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Archive pour le mot-clef ‘St Jean Cassien’

Fête de saint Matthieu, apôtre et évangéliste

jeudi 21 septembre 2023

Grandes en vérité, et merveilleuses, et inconnues profondément aux hommes, si ce n’est à ceux qui en ont fait l’expérience, sont les largesses que Dieu, en sa libéralité ineffable, accorde à ses fidèles, même durant qu’ils demeurent en ce vase de corruption. (…) Qui ne s’étonnerait devant les œuvres de Dieu et ne s’écrirait du fond de son cœur : « J’ai connu que le Seigneur est grand » (Ps 134,5 Vg), lorsqu’il se voit lui-même, ou quelque autre, passé de l’extrême cupidité à la libéralité, de la prodigalité à une vie d’abstinence, de la superbe à l’humilité (…) ? Ce sont là en vérité les divines merveilles que l’âme du prophète et celles qui lui ressemblent, découvrent avec étonnement dans une contemplation pleine de miracles.

Car quel plus grand prodige, que de voir en un bref moment les publicains cupides devenir apôtres, les persécuteurs farouches se changer en prédicateurs de l’Évangile prêts à tout subir, et propager au prix de leur sang la foi qu’ils poursuivaient ? Tels sont les divins ouvrages que le Fils atteste qu’il accomplit chaque jour, en union avec son Père : « Mon Père agit jusqu’aujourd’hui, et moi aussi j’agis. » (Jn 5,17) Telles sont les œuvres de Dieu que le bienheureux David chante en Esprit : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, qui seul fait des prodiges ! » (Ps 71,18 Vg) C’est d’elles que parle le prophète Amos : « Il a fait toutes choses, et il les change ; il change en matin l’ombre de la mort. » (Am 5,8 LXX) « Ce sont là, en effet, les changements de la droite du Très-Haut. » (Ps 76,11 Vg) C’est au sujet de cet ouvrage de salut que le prophète adresse au Seigneur cette prière : « Affermissez, ô Dieu, ce que vous avez fait en nous ! » (Ps 67,29 Vg) (…)

Oui, c’est bien là le grand miracle de Dieu, qu’un homme de chair ait rejeté tout penchant charnel, que, parmi tant de circonstances diverses, tant d’assauts qui lui sont livrés, il garde son âme dans la même disposition, et demeure immobile au milieu du flux incessant des évènements.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

Le plantureux paradis des Écritures spirituelles

jeudi 27 juillet 2023

Parmi les vérités que l’autorité des divines Écritures a destinées à notre instruction, il en est qui expriment avec une si évidente clarté, voire pour les esprits les moins doués de pénétration, que non seulement elles ne se voilent pas de l’obscurité d’un sens plus secret, mais que le secours même de l’exégèse ne leur est pas nécessaire ; les mots, la lettre seule en livrent tout le sens. D’autres, au contraire, se dérobent sous de mystérieuses obscurités, et ouvrent aux efforts et à la sollicitude de qui veut les éclaircir et les comprendre un champ immense. (…)

On comparerait assez justement l’Écriture à une terre riche et féconde. Dans cette terre, beaucoup de produits naissent et se développent qui profitent à la vie de l’homme sans cuisson préalable. Certains autres, s’ils ne perdaient au feu leur âpreté native, pour devenir doux et tendres, se montreraient impropres à notre usage ou même nuisibles. Quelques-uns sont naturellement aptes à se prendre en l’une et l’autre forme : s’ils ne passent point au feu, leur crudité n’est pas désagréable ni en cause non plus aucun mal ; la cuisson toutefois ajoute à leur bons effets. (…)

On distingue, semble-t-il, avec assez d’évidence une semblable économie dans le plantureux paradis des Écritures spirituelles. Certains passages resplendissent, dès le sens littéral, d’une si lumineuse clarté, que, à prendre simplement les mots comme ils sonnent, ils offrent aux auditeurs l’aliment le plus substantiel et le plus abondant. (…) D’autres, au contraire, s’ils ne s’affinaient par l’interprétation allégorique et ne s’adoucissaient à l’épreuve du feu spirituel, loin de fournir à l’homme intérieur un aliment salutaire et pur de tout germe mauvais, tourneraient à son détriment plutôt qu’à son profit. (…) Quelques passages se prennent littéralement et au sens allégorique d’une manière également avantageuse et nécessaire ; dans l’un et l’autre cas, l’âme y puise des sucs nourrissants.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

Aimez vos ennemis, afin d’être vraiment des fils

mardi 20 juin 2023

Quiconque est parvenu, par la charité, à l’image et ressemblance divine, se délecte dorénavant au bien lui-même à cause du plaisir qu’il y trouve. Il embrasse avec un égal amour la patience et la douceur. Les manquements des pécheurs n’irritent plus sa colère ; mais plutôt implore-t-il leur pardon, pour la plus grande pitié et compassion qu’il ressent à l’endroit de leurs infirmités.

Ne se souvient-il pas d’avoir éprouvé l’aiguillon de passions semblables, jusqu’au jour qu’il plut à la miséricorde du Seigneur de l’en préserver ? Ce ne sont pas ses propres efforts qui l’ont sauvé de l’insolence de la chair, mais la protection de Dieu. Dès lors, il comprend que ce n’est pas de la colère qu’il faut avoir pour ceux qui s’égarent, mais de la commisération ; et, dans l’absolue tranquillité de son cœur, il chante à Dieu ce verset : « C’est vous qui avez brisé mes chaînes, je vous offrirai un sacrifice de louange » (Ps 115,16-17) ; et encore : « Si le Seigneur n’eût été mon soutien, peu s’en fallait que mon âme n’habitât l’enfer. » (Ps 93,17 LXX)

Puis, cette humilité d’esprit le rend capable d’accomplir le précepte évangélique de la perfection : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour ceux qui vous persécutent et vous calomnient. » (Mt 5,44) C’est par là que nous mériterons d’atteindre à la récompense dont il est parlé aussitôt après, non seulement de porter l’image et ressemblance divine, mais encore de recevoir le titre de fils : « Afin, est-il dit, que vous soyez les fils de votre Père qui est dans les cieux, qui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, et fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. » (Mt 5,45)

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

Une prière pour tous les états

jeudi 1 juin 2023

Afin de vous tenir toujours dans la pensée de Dieu, vous devrez continuellement vous proposer cette formule de pitié : « Mon Dieu, venez à mon aide ; hâtez-vous, Seigneur, de me secourir ! » Ce n’est pas sans raison que ce court verset a été choisi particulièrement de tout le corps des Écritures. Il exprime tous les sentiments dont la nature humaine est susceptible ; il s’adapte heureusement à tous les états, et convient en toutes les sortes de tentations.

On y trouve l’appel à Dieu contre tous les dangers, une humble et pieuse confession, la vigilance d’une âme toujours en éveil et pénétré d’une crainte continuelle, la considération de notre fragilité ; il dit aussi la confiance d’être exaucé et l’assurance du secours toujours et partout présent, car celui qui ne cesse d’invoquer son protecteur est bien certain de l’avoir près de soi. C’est la voix de l’amour et de la charité ardente ; c’est le cri de l’âme qui a l’œil ouvert sur les pièges à elle tendus, qui tremble en face de ses ennemis, et, se voyant assiégée par eux nuit et jour, confesse qu’elle ne saurait échapper, si son défenseur ne la secourt. Pour tous ceux que harcèlent les attaques des démons, ce verset est un rempart inexpugnable, une impénétrable cuirasse et le plus solide des boucliers. (…)

Bref, à tous et en toutes circonstances il est utile, il est nécessaire. Car désirer d’être aidé toujours et pour toutes choses, c’est dire clairement que l’on a autant besoin du secours divin, lorsque tout nous favorise et nous sourit, que dans les épreuves et les tristesses : Dieu seul nous tire de l’adversité, lui seul aussi donne la durée à nos joies ; dans l’un et dans l’autre cas, la fragilité humaine ne saurait se soutenir sans son secours.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

L’union de volonté du Père et du Fils

mercredi 26 avril 2023

Telle est la pensée que Notre Seigneur exprimait dans son humanité, afin de nous donner comme pour le reste un modèle à imiter, lorsqu’il disait : « Père, s’il est possible, que ce calice passe loin de moi ! Cependant, qu’il en soit, non comme je le veux, mais comme vous voulez ! » (Mt 26,39) Et pourtant, sa volonté n’était pas différente de celle de son Père. « Car il était venu sauver ce qui avait péri, et donner sa vie pour le rachat d’un grand nombre. » (Mt 18,11 ; 20,28) De sa vie, il dit de lui-même : « Personne ne me la ravit ; c’est de moi-même que je la donne ; j’ai le pouvoir de la donner, j’ai le pouvoir de la reprendre. » (Jn 10,18)

Sur l’union continuelle de volonté qui régnait entre son Père et lui, le saint roi David lui fait dire au psaume 39 (v. 9) : « Je viens pour faire votre volonté. Je le veux, ô mon Dieu. » Nous lisons, il est vrai, au sujet du Père : « Dieu a tant aimé le monde, qu’il lui a donné son Fils Unique. » (Jn 3,16) Mais nous trouvons au sujet du Fils cette parole : « Il s’est donné pour nos péchés. » (Gal 1,4) Il est dit du Père : « Il n’a pas épargné son propre Fils ; il l’a livré pour nous. » (Rm 8,32) Mais il est dit du Fils : « Il s’est offert, parce qu’il l’a voulu. » (Is 53,7 Vg)

L’union de volonté entre le Père et le Fils est ainsi partout exprimée, jusque dans le mystère de la Résurrection, où nous voyons qu’ils n’eurent l’un et l’autre qu’une seule et même opération. C’est le Père qui, selon le bienheureux Apôtre, a ressuscité le corps de son Fils : « … Par Dieu le Père, dit-il, qui l’a ressuscité des morts. » (Gal 1,1) Mais le Fils proteste aussi qu’il relèvera le temple de son corps : « Détruisez ce temple, et je le relèverai en trois jours. » (Jn 2,19)

Instruits à l’exemple du Seigneur, nous devons conclure toutes nos prières par un vœu pareil au sien, et ajouter à toutes nos demandes cette parole : « Cependant, qu’il en soit, non comme je veux, mais comme vous voulez ! » (Mt 26,39)

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

« Veux-tu être guéri ? » (Jn 5,6)

mardi 21 mars 2023

L’homme a besoin sans cesse du secours divin : on le montrerait sans peine. L’humaine fragilité ne peut rien accomplir de ce qui regarde le salut, par soi seule et sans l’aide de Dieu. (…) Maintes fois, il arrive que nous souhaitons d’exécuter quelque utile dessein ; rien ne manque à l’ardeur de nos désirs, et la parfaite bonne volonté non plus ne nous fait pas défaut. N’est-il pas vrai pourtant qu’une faiblesse quelconque venant à la traverse, rend inutiles les vœux que nous avons formés et empêche le bon effet de nos résolutions, si le Seigneur, en sa miséricorde, ne nous donne la force de les accomplir ? La multitude est innombrable de ceux qui désirent loyalement se consacrer à la poursuite de la vertu ; mais, si vous comptez ceux qui réussissent à réaliser leur rêve et à persévérer dans leurs efforts, que vous en trouverez peu ! (…)

La protection divine nous suit donc inséparablement. Si grande est la tendresse du Créateur pour sa créature, que sa providence ne serait point satisfaite de nous accompagner ; elle nous précède toujours. Le prophète, qui en avait fait l’expérience, le témoigne ouvertement : « La miséricorde de mon Dieu me préviendra. » (Ps 58,11 Vg) Aperçoit-il en nous quelque commencement de bonne volonté, aussitôt il épanche sur nous sa lumière et sa force, il nous excite au salut, donnant la croissance au germe qu’il a semé lui-même ou qu’il voit sortir de terre par nos efforts. « Avant qu’ils crient vers moi, dit-il, je les entendrai ; ils parleront encore, que je les exaucerai. » (Is 65,24) Il est dit encore : « Au son de tes cris, aussitôt qu’il t’aura entendu, il te répondra. » (Is 30,19) Et non seulement il nous inspire de saints désirs ; mais il nous prépare les occasions de revenir à la vie, les circonstances favorables pour faire de bons fruits ; il montre aux égarés le droit au chemin du salut.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

Efforçons-nous de progresser jusqu’à la charité de Dieu

samedi 4 mars 2023

C’est le précepte même du Sauveur qui nous invite à cette ressemblance avec le Père : « Soyez parfaits, dit-il, comme votre Père céleste est parfait. » (Mt 5,48) Dans les degrés inférieurs, l’amour du bien s’interrompt quelquefois, lorsque la tiédeur, le contentement ou le plaisir viennent détendre la vigueur de l’âme, et font perdre de vue, sur le moment, la crainte de l’enfer ou le désir du bonheur futur. Ils constituent néanmoins comme des échelons dans le progrès, un apprentissage.

Après avoir évité le vice, au commencement, par crainte du châtiment ou l’espoir de la récompense, il nous devient impossible de passer au degré de la charité : « Il n’y a pas de crainte dans l’amour, mais l’amour bannit la crainte : car la crainte suppose un châtiment, et celui qui craint n’est pas parfait dans l’amour. Nous donc aimons Dieu, parce qu’il nous a aimés le premier. » (1Jn 4, 18-19) Nul autre chemin, pour nous élever à la perfection véritable : comme Dieu nous a aimés le premier sans égard à rien d’autre que notre salut, ainsi devons-nous l’aimer uniquement pour son amour.

Efforçons-nous donc avec une ardeur entière de monter de la crainte à l’espérance, de l’espérance à la charité de Dieu et à l’amour des vertus. Émigrons vers l’affection du bien pour lui-même, et demeurons-y attachés immuablement, autant qu’il est possible à la nature humaine.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

« Dans la colère, souviens-toi de la miséricorde. » (Ha 3, 2 LXX)

vendredi 3 mars 2023

Quelles que soient les injures dont on le charge, le moine gardera la paix, je ne dis pas seulement sur ses lèvres, mais dans le fond de son cœur. S’il se sent troublé le moins du monde, qu’il se contienne dans un absolu silence, et suive exactement ce que dit le Psalmiste : « Je me suis troublé, et je n’ai point parlé » (Ps 76,5 LXX) ; « J’ai dit : Je garderai mes voies, de crainte de pécher par ma langue. J’ai mis une garde à ma bouche, tandis que le pécheur se tenait en face de moi. Je suis resté muet, et je me suis humilié, et j’ai gardé le silence même pour les choses bonnes. » (Ps 38, 2-3 LXX)

Il ne faut pas qu’il s’arrête à considérer le présent ; il ne faut pas que ses lèvres profèrent ce que lui suggère, sur l’heure, une colère emportée, ce que lui dicte son cœur exaspéré. Mais plutôt qu’il repasse en son esprit la grâce de la charité passée ; ou qu’il tourne ses regards vers l’avenir, pour y voir en esprit la paix déjà refaite comme elle était devant ; qu’il s’attache à la contempler, dans le temps même où il se sent ému, avec la pensée qu’elle va revenir sur-le-champ.

Tandis qu’il se réserve pour la douceur de la concorde prochaine, il ne sentira pas l’amertume de la querelle présente, et fera de préférence telle réponse dont il n’ait pas à s’accuser lui-même ni à être repris par son frère, lorsque l’amitié sera rétablie. De cette façon, il accomplira la parole du prophète : « Dans la colère, souviens-toi de la miséricorde. » (Ha 3, 2 LXX)

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

Votre Père sait de quoi vous avez besoin

mardi 28 février 2023

« Notre Père ». Nous confessons de notre propre bouche que le Dieu et Seigneur de l’univers est notre Père ; et c’est bien là faire profession d’avoir été appelés de la condition servile à celle de fils adoptifs.

Nous ajoutons : « Qui êtes aux cieux ». Le temps de notre vie n’est plus dès lors qu’un exil ; et cette terre, une terre étrangère, qui nous sépare de notre Père. Fuyons-la ; et, de toute l’ardeur de nos désirs, hâtons-nous vers la région où nous proclamons que réside notre Père ! Une fois parvenus à cette dignité d’enfants de Dieu, nous brûlerons aussitôt de la tendresse qui est au cœur de tous les bons fils ; et, sans plus songer à nos intérêts, nous n’aurons de passion que pour la gloire de notre Père.

Nous lui dirons : « Que votre nom soit sanctifié » témoignant par là que sa gloire est tout notre désir et toute notre joie, à l’imitation de celui qui a dit : « Celui qui parle de lui-même cherche sa propre gloire ; mais celui qui cherche la gloire de Celui qui l’a envoyé est véridique, et il n’y a point en lui d’injustice » (Jn 7,18). (…)

Ces paroles : « Que votre nom soit sanctifié », pourraient très bien s’entendre aussi en ce sens que Dieu est sanctifié par notre perfection. Et dès lors, lui dire : « Que votre nom soit sanctifié », ce serait, en d’autres termes, lui dire : « Père, rendez-nous tels que nous méritions de connaître, de comprendre la grandeur de votre sainteté, ou du moins que cette sainteté éclate en notre vie toute spirituelle ! » C’est ce qui s’accomplit en nous, lorsque « les hommes voient nos bonnes œuvres et glorifient notre Père qui est aux cieux » (Mt 5,16).

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

La perfection d’un cœur pur

mercredi 8 février 2023

En vérité, c’est tout autre chose d’avoir en haine la souillure des vices et de la chair, parce que l’on goûte le bien déjà présent, ou de réfréner les convoitises illicites en vue de la récompense future ; de craindre un dommage présent, ou de redouter des tourments à venir. C’est enfin une perfection beaucoup plus grande de ne vouloir pas s’éloigner du bien pour l’amour du bien lui-même, que de ne pas donner son consentement au mal par peur de souffrir un autre mal.

Dans le premier cas, le bien est volontaire ; dans le second, il paraît forcé, et arraché de haute lutte à un refus par la crainte du supplice ou l’appétit de la récompense. Aussi bien, celui qui ne renonce aux séductions du vice que par le motif de la crainte, retournera, dès que la crainte sera évanouie qui lui faisait obstacle, vers l’objet de ses amours. Pour lui, pas de stabilité dans le bien. Point de repos non plus du côté de la tentation, parce qu’il n’a point la paix solide et constante que donne la chasteté. Où règne le tumulte de la guerre, il est impossible d’échapper au risque d’être blessé. (…)

Celui, au contraire, qui a surmonté les assauts du vice et jouit désormais de la sécurité de la paix, entièrement transformé en l’amour de la vertu pour elle-même, demeurera constant dans le bien auquel il appartient sans partage, parce qu’il n’existe pas, à ses yeux, de plus sensible dommage qu’une atteinte portée à la chasteté intime de son âme. La pureté qu’il a présente, fait son plus cher et plus précieux trésor, comme le plus grave des châtiments serait de voir les vertus pernicieusement violées, ou d’éprouver la souillure empoisonnée du vice.

Saint Jean Cassien (v. 360-435)