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Archive pour la catégorie ‘Carême 2018’

Dimanche de la Miséricorde divine

dimanche 8 avril 2018

La première Fête de la Divine Miséricorde pour toute l’Eglise – instituée par Jean-Paul II le 30 avril 2000 à l’occasion de la canonisation de Sœur Faustine – a été célébrée le Dimanche 22 avril 2001. Elle est depuis célébrée tous les ans, conformément aux demandes du Seigneur, le premier Dimanche après Pâques.

 » Ma fille, parle au monde entier de mon inconcevable Miséricorde. Je désire que la Fête de la Miséricorde soit le recours et le refuge pour toutes les âmes, et surtout pour les pauvres pécheurs. En ce jour les entrailles de ma Miséricorde sont ouvertes, je déverse tout un océan de grâces sur les âmes qui s’approcheront de la source de ma miséricorde ; toute âme qui se confessera (dans les huit jours qui précèdent ou suivent ce Dimanche de la Miséricorde) et communiera, recevra le pardon complet de ses fautes et la remise de leur peine ; en ce jour sont ouvertes toutes les sources divines par lesquelles s’écoulent les grâces ; qu’aucune âme n’ait peur de s’approcher de moi, même si ses péchés sont comme l’écarlate. […] La Fête de la Miséricorde est issue de mes entrailles, je désire qu’elle soit fêtée solennellement le premier dimanche après Pâques. Le genre humain ne trouvera pas la paix tant qu’il ne se tournera pas vers la source de ma Miséricorde.  » (Petit Journal, § 699).

 

 

 

 

 

Le vendredi de Pâques

vendredi 6 avril 2018

Nous sommes lents à nous rendre compte de cette grande et sublime vérité que le Christ marche encore, en quelque sorte, au milieu de nous, et de sa main, de son regard ou de sa voix, nous fait signe de le suivre. Nous ne comprenons pas que cet appel du Christ est une chose qui se réalise tous les jours, aujourd’hui comme autrefois. Nous en sommes à croire que c’était bon au temps des apôtres, mais aujourd’hui nous n’y croyons plus à notre égard, nous ne sommes pas attentifs à le rechercher à notre sujet. Nous n’avons plus des yeux pour voir le Maître — bien différents en cela de l’apôtre bien-aimé qui a reconnu le Christ, même quand tous les autres disciples ne le reconnaissaient pas. Il était là, cependant, debout sur le rivage ; c’était après sa résurrection, quand il ordonnait de jeter le filet dans la mer ; c’est alors que le disciple que Jésus aimait dit à Pierre : « C’est le Seigneur ! »

Ce que je veux dire, c’est que les hommes qui mènent une vie de croyant aperçoivent de temps en temps des vérités qu’ils n’avaient pas encore vues, ou sur lesquelles leur attention n’avait jamais été appelée. Et tout d’un coup, elles se dressent devant eux comme un appel irrésistible. Or, il s’agit de vérités qui engagent notre devoir, qui prennent la valeur de préceptes, et qui demandent l’obéissance. C’est de cette façon, ou par d’autres encore, que le Christ nous appelle maintenant. Il n’y a rien de miraculeux ou d’extraordinaire dans cette façon de faire. Il agit par l’intermédiaire de nos facultés naturelles et au moyen des circonstances mêmes de la vie.

Bienheureux John Henry Newman (1801-1890), cardinal, théologien, fondateur de l’Oratoire en Angleterre
PPS vol. 8, n°2 (trad. Saleilles, 1906, p. 97-98 rev)

 

 

Le jeudi de Pâques

jeudi 5 avril 2018

Les apôtres et les disciples de notre Seigneur, comme des enfants sans père et des soldats sans capitaine, s’étant retirés dans une maison tout craintifs, le Sauveur leur est apparu pour les consoler en leur affliction, et il leur dit : « Paix à vous ». Comme s’il voulait dire : « Pourquoi êtes-vous si craintifs et affligés ? Si c’est le doute que ce que je vous ai promis concernant ma résurrection n’arrive pas, paix à vous, demeurez en paix, la paix soit faite en vous, car je suis ressuscité. Voyez mes mains, touchez mes blessures ; je suis bien moi-même, ne craignez plus, la paix soit en vous »…

Comme s’il voulait dire : « Qu’avez-vous? Je vois bien, mes apôtres, que vous êtes tout craintifs et peureux ; mais désormais vous n’en avez plus aucun sujet, car je vous ai acquis la paix que je vous donne. Non seulement mon Père me la doit parce que je suis son Fils, mais encore parce que je l’ai achetée au prix de mon sang et de ces plaies que je vous montre. Désormais ne soyez plus lâches ni peureux, car la guerre est finie. Vous avez eu des raisons de craindre ces jours passés quand vous m’avez vu fouetté…, battu, couronné d’épines, blessé de la tête jusqu’aux pieds et attaché à la croix. J’ai souffert toutes sortes d’opprobres, de dérélictions et d’ignominies… Mais maintenant ne craignez plus, la paix soit en vos cœurs, car je suis victorieux et j’ai terrassé tous mes adversaires : j’ai vaincu le diable, le monde et la chair… Jusqu’à cette heure je vous ai donné diverses fois ma paix ; maintenant je vous montre comme je vous l’ai acquise… Tout ce que je donne à mes plus chers, c’est la paix ; c’est pourquoi, paix à vous, et à tous ceux qui croiront en moi. »

Saint François de Sales (1567-1622), évêque de Genève et docteur de l’Église
OC, t. 9, p. 290s (in Desjardins,  Livre des quatre amours, p. 247 ; français modernisé, rev.)

 

 

Le mercredi de Pâques

mercredi 4 avril 2018

Les jours qui se sont écoulés entre la résurrection du Seigneur et son ascension n’ont pas été dépourvus d’événements : de grands mystères y ont reçu leur confirmation, de grandes vérités y ont été révélées. C’est alors que la crainte d’une mort amère est abolie et que l’immortalité, non seulement de l’âme mais aussi de la chair, est manifestée…

En ces jours-là, le Seigneur se joint à deux disciples et les accompagne en chemin ; et, afin de dissiper en nous toutes les ténèbres du doute, il reproche à ces hommes apeurés leur lenteur à comprendre. Les cœurs qu’il éclaire voient s’allumer en eux la flamme de la foi ; ils étaient tièdes, et ils deviennent brûlants lorsque le Seigneur leur fait comprendre les Écritures. À la fraction du pain s’ouvrent les yeux de ceux qui sont à table avec lui : ils voient la glorification de leur nature humaine et ils ont un bonheur bien plus grand que nos premiers parents dont les yeux se sont ouverts sur la honte de leur désobéissance (Gn 3,7).

Parmi ces merveilles et d’autres encore, comme les disciples demeuraient dans l’inquiétude, le Seigneur est apparu au milieu d’eux et leur a dit : « La paix soit avec vous » (Lc 24,36; Jn 20,26). Pour qu’ils ne restent pas dans ces pensées qui les troublaient… il a dévoilé à leurs yeux hésitants les traces de la croix sur ses mains et ses pieds… Ainsi ce ne serait pas d’une foi hésitante, mais d’une conviction certaine qu’ils maintiendraient que le corps qui allait siéger sur le trône de Dieu le Père était bien celui qui avait reposé dans le tombeau. Voilà ce que la bonté de Dieu a enseigné avec tant de soin pendant tout ce temps entre la résurrection et l’ascension, voilà ce qu’elle a montré aux yeux et au cœur de ses amis : le Seigneur Jésus Christ, qui était vraiment né, avait vraiment souffert et est vraiment mort, est vraiment ressuscité.

Saint Léon le Grand (?-v. 461), pape et docteur de l’Église
1er sermon pour l’Ascension ; SC 74 bis (trad. cf SC p. 271)

 

 

 

Dimanche de Pâques : Saint Jour de Pâques, la Résurrection du Seigneur, solennité des solennités

dimanche 1 avril 2018

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Extraits du Message « Urbi et Orbi »
du Pape Benoît XVI

Chers Frères et Sœurs de Rome et du monde entier !

De tout cœur, je forme pour vous tous des vœux de Pâques avec les mots de saint Augustin : « Resurrectio Domini, spes nostra – la résurrection du Seigneur est notre espérance » (Sermon 261, 1). Par cette affirmation, le grand Évêque expliquait à ses fidèles que Jésus est ressuscité afin que nous-mêmes, pourtant destinés à mourir, nous ne désespérions pas en pensant qu’avec la mort la vie est totalement finie ; le Christ est ressuscité pour nous donner l’espérance (cf. ibid.).

En effet, une des questions qui cause le plus d’angoisse dans l’existence de l’homme est précisément celle-ci : qu’y-a-t-il après la mort ? À cette énigme, la solennité de ce jour nous permet de répondre que la mort n’a pas le dernier mot, parce que, à la fin, c’est la Vie qui triomphe. Et cette certitude qui est nôtre ne s’appuie pas sur de simples raisonnements humains, mais bien sur un fait historique de foi : Jésus Christ, crucifié et enseveli, est ressuscité avec son corps glorieux. Jésus est ressuscité pour que nous aussi, en croyant en Lui, nous puissions avoir la vie éternelle. Cette annonce est au cœur du message évangélique. Saint Paul le déclare avec force : « Si le Christ n’est pas ressuscité, notre message est sans objet, et votre foi est sans objet ». Et il ajoute : « Si nous avons mis notre espoir dans le Christ pour cette vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes » (1 Co 15, 14.19). Depuis l’aube de Pâques, un nouveau printemps d’espérance envahit le monde ; depuis ce jour, notre résurrection est déjà commencée, parce que Pâques n’indique pas simplement un moment de l’histoire, mais le début d’une condition nouvelle : Jésus est ressuscité non pas pour que sa mémoire reste vivante dans le cœur de ses disciples, mais bien pour que Lui-même vive en nous et qu’en Lui nous puissions déjà goûter la joie de la vie éternelle.

La résurrection n’est donc pas une théorie, mais une réalité historique révélée par l’Homme Jésus Christ à travers sa « pâque », son « passage » qui a ouvert une « voie nouvelle » entre la terre et le Ciel (cf. He 10, 20). Ce n’est ni un mythe, ni un rêve, ce n’est ni une vision, ni une utopie, ce n’est pas une fable, mais un événement unique et définitif : Jésus de Nazareth, fils de Marie, qui au soir du Vendredi saint a été descendu de la Croix et mis au tombeau, est sorti victorieux de la tombe. En effet, à l’aube du premier jour après le sabbat, Pierre et Jean ont trouvé le tombeau vide. Madeleine et les autres femmes ont rencontré Jésus ressuscité ; il a été reconnu aussi par les deux disciples d’Emmaüs à la fraction du pain ; le Ressuscité est apparu aux Apôtres le soir venu dans le Cénacle et ensuite à beaucoup d’autres disciples en Galilée.

L’annonce de la résurrection du Seigneur illumine les zones d’ombre du monde dans lequel nous vivons. Je pense particulièrement au matérialisme et au nihilisme, à une vision du monde qui ne sait pas dépasser ce qui est expérimentalement constatable, et qui se retrouve inconsolée dans la conscience du néant qui serait le point d’arrivée ultime de l’existence humaine. C’est un fait que si le Christ n’était pas ressuscité, le « néant » serait destiné à l’emporter. Si nous retirons le Christ et sa résurrection, il n’y a pas d’issue pour l’homme et toute espérance demeure une illusion. Mais précisément aujourd’hui, éclate avec force l’annonce de la résurrection du Seigneur, et elle est la réponse à la question incessante des sceptiques, rapportée aussi par le livre de Qohélet : « Y a-t-il une seule chose dont on dise : “voilà enfin du nouveau” ? » (Qo 1, 10). Oui, répondons-nous, le matin de Pâques tout a été renouvelé. « La mort et la vie s’affrontèrent / en un duel prodigieux : / le Prince de la vie mourut ; / vivant, il règne » (Séquence pascale). Voilà la nouveauté ! C’est une nouveauté qui change l’existence de celui qui l’accueille, comme on le voit chez les saints. C’est ce qui est arrivé, par exemple, à saint Paul.

Bien souvent, dans le cadre de l’Année paulinienne, nous avons eu l’occasion de méditer sur l’expérience du grand Apôtre. Saul de Tarse, le persécuteur acharné des chrétiens, a rencontré le Christ ressuscité sur le chemin de Damas et il a été « conquis » par Lui. Le reste nous est bien connu. Il s’est produit chez Paul ce qu’il écrira plus tard aux chrétiens de Corinthe : « Si quelqu’un est en Jésus Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né » (2 Co 5, 17). Tournons notre regard vers ce grand évangélisateur qui, avec l’enthousiasme et l’audace de son action apostolique, a porté l’Évangile à tant de populations du monde d’alors. Son enseignement et son exemple nous stimulent à rechercher le Seigneur Jésus. Ils nous encouragent à mettre notre confiance en Lui, car désormais la conscience du néant qui tend à intoxiquer l’humanité a été submergée dans la lumière et l’espérance qui proviennent de la résurrection. Désormais, elles sont vraies et bien réelles les paroles du Psaume : « Même la ténèbre pour toi n’est pas ténèbre, et la nuit comme le jour est lumière ! » (138 (139), 12). Ce n’est plus le néant qui enveloppe toutes choses, mais la présence amoureuse de Dieu. Le règne de la mort a même été anéanti, parce que dans les « enfers » aussi le Verbe de vie, poussé par le souffle de l’Esprit, est arrivé (cf. v. 8).

S’il est vrai que la mort n’a plus aucun pouvoir sur l’homme et sur le monde, il subsiste cependant encore beaucoup, trop de signe de son antique domination. Si par la Pâques, le Christ a extirpé la racine du mal, il a toutefois besoin d’hommes et de femmes qui dans tous les temps et lieux l’aident à affirmer sa victoire avec les mêmes armes que lui : les armes de la justice et de la vérité, de la miséricorde, du pardon et de l’amour. […]

Resurrection Domini, spes nostra !La résurrection du Christ est notre espérance ! Cela, l’Église le proclame avec joie : elle annonce l’espérance, que Dieu a rendu ferme et invincible en ressuscitant Jésus Christ d’entre les morts ; elle communique l’espérance, qu’elle porte dans le cœur et veut partager avec tous, et partout, spécialement là où les chrétiens souffrent la persécution à cause de leur foi et de leur engagement pour la justice et pour la paix ; elle invoque l’espérance capable de susciter le courage pour le bien aussi et surtout quand il est coûteux. Aujourd’hui, l’Église chante « le jour que le Seigneur a fait » et elle invite à la joie. Aujourd’hui l’Église prie, invoque Marie, Étoile de l’espérance, pour qu’elle guide l’humanité vers le port sûr du salut qui est le Cœur du Christ, la Victime pascale, l’Agneau qui « a racheté le monde », l’Innocent qui « nous a réconcilié, nous pécheurs, avec le Père ».
À lui, le Roi vainqueur, à Lui le Crucifié et le Ressuscité, nous crions avec joie notre Alléluia!

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© Copyright 2009 – Libreria Editrice Vaticana

Surrexit Dominus vere, alleluia!
>>> Hallelujah – Choir of King’s College

Message Pascal et Bénédiction « Urbi et Orbi »

Source : vatican.va (« Rév. x gpm »).

Le samedi saint

samedi 31 mars 2018

Le monde entier, qui célèbre la veillée pascale tout au long de cette nuit, témoigne de la grandeur et de la solennité de cette nuit. Et à juste titre : en cette nuit la mort a été vaincue, la Vie est vivante, le Christ est ressuscité des morts. Jadis Moïse avait dit au peuple, à propos de cette Vie : « Vous verrez votre vie suspendue au bois de jour et de nuit » (Dt 28,66 Vulg)… Qu’il s’agit là du Christ Seigneur, c’est lui-même qui nous le montre dans l’Évangile quand il dit : « Je suis la Voie, la Vérité et la Vie » (Jn 14,6). Il se dit la voie, parce qu’il conduit au Père ; la vérité, parce qu’il condamne le mensonge ; et la vie, parce qu’il commande à la mort… : « Mort, où est ton aiguillon ? Mort, où est ta victoire ? » (1Co 15,55) Car la mort, qui était toujours victorieuse, a été vaincue par la mort de son vainqueur. La Vie a accepté de mourir pour mettre la mort en déroute. De même qu’au lever du jour les ténèbres disparaissent, ainsi la mort a été anéantie lorsque s’est levée la Vie éternelle…

Voici donc le temps de Pâques. Jadis, Moïse en a parlé au peuple en disant : « Ce mois sera pour vous le premier des mois de l’année » (Ex 12,2)… Le premier mois de l’année n’est donc pas celui de janvier, où tout est mort, mais le temps de Pâques, où tout revient à la vie. Car c’est maintenant que l’herbe des prés, en quelque sorte, ressuscite de la mort, maintenant qu’il y a des fleurs aux arbres, et que les vignes bourgeonnent, maintenant que l’air lui-même semble heureux du début d’une année nouvelle… Ce temps de Pâques est donc le premier mois, le temps nouveau…, et en ce jour le genre humain aussi est renouvelé. Car aujourd’hui, dans le monde entier, des peuples innombrables ressuscitent par l’eau du baptême pour une vie nouvelle… Nous donc, qui croyons que le temps de Pâques est vraiment l’année nouvelle, nous devons célébrer ce saint jour en toute allégresse, exultation, et joie spirituelle, afin de pouvoir dire en toute vérité ce refrain du psaume : « Voici le jour que le Seigneur a fait ; vivons-le dans la joie et l’allégresse » (117,24).

Saint Chromace d’Aquilée (?-407), évêque
Sermon 17, 2ème pour la Grande Nuit ; SC 154 (trad. SC p. 269 rev.)

 

 

 

Le jeudi saint

jeudi 29 mars 2018

Entre tous les souvenirs du Christ les plus dignes d’être rappelés, se place évidemment ce repas final de la très sainte Cène, où non seulement l’agneau pascal est donné à manger mais où l’Agneau immaculé, qui efface les péchés du monde, est lui-même offert en nourriture sous l’espèce d’un pain « renfermant toutes les délices et la suavité de toutes les saveurs » (cf. Sg 16,20).

En ce festin, la douceur de la bonté du Christ brille admirable : il soupe à la même table et au même plat, avec ces petits pauvres, ses disciples, et Judas, le traître.

Un admirable exemple d’humilité y resplendit lorsque le Roi de gloire, ceint d’un linge, lave avec beaucoup de soin les pieds de ces pêcheurs et même de celui qui le trahit.

Admirable aussi la générosité de sa magnificence lorsqu’il donne son Corps très saint en nourriture et son Sang véritable en breuvage à ses premiers prêtres et par suite à toute l’Église et au monde entier, afin que ce qui allait bientôt devenir un sacrifice agréable à Dieu et le prix inestimable de notre rédemption soit notre viatique et notre soutien.

Enfin l’admirable excès de son amour y brille plus que tout dans cette tendre exhortation que, « aimant les siens jusqu’au bout » (Jn 13,1), il leur adresse pour les affermir dans le bien, avertissant spécialement Pierre pour fortifier sa foi et offrant sa poitrine à Jean pour un suave et saint repos.

Que toutes ces choses sont donc admirables et remplies de douceur ! Du moins pour l’âme appelée à un repas aussi excellent et qui accourt de toute l’ardeur de son esprit, de façon à pouvoir jeter ce cri du prophète : « Comme le cerf aspire aux fontaines d’eau, ainsi mon âme soupire vers vous, ô mon Dieu ! » (Ps 41,2).

Saint Bonaventure (1221-1274), franciscain, docteur de l’Église
L’Arbre de Vie, §16 (Œuvres spirituelles, t.III, Sté S. François d’Assise, Paris, 1932, pp. 81-82, rev.)

 

 

 

Le mercredi saint

mercredi 28 mars 2018

Pourquoi Judas a-t-il trahi Jésus ? La question est l’objet de diverses hypothèses. Certains recourent au fait de sa cupidité  d’autres soutiennent une explication d’ordre messianique : Judas aurait été déçu de voir que Jésus n’insérait pas dans son programme la libération politico-militaire de son pays. En réalité, les textes évangéliques insistent sur un autre aspect : Jean dit expressément que « le démon a inspiré à Judas Iscariote, fils de Simon, l’intention de le livrer » (Jn 13,2). Luc écrit de manière analogue : « Satan entra en Judas, appelé Iscariote, qui était au nombre des Douze » (Lc 22,3). De cette manière, on va au-delà des motivations historiques et on explique l’affaire d’après la responsabilité personnelle de Judas, qui céda misérablement à une tentation du Malin. La trahison de Judas demeure en tout cas un mystère. Jésus l’a traité d’ami (Mt 26,50) mais, dans ses invitations à le suivre sur la voie des Béatitudes, il n’a pas forcé les volontés et ne les a pas prémunies contre les tentations de Satan, respectant la liberté humaine…

Rappelons-nous que Pierre voulut lui aussi s’opposer à Jésus et à ce qui l’attendait à Jérusalem, mais il reçut un très vif reproche : « Tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes ! » (Mc 8,32-33). Après sa chute, Pierre s’est repenti et a trouvé pardon et grâce. Judas s’est lui aussi repenti, mais son repentir a dégénéré en désespoir et est ainsi devenu autodestruction… Gardons bien présentes deux choses. La première : Jésus respecte notre liberté. La seconde : Jésus attend notre disponibilité au repentir et à la conversion  il est riche en miséricorde et en pardon.

Du reste, quand nous pensons au rôle négatif joué par Judas, nous devons l’insérer dans la conduite supérieure des événements de la part de Dieu. Sa trahison a conduit Jésus à la mort, mais celui-ci a transformé cet horrible supplice en un espace d’amour salvifique et en remise de soi à son Père (Ga 2,20 Ep 5,2.25). Le verbe « trahir » est la traduction d’un mot grec qui signifie « remettre, livrer ». Parfois son sujet est même Dieu en personne : c’est lui qui par amour a « livré » Jésus pour nous tous (Rm 8,32). Dans son mystérieux projet salvifique, Dieu saisit le geste inexcusable de Judas comme une occasion de don total du Fils pour la rédemption du monde.

Benoît XVI, pape de 2005 à 2013
Audience générale du 18/10/06 (trad. DC n° 2368 © Libreria Editrice Vaticana)

 

 

Le mardi saint

mardi 27 mars 2018

Quand le Seigneur a déclaré : « En vérité, je vous le dis, l’un de vous va me livrer », il a démontré qu’il pénétrait la conscience de celui qui devait le trahir. Il n’a pas déjoué le malfaiteur par des reproches sévères et publics, mais il cherchait à l’atteindre par un avertissement tendre et voilé : ainsi le repentir pourrait mieux redresser celui qu’aucun interdit n’avait destitué.

Pourquoi, malheureux Judas, ne profites-tu pas de tant de bonté ? Vois, le Seigneur est tout prêt à pardonner ta démarche, le Christ ne te dénonce à personne, sauf à toi-même. Ni ton nom, ni ta personne ne sont indiqués  mais par cette parole de vérité et de miséricorde, seul le secret de ton cœur est touché. Ni l’honneur de ton titre d’apôtre, ni la participation au sacrement ne te sont refusés. Retourne en arrière, abandonne ta folie et repens-toi. La douceur t’invite, le salut t’incite, la Vie te rappelle. Vois, tes compagnons qui sont purs et sans péché s’épouvantent à l’annonce du crime, et comme l’auteur d’une tel mal n’a pas été dévoilé, chacun craint pour soi. Ils sont plongés dans la tristesse, non parce que leur conscience les accuse, mais parce que l’inconstance humaine les inquiète : ils redoutent que ce que chacun sait de soi-même soit moins vrai que ce que la Vérité en personne voit à l’avance. Et toi, au milieu de cette angoisse des saints, tu abuses de la patience du Seigneur, tu crois que ton audace te cache…

Voyant alors que toute la pensée de Judas restait fixée sur son projet misérable, le Seigneur lui dit : « Ce que tu fais, fais le vite ». En parlant ainsi, il ne donne pas un ordre, il laisse faire  c’est la parole non d’un homme qui tremble, mais qui est prêt. Lui qui tient tous les temps en son pouvoir montre qu’il ne cherche pas à retarder le traître et qu’il entre dans la volonté de son Père pour la rédemption du monde, sans provoquer ni redouter le crime que préparent ses persécuteurs.

Saint Léon le Grand (?-v. 461), pape et docteur de l’Église
Sermon 58, 7ème sur la Passion, § 3-4 ; SC 74 bis

 

 

 

« La maison fut remplie par l’odeur du parfum. »

lundi 26 mars 2018

« L’arôme de tes parfums est exquis » lit-on dans le Cantique des Cantiques (1,3). J’en distingue plusieurs espèces… Il y a le parfum de la contrition, et celui de la piété ; il y a aussi celui de la compassion… Il y a donc un premier parfum que l’âme compose à son propre usage lorsque, prise au filet de nombreuses fautes, elle commence à réfléchir sur son passé. Elle rassemble alors dans le mortier de sa conscience, pour les agglomérer et les broyer, les multiples péchés qu’elle a commis ; et dans la marmite de son cœur brûlant, elle les fait cuire au feu de la pénitence et de la douleur… Tel est le parfum dont l’âme pécheresse doit couvrir les débuts de sa conversion et oindre ses plaies récentes ; car le premier sacrifice qu’il faut offrir à Dieu, c’est celui d’un cœur repentant. Tant que l’âme, pauvre et misérable, ne possède pas de quoi composer un onguent plus précieux, elle ne doit pas négliger de préparer celui-là, même s’il se fait avec des matières bien viles. Dieu ne méprisera pas un cœur qui s’humilie dans la contrition (Ps 50,19)…

Ce parfum invisible et spirituel ne pourra pas d’ailleurs nous sembler vulgaire, si nous comprenons qu’il est symbolisé par le parfum que, selon l’Évangile, la pécheresse a répandu sur les pieds du Seigneur. Nous lisons, en effet, que « toute la maison fut remplie de cette odeur »… Souvenons-nous du parfum qui envahit toute l’Église par la conversion d’un seul pécheur ; tout pénitent qui se repent devient pour une foule d’autres une odeur de vie qui les éveille à la vie. L’arôme de la pénitence monte jusqu’aux demeures célestes puisque, selon l’Écriture, « le repentir d’un seul pécheur est une grande joie pour les anges de Dieu » (Lc 15,10).

Saint Bernard (1091-1153), moine cistercien et docteur de l’Église
10ème sermon sur le Cantique des Cantiques, 4-6 (trad. Beguin, Seuil 1953, p. 152 rev)