse en nous, afin que ce soit son sang qui nous sanctifie. Voilà bien la douce pâque qu’accepte cet agneau sans tache (cf Ex 12,5), et c’est avec un grand amour et un grand désir qu’il accomplit la volonté du Père et qu’il observe entièrement son dessein. Quel doux amour indicible ! (…)

C’est pourquoi, mes bien-aimés, je vous prie de ne jamais redouter quoi que ce soit et de mettre toute votre confiance dans le sang du Christ crucifié. (…) Que toute crainte servile soit bannie de votre esprit. Vous direz avec saint Paul : « Par le Christ crucifié, je peux tout, puisqu’il est en moi par désir et par amour, et il me fortifie. » (cf Ph 4,13 ;Ga 2,20). Aimez, aimez, aimez ! Par son sang, le doux agneau a fait de votre âme un rocher inébranlable.

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)