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Archive pour mars 2018

Sauvés par l’eau

mardi 13 mars 2018

Tout homme qui entend le récit de la traversée de la Mer Rouge comprend quel est ce mystère de l’eau, dans laquelle on descend avec toute l’armée des ennemis et de laquelle on émerge seul, laissant l’armée des ennemis engloutie dans l’abîme. Qui ne voit que cette armée des Égyptiens…, ce sont les diverses passions de l’âme auxquelles l’homme est asservi : sentiments de colère, impulsions diverses de plaisir, de tristesse ou d’avarice ?… Toutes ces choses et toutes celles qui sont à leur origine, avec le chef qui mène l’attaque haineuse, se précipitent dans l’eau à la suite de l’Israélite.

Mais l’eau, par la force du bâton de la foi et la puissance de la nuée lumineuse (Ex 14,16.19), devient source de vie pour ceux qui y cherchent un refuge — et source de mort pour ceux qui les poursuivent… Cela signifie, si l’on en dégage le sens caché, que tous ceux qui passent par l’eau sacramentelle du baptême doivent faire mourir dans l’eau toutes les inclinations mauvaises qui leur font la guerre — l’avarice, les désirs impurs, l’esprit de rapine, les sentiments de vanité et d’orgueil, les élans de colère, la rancune, l’envie, la jalousie…

Il en est comme du mystère de la Pâque juive : on appelait « pâque » l’agneau dont le sang préservait de la mort ceux qui en faisaient usage (Ex 12,21.23). Dans ce mystère, la Loi ordonne de manger avec la pâque du pain azyme, sans vieux levain, c’est à dire sans qu’aucun reste de péché soit mêlé à la vie nouvelle (1Co 5,7-8)… De même on doit engloutir toute l’armée égyptienne, c’est à dire toute forme de péché, dans le bain du salut comme dans l’abîme de la mer et en émerger seul, sans rien qui nous soit étranger.

Saint Grégoire de Nysse (v. 335-395), moine et évêque
La Vie de Moïse, II, 121s ; SC 1 (trad. SC p. 181 rev.)

 

« La parole de Dieu est vivante. » (He 4,12)

lundi 12 mars 2018

« La parole de Dieu est vivante » (He 4,12). Toute la grandeur, la force et la sagesse de la parole de Dieu, voilà ce que par ces mots l’apôtre montre à ceux qui cherchent le Christ, parole, force et sagesse de Dieu. Cette parole était au commencement auprès du Père, éternelle avec lui (Jn 1,1). Elle a été révélée en son temps aux apôtres, annoncée par eux et reçue humblement par le peuple des croyants…

Elle est vivante cette parole à qui le Père a donné d’avoir la vie en elle-même, comme lui la possède en lui-même (Jn 5,26). Elle est donc non seulement vivante, mais elle est la vie, comme il est écrit : « Moi, je suis le chemin, la vérité, et la vie » (Jn 14,6). Et puisqu’elle est la vie, elle est vivante et vivifiante, car tout « comme le Père relève les morts et leur donne la vie, le Fils, lui aussi, donne la vie à qui il veut » (Jn 5,21). Elle est vivifiante lorsqu’elle appelle Lazare hors du tombeau et lui dit : « Lazare, viens dehors ! » (Jn 11,43) Lorsque cette parole est proclamée, la voix qui la prononce résonne à l’extérieur avec une force qui, perçue à l’intérieur, fait revivre les morts, et en éveillant la foi, suscite de vrais fils à Abraham (Mt 3,9). Oui, elle est vivante cette parole, vivante dans le cœur du Père, dans la bouche de celui qui la proclame, dans le cœur de celui qui croit et qui aime.

Baudouin de Ford (?-v. 1190), abbé cistercien, puis évêque
Homélie sur la lettre aux Hébreux 4,12 ; PL 204, 451-453

 

 

 

« Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. »

dimanche 11 mars 2018

Dieu ne pouvait-il pas fournir au monde un autre remède que celui de la mort de son Fils ?… Assurément, et il pouvait nous racheter par mille autres moyens que celui de la mort de son Fils ; mais il ne l’a pas voulu, car ce qui était suffisant à notre salut ne l’était pas à assouvir son amour. Et pour nous montrer combien il nous aimait, ce divin Fils est mort de la mort la plus rude et ignominieuse qui est celle de la croix.

Que reste-il donc, et quelle conséquence pourrons-nous tirer de cela, sinon que, puisqu’il est mort d’amour pour nous, nous mourions aussi d’amour pour lui, ou, si nous ne pouvons mourir d’amour, que du moins nous ne vivions autrement que pour lui ?… C’est de quoi se plaignait le grand saint Augustin : « Seigneur, disait-il, est-il possible que l’homme sache que vous êtes mort pour lui et qu’il ne vive pas pour vous ? » Et ce grand amoureux, saint François : « Ah, disait-il en sanglotant, vous êtes mort d’amour et personne ne vous aime ! »…

Il n’y a pas d’autre rédemption qu’en cette croix. Ô Dieu, quelle grande utilité et quel profit pour nous que de contempler la croix et la Passion ! Est-il possible de contempler cette humilité de notre Sauveur sans devenir humble et sans aimer les humiliations ? Peut-on voir son obéissance sans être obéissant ? Oh non, certes, nul n’a jamais regardé notre Seigneur crucifié et est resté mort ou malade. Et au contraire, tous ceux qui meurent, c’est parce qu’ils refusent de le regarder, comme ceux d’entre les enfants d’Israël qui n’avaient pas voulu regarder le serpent que Moïse avait fait dresser sur la colonne.

Saint François de Sales (1567-1622), évêque de Genève et docteur de l’Église
OC Annecy, t. 10, p. 363 (in Desjardins, Le Livre des quatre amours, p. 44 ; français modernisé)

 

 

 

Les larmes et le désir

samedi 10 mars 2018

Ô âme qui pleurez vos péchés, craignez les jugements divins, qui sont un abîme profond. Craignez, dis-je, craignez vivement, bien que vous soyez déjà quelque peu pénitente, de déplaire encore à Dieu. Craignez plus encore, même maintenant, d’offenser Dieu à nouveau. Craignez par dessus tout d’être finalement séparée de Dieu, privée pour toujours de lumière, toujours brûlée par le feu et rongée par le ver qui ne périra point. Craignez tout cela, si une pénitence vraie ne vous obtient de mourir dans la grâce finale, et chantez avec le Prophète : « Transpercez ma chair par votre crainte. Je redoute vos jugements. » (Cf. Ps 118, 120)

Néanmoins, désirez les dons célestes. Élevez-vous par la flamme du divin amour jusqu’en Dieu, qui vous a si patiemment supportée dans le péché, vous a attendue avec tant de longanimité, et ramenée à la pénitence avec tant de miséricorde, par le pardon, l’infusion de la grâce et la promesse de la couronne éternelle. Il vous demande seulement de Lui offrir, ou plutôt de recevoir de Lui-même pour le Lui offrir, « le sacrifice d’un esprit accablé, d’un cœur contrit et humilié » (Ps 50, 19) par une amère componction, par une confession sincère et une juste satisfaction.

Désirez avec ardeur que Dieu vous prouve son amour par une large communication du Saint-Esprit. Désirez avec plus d’ardeur de Lui être conforme par une fidèle imitation de Jésus crucifié. Mais, par-dessus tout, désirez de posséder Dieu dans la claire vision du Père Éternel afin que, en toute vérité, vous puissiez chanter avec le prophète : « Mon âme a soif du Dieu fort et vivant ; quand viendrai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu ? » (Ps 41, 3)

Saint Bonaventure (1221-1274), franciscain, docteur de l’Église
Du gouvernement de l’âme (Œuvres spirituelles de Saint Bonaventure, tome II, De la vie parfaite, Société S. François d’Assise, Paris, 1931) (rev.)

 

 

 

L’amour vrai

vendredi 9 mars 2018

Il y a certains amours qui semblent extrêmement grands et parfaits aux yeux des créatures, qui devant Dieu se trouveront petits et de nulle valeur. La raison est que ces amitiés ne sont point fondées en la vraie charité, qui est envers Dieu, mais seulement en certaines ententes et inclinations naturelles.

Au contraire, il y en a d’autres qui semblent extrêmement minces et vides aux yeux du monde, qui devant Dieu se trouveront pleines et fort excellentes parce qu’elles se font seulement pour Dieu et en Dieu, sans mélange de notre propre intérêt. Les actes de charité que nous faisons envers ceux que nous aimons de cette sorte sont mille fois plus parfaits, d’autant que tout est purement pour Dieu, mais les services et autres aides que nous faisons à ceux que nous aimons par inclination sont beaucoup moindres en mérite, à cause de la grande complaisance et satisfaction que nous avons à les faire, et que, pour l’ordinaire, nous les faisons plus par ce mouvement que pour l’amour de Dieu.

Il y a encore une autre raison qui rend ces premières amitiés dont nous avons parlé moindres que les dernières : c’est qu’elles ne durent pas, parce que la cause en étant si frêle, dès qu’il arrive quelque traverse, elles viennent à se refroidir et altérer ; ce qui n’arrive pas à celles qui sont seulement en Dieu, parce que la cause en est solide et permanente.

Les signes d’amitié que nous faisons contre notre propre inclination aux personnes envers lesquelles nous avons de l’antipathie, sont meilleurs et plus agréables à Dieu que ceux que nous faisons attirés par l’affection sensible. Et cela ne se doit pas appeler duplicité ou dissimulation, car si j’ai un sentiment contraire, il n’est qu’en la partie inférieure, et les actes que je fais, je les fais avec la force de la raison, qui est la partie principale de mon âme.

Ainsi ceux qui n’ont rien d’aimable sont heureux, car l’amour qu’on leur porte est excellent, puisqu’il est en Dieu.

Saint François de Sales (1567-1622), évêque de Genève et docteur de l’Église
De l’Amour envers les créatures – Entretiens spirituels (Entretiens publiés par la Visitation d’Annecy ; édition 1933 ; p.147-149 ; français modernisé ; rev.)

 

 

 

« Celui qui ne rassemble pas avec moi, disperse. »

jeudi 8 mars 2018

Dans la guerre contre les Moabites et les Ammonites, Josué [qui porte le même nom que Jésus] « tua tous leurs rois par le glaive » (Jos 11,12). Nous étions tous « sous le règne du péché » (Rm 6,12) ; tous, nous étions sous le règne des passions mauvaises… En chacun pourtant, se tenait un roi particulier qui régnait en lui et dominait en lui. Par exemple, dans l’un c’était l’avarice qui occupait le royaume, dans un autre c’était l’orgueil, dans un autre encore le mensonge ; l’un était dominé par les désirs charnels, l’autre subissait le règne de la colère… Il y avait donc en chacun de nous un royaume de péché avant que nous ayons la foi.

Mais lorsque Jésus est venu, il a tué tous les rois qui détenaient en nous des royaumes de péché, il nous a appris à les tuer tous et à n’en laisser échapper aucun. Si l’on en conserve un seul en vie, on ne pourra pas appartenir à l’armée de Jésus… Car le Seigneur Jésus nous a purifiés de toutes les sortes de péchés ; il les a tous détruits. En effet, tous « nous étions insensés, rebelles, égarés, esclaves d’une foule de convoitises, vivant dans la malice et l’envie, odieux et nous haïssant les uns les autres » (Tt 3,3), avec tous les genres de péchés qui se trouvent chez les hommes avant qu’ils croient. On a raison de dire que Jésus a tué tous ceux qui sortirent pour faire la guerre ; car il n’est pas de péché si grand que Jésus ne puisse avoir le dessus, lui qui est le Verbe et la « Sagesse de Dieu » (1Co 1,24). Il triomphe de tout, il est vainqueur de tout.

Ne croyons-nous pas que les péchés de toutes sortes nous sont ôtés quand nous venons au baptême ? C’est ce que dit l’apôtre Paul qui, après avoir énuméré tous les genres de péchés, ajoute finalement : « Voilà ce que vous étiez, mais vous avez été lavés, vous avez été sanctifiés, vous avez été justifiés, au nom de notre Seigneur Jésus Christ » (1Co 6,11).

Origène (v. 185-253), prêtre et théologien
Homélies sur Josué, n° 15 (trad. SC 71, p. 345s rev.)

 

 

 

Le Christ est l’accomplissement des Écritures.

mercredi 7 mars 2018

 

« Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. » La force et la puissance de ces paroles du Fils de Dieu enferment un profond mystère.

La Loi, en effet, prescrivait des œuvres, mais toutes ces œuvres, elle les orientait vers la foi aux réalités qui seraient manifestées dans le Christ : car l’enseignement et la Passion du Sauveur sont le dessein grand et mystérieux de la volonté du Père. La Loi, sous le voile des paroles inspirées, a annoncé la naissance de notre Seigneur Jésus Christ, son incarnation, sa Passion, sa résurrection ; les prophètes aussi bien que les apôtres nous enseignent à maintes reprises que de toute éternité, tout le mystère du Christ a été disposé pour être révélé en notre temps…

Le Christ n’a pas voulu que nous pensions que ses propres œuvres contenaient autre chose que les prescriptions de la Loi. C’est pourquoi il a affirmé lui-même : « Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir ». Le ciel et la terre…doivent disparaître, mais pas le moindre commandement de la Loi, car dans le Christ toute la Loi et tous les prophètes trouvent leur achèvement. Au moment de sa Passion…il a déclaré : « Tout est accompli » (Jn 19 30). À ce moment-là, toutes les paroles des prophètes ont reçu leur confirmation.

C’est pourquoi le Christ affirme que même le plus petit des commandements de Dieu ne peut être aboli sans offense pour Dieu… Rien ne peut être plus humble que la chose la plus petite. Et la plus humble de toutes a été la Passion du Seigneur et sa mort sur la croix.

Saint Hilaire (v. 315-367), évêque de Poitiers et docteur de l’Église
Commentaire sur l’évangile de Matthieu, 4, 14-15 ; PL 9, 936-937 (trad. cf SC 254, p. 135)

 

 

 

 

Pardonner à notre frère de tout notre cœur

mardi 6 mars 2018

La première parole que notre Seigneur prononça sur la croix fut une prière pour ceux qui le crucifiaient ; et c’est alors qu’il fit ce qu’écrit Saint Paul : « Aux jours où il vivait dans la chair, il offrit prières et sacrifices » (He 5,7). Certes, ceux qui crucifiaient notre divin Sauveur ne le connaissaient pas…, car s’ils l’avaient connu ils ne l’auraient pas crucifié (1Co 2,8). Notre Seigneur donc, voyant l’ignorance et la faiblesse de ceux qui le tourmentaient, commença à les excuser et à offrir pour eux ce sacrifice à son Père céleste, car la prière est un sacrifice… : « Mon Père, pardonne-leur parce qu’ils ne savent ce qu’ils font » (Lc 23,34). Combien grande était la flamme d’amour qui brûlait dans le cœur de notre doux Sauveur, puisqu’au plus fort de ses douleurs, au temps où la véhémence de ses tourments semblait lui ôter même le pouvoir de prier pour lui-même, il vint par la force de sa charité à s’oublier soi-même, mais non ceux qu’il avait créés…

Il voulait par là nous faire comprendre l’amour qu’il nous portait, lequel ne pouvait être diminué par aucune sorte de souffrance, et nous apprendre aussi quel doit être notre cœur à l’endroit de notre prochain…

Or, ce divin Seigneur s’étant employé à demander pardon pour les hommes, il est tout certain que sa demande lui fut accordée, car son divin Père l’honorait trop pour lui refuser quelque chose de ce qu’il lui demandait.

Saint François de Sales (1567-1622), évêque de Genève et docteur de l’Église
Sermon pour le Vendredi saint, 25/03/1622 (français modernisé)

 

 

 

Le Carême conduit à la résurrection du baptême

lundi 5 mars 2018

Naaman était Syrien, il avait la lèpre et ne pouvait être purifié par personne. Alors une jeune captive dit qu’il y avait un prophète en Israël qui pourrait le purifier du fléau de la lèpre… Apprends maintenant qui est cette jeune fille d’entre les captifs : la jeune assemblée d’entre les nations, c’est-à-dire l’Église du Seigneur, humiliée auparavant par la captivité du péché, alors qu’elle ne possédait pas encore la liberté de la grâce. C’est à son conseil que ce vain peuple des nations a écouté la parole des prophètes dont il avait douté longtemps. Ensuite, dès qu’il a cru qu’il fallait obéir, il a été lavé de toute l’infection de ses méfaits. Naaman avait douté avant d’être guéri ; toi, tu es déjà guéri, c’est pourquoi tu ne dois pas douter.

C’est pour cela qu’on t’a déjà dit de ne pas croire seulement ce que tu voyais en t’approchant du baptistère, de peur que tu ne dises : « C’est là ‘le grand mystère que l’œil n’a pas vu ni l’oreille entendu et qui n’est pas monté au cœur de l’homme’ ? (1Co 2,9) Je vois de l’eau, que je voyais tous les jours ; peuvent-elles me purifier, ces eaux dans lesquelles je suis souvent descendu sans être jamais purifié ? » Apprends par là que l’eau ne purifie pas sans l’Esprit. C’est pour cela que tu as lu que « trois témoins au baptême ne font qu’un : l’eau, le sang et l’Esprit » (1Jn 5,7-8). Car si tu en retires un, il n’y a plus de sacrement du baptême. En effet, qu’est-ce que l’eau sans la croix du Christ ? Un élément ordinaire sans aucun effet sacramentel. Et de même, sans eau il n’y a pas de mystère de la régénération. « À moins d’être né de nouveau de l’eau et de l’Esprit, on ne peut pas entrer dans le royaume de Dieu » (Jn 3,5). Le catéchumène croit en la croix du Seigneur Jésus dont il est marqué ; mais s’il n’a pas été baptisé au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, il ne peut pas recevoir la rémission de ses péchés ni puiser le don de la grâce spirituelle.

Donc ce Syrien s’est plongé sept fois dans la Loi ; toi, tu as été baptisé au nom de la Trinité. Tu as confessé le Père…, tu as confessé le Fils, tu as confessé l’Esprit Saint… Tu es mort au monde et ressuscité pour Dieu et, en quelque sorte, enseveli en même temps dans cet élément du monde ; mort au péché, tu es ressuscité pour la vie éternelle (Rm 6,4).

Saint Ambroise (v. 340-397), évêque de Milan et docteur de l’Église
Les Mystères, § 16-21 (trad. SC 25, p. 112)

 

 

 

« Le temple dont il parlait, c’était son corps. »

dimanche 4 mars 2018

Si nous considérons ce que le monde entier a reçu par la croix du Seigneur, nous reconnaîtrons que pour célébrer Pâques il est juste de nous préparer par un jeûne de quarante jours…

Ce ne sont pas seulement les évêques ou les prêtres ou les seuls ministres des sacrements, mais c’est le corps entier de l’Église, c’est tout l’ensemble des fidèles qui doit se purifier de tout ce qui l’entache, pour que le temple de Dieu, dont le fondement est son fondateur lui-même (1Co 3,11.16), soit beau dans toutes ses pierres et lumineux dans toutes ses parties… Sans doute on ne peut pas entreprendre ni achever la purification de ce temple sans son bâtisseur ; et pourtant celui qui l’a édifié lui a encore accordé de pouvoir rechercher son accroissement par son propre travail. Car c’est un matériau vivant et intelligent qui a servi à la construction de ce temple, et c’est l’Esprit de grâce qui l’incite à s’assembler volontairement en un seul édifice…

Donc, puisque tous les fidèles ensemble et chacun en particulier forment un seul et même temple de Dieu, celui-ci doit être parfait en chacun comme il doit l’être dans l’ensemble. Car même si la beauté ne peut pas être identique pour tous les membres, ni les mérites pareils dans une si grande diversité de parties, le lien de la charité obtient cependant la communion dans la beauté. Même s’ils n’ont pas reçu les mêmes dons de la grâce, ceux qui sont unis par un saint amour se réjouissent ensemble de leurs biens ; et ce qu’ils aiment chez les autres ne peut pas leur être étranger puisqu’ils accroissent eux-mêmes leurs richesses en trouvant leur joie dans le progrès des autres.

Saint Léon le Grand (?-v. 461), pape et docteur de l’Église
Sermon 48, 1 ; PL 54, 298 (trad. Orval)