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Archive pour le mot-clef ‘St Ambroise’

lundi 13 mars 2023

Au temps où la famine désolait la terre entière, pourquoi Élie a-t-il été envoyé chez une veuve ? Une grâce singulière s’attache à deux femmes : auprès d’une vierge, un ange ; auprès d’une veuve, un prophète. Là Gabriel, ici Élie. Ce sont les plus éminents d’entre les anges et les prophètes qui sont choisis ! Mais le veuvage ne mérite pas louange en lui-même, s’il ne s’y ajoute pas des vertus. L’histoire ne manque pas de veuves ; pourtant, une se distingue entre toutes, qui les encourage par son grand exemple (…). Dieu est particulièrement sensible à l’hospitalité : dans l’Évangile il promet, pour un verre d’eau fraîche, des récompenses d’éternelles (Mt 10,42), ici pour un peu de farine ou une mesure d’huile, la profusion infinie de ses richesses. (…)

Pourquoi nous croire maîtres des fruits de la terre quand la terre est offrande perpétuelle ? (…) Nous détournons à notre profit le sens du commandement universel : « Tous les arbres qui ont des fruits portant semence vous serviront de nourriture ainsi qu’à toutes les bêtes, à tous les oiseaux et à tout ce qui rampe sur la terre » (Gn 1,29-30) ; en amassant, nous ne trouvons que le vide et le besoin. Comment espérerions-nous en la promesse, si nous n’observons pas la volonté de Dieu ? C’est agir sainement que d’obéir au précepte d’hospitalité et faire honneur à nos hôtes : ne sommes-nous pas nous-mêmes des hôtes ici-bas ?

Qu’elle est parfaite, cette veuve ! Accablée par une grande famine, elle continuait pourtant à vénérer Dieu. Elle ne gardait pas ses provisions pour elle seule : elle partageait avec son fils. Bel exemple de tendresse, mais plus bel exemple encore de foi ! Elle ne devait préférer personne à son fils : voilà qu’elle met le prophète de Dieu au-dessus de sa propre vie. Croyez bien qu’elle n’a pas seulement donné un peu de nourriture, mais toute sa subsistance ; elle n’a rien gardé pour elle ; comme son hospitalité l’a amenée à un don total, sa foi l’a conduite à une confiance totale.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

« Si je les renvoie chez eux à jeun, ils vont défaillir en route. »

samedi 11 février 2023

Seigneur Jésus, je sais bien que tu ne veux pas laisser à jeun ces gens ici avec moi, mais les nourrir des aliments que tu distribues ; ainsi, fortifiés par ta nourriture, ils n’auront pas à redouter de défaillir de faim. Je sais bien que nous aussi tu ne veux pas nous renvoyer à jeun… Tu l’as dit : tu ne veux pas qu’ils défaillent en chemin, c’est-à-dire qu’ils défaillent dans le parcours de cette vie, avant de parvenir au terme de la route, avant de parvenir au Père et de comprendre que tu viens du Père…

Le Seigneur a donc pitié, pour que nul ne défaille en chemin… Comme il fait pleuvoir sur les justes autant que sur les injustes (Mt 5,45), il nourrit aussi bien les justes que les injustes. N’est-ce pas grâce à la force de la nourriture que le saint prophète Élie, défaillant en chemin, a pu marcher quarante jours ? (1R 19,8) Cette nourriture, c’est un ange qui la lui a donnée ; mais vous, c’est le Christ lui-même qui vous nourrit. Si vous conservez la nourriture ainsi reçue, vous marcherez non pas quarante jours et quarante nuits (…), mais pendant quarante ans, depuis votre sortie des confins de l’Égypte jusqu’à votre arrivée dans la terre d’abondance, dans la terre où coulent le lait et le miel (Ex 3,8). (…)

Le Christ partage donc les vivres, et il veut, sans aucun doute, donner à tous. Il ne refuse à personne, car il fournit tous. Cependant, quand il rompt les pains et qu’il les donne aux disciples, si vous ne tendez pas les mains pour recevoir votre nourriture, vous défaillirez en chemin. (…) Ce pain que rompt Jésus, c’est le mystère de la parole de Dieu : lorsqu’elle est distribuée, elle augmente. À partir de quelques paroles seulement, Jésus a fourni à tous les peuples un aliment surabondant. Il nous a donné ses discours comme des pains, et tandis que nous les goûtons, ils se multiplient encore dans notre bouche. (…) Alors que les foules mangent, les morceaux augmentent encore, en se multipliant, si bien que les restes, à la fin, sont encore plus abondants que les quelques pains partagés.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

Voyant leur foi, il lui pardonne

vendredi 13 janvier 2023

« Voyant leur foi, Jésus dit au paralytique : ‘Tes péchés sont pardonnés’. » Le Seigneur est grand : à cause des uns, il pardonne aux autres ; il accueille la prière des premiers et il pardonne aux seconds leurs péchés. Hommes, pourquoi donc croire aujourd’hui que votre compagnon d’existence ne pourrait rien faire pour vous, quand le serviteur a le droit d’intervenir auprès de son Seigneur et d’être exaucé ?

Vous qui jugez, apprenez donc à pardonner ; et vous qui êtes malades, apprenez donc à supplier. Si vous n’espérez pas le pardon direct des fautes graves, recourez alors à des intercesseurs, recourez à l’Église qui priera pour vous. Alors, par égard pour elle, le Seigneur vous accordera le pardon qu’il aurait pu vous refuser. Nous ne négligeons pas la réalité historique de la guérison du paralytique, mais nous reconnaissons avant tout la guérison en lui de l’homme intérieur, à qui ses péchés sont pardonnés. (…)

Le Seigneur veut sauver les pécheurs ; il montre sa divinité par sa connaissance des secrets et par les merveilles de ce qu’il fait. « Qu’est-ce qui est le plus facile à dire, demande-t-il donc, de dire : ‘Tes péchés te sont remis’ ou bien : ‘Lève-toi et marche’ ? » Ici il fait voir une image complète de la résurrection, puisque, guérissant la blessure de l’âme et du corps (…), l’homme tout entier est guéri.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

« Pourquoi pleures-tu ? » (Jn 20,13)

mercredi 2 novembre 2022

Qu’ils pleurent, ceux qui ne peuvent pas avoir l’espérance de la résurrection ; ce n’est pas la volonté de Dieu qui la leur ôte mais la dureté de ce qu’ils croient. Il faut qu’il y ait une différence entre les serviteurs du Christ et les païens. La voici : eux, ils pleurent les leurs qu’ils pensent morts pour toujours ; ils ne trouvent nulle fin à leurs larmes, n’atteignent nul repos pour leur tristesse…, tandis que pour nous la mort n’est pas la fin de notre existence mais la fin de notre vie. Puisque notre existence est restaurée par une condition meilleure, que donc l’arrivée de la mort balaie tous nos pleurs…

Combien notre consolation est plus grande, nous qui croyons que nos bonnes actions promettent des récompenses meilleures après la mort. Les païens ont leur consolation : c’est de penser que la mort est un repos pour tous nos maux. Comme ils pensent que leurs morts sont privés de jouir de la vie, ils pensent aussi qu’ils sont privés de toute faculté de sentir et libérés de la douleur des peines dures et incessantes que nous supportons dans cette vie. Mais nous, de même que nous devons avoir l’esprit plus élevé à cause de la récompense attendue, nous devons aussi mieux supporter notre douleur grâce à cette consolation… Nos morts ont été envoyés non pas loin de nous, mais avant nous — eux que la mort ne prendra pas, mais que l’éternité recevra.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

« Tout homme qui aura quitté à cause de mon nom des maisons, des frères, des sœurs, un père, une mère…recevra beaucoup plus. » (Mt 19,29)

jeudi 20 octobre 2022

« Vous croyez que je suis venu apporter la paix sur terre ? Non, vous dis-je, mais la séparation. Car désormais dans la même maison cinq personnes seront divisées, trois prenant parti contre deux, et deux contre trois… » Dans presque tous les passages de l’Évangile le sens spirituel joue un rôle important ; mais dans ce passage surtout, pour ne pas être rebuté par la dureté d’une explication simpliste, il faut chercher dans la trame du sens la profondeur spirituelle… Comment dit-il lui-même : « Je vous donne ma paix, je vous laisse ma paix » (Jn 14,27) s’il est venu séparer les pères de leurs fils, les fils de leurs pères, en rompant leurs liens ? Comment peut-on être appelé « maudit si l’on n’honore pas son père » (Dt 27,16), et fervent si on le délaisse ?

Si nous comprenons que la religion vient en premier lieu et la piété filiale en second, nous comprendrons que cette question s’éclaire ; il faut en effet faire passer l’humain après le divin. Car si on doit rendre des devoirs aux parents, combien plus au Père des parents, à qui on doit être reconnaissant pour nos parents ? … Il ne dit donc pas qu’il faut renoncer à ceux que nous aimons, mais préférer Dieu à tous. D’ailleurs on trouve dans un autre livre : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi » (Mt 10,37). Il t’est interdit non d’aimer tes parents, mais de les préférer à Dieu. Car les relations naturelles sont des bienfaits du Seigneur, et personne ne doit aimer les bienfaits reçus plus que Dieu, qui préserve les bienfaits qu’il donne.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

« Celui qui a fait l’extérieur n’a-t-il pas fait aussi l’intérieur ? »

mardi 11 octobre 2022

« Vous voilà bien, vous les Pharisiens ! Vous purifiez l’extérieur de la coupe et du plat. » Vous le voyez, nos corps sont désignés ici par les noms d’objets en terre et fragiles, qu’une simple chute peut briser. Et les sentiments profonds de l’âme sont désignés par les expressions et les gestes du corps, comme ce que l’intérieur de la coupe contient se fait voir au-dehors… Vous voyez donc que ce n’est pas l’extérieur de cette coupe ou de ce plat qui nous souille mais l’intérieur.

C’est pourquoi, comme un bon maître, Jésus nous a appris comment nettoyer les taches de notre corps, en disant : « Donnez en aumône ce que vous avez, et tout en vous sera pur ». Vous voyez combien il y a de remèdes ! La miséricorde nous purifie ; la parole de Dieu nous purifie aussi, selon ce qui est écrit : « Vous êtes déjà purs, grâce à la parole que je vous ai annoncée » (Jn 15,3)…

C’est le point de départ d’un très beau passage : le Seigneur nous invite à rechercher la simplicité et il condamne l’attachement à ce qui est superflu et terre-à-terre. Les Pharisiens, qui prennent les questions de la Loi matériellement, sont comparés non sans raison à la coupe et au plat, à cause de leur fragilité : ils observent des points qui n’ont aucune utilité pour nous, et ils négligent ceux où se trouve le fruit de notre espérance. Ils commettent donc une grande faute, en dédaignant le meilleur. Et pourtant le pardon est promis même à cette faute, si vient ensuite la miséricorde de l’aumône.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

« Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi. »

mardi 13 septembre 2022

Même si les symptômes de la mort ont enlevé tout espoir de vie, même si les corps des défunts gisent près du tombeau, cependant, à la voix de Dieu, les cadavres déjà prêts à se décomposer se relèvent, retrouvent la parole ; le fils est rendu à sa mère, il est rappelé du tombeau, il en est arraché. Quel est ce tombeau, le tien ? Tes mauvaises habitudes, ton manque de foi. C’est de ce tombeau que le Christ te délivre, de ce tombeau que tu ressusciteras, si tu écoutes la Parole de Dieu. Même si ton péché est si grave que tu ne peux le laver toi-même par les larmes de ton repentir, l’Église, ta mère, pleurera pour toi, elle qui intervient pour chacun de ses fils comme une mère veuve pour son fils unique. Car elle compatit par une sorte de souffrance spirituelle qui lui est naturelle, lorsqu’elle voit que ses enfants sont entraînés vers la mort par des vices funestes…

Qu’elle pleure donc, cette pieuse mère ; que la foule l’accompagne ; que non seulement une foule, mais une foule considérable compatisse à cette tendre mère. Alors tu ressusciteras dans ton tombeau, tu en seras délivré ; les porteurs s’arrêteront, tu te mettras à dire des paroles de vivant, tous seront stupéfaits. L’exemple d’un seul en corrigera beaucoup et ils loueront Dieu de nous avoir accordé de tels remèdes pour éviter la mort.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

« Réveille-toi, toi qui dors ; relève-toi d’entre les morts. » (Ep 5,14)

dimanche 11 septembre 2022

« J’irai trouver mon père, et je lui dirai : ‘Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi.’’ » Tel est notre premier aveu, au Créateur, au maître de la miséricorde, au juge de la faute. Bien qu’il connaisse tout, Dieu attend l’expression de notre aveu ; car « la confession des lèvres obtient le salut » (Rm 10,10). (…)

Voilà ce que se disait le fils cadet ; mais ce n’est pas assez de parler, si tu ne viens pas au Père. Où le chercher, où le trouver ? « Il se leva. » Lève-toi d’abord, toi qui jusqu’ici étais assis et endormi. Voilà ce que dit l’apôtre Paul : « Debout, toi qui dors, lève-toi d’entre les morts » (Ep 5,14). (…) Debout donc, cours à l’Église : là est le Père, là est le Fils, là est l’Esprit Saint. Celui qui t’entend parler dans le secret de ton âme vient à ta rencontre ; et quand tu es encore loin, il te voit et il accourt. Il voit dans ton cœur ; il accourt, pour que personne ne te retarde ; il t’embrasse aussi. (…) Il se jette à ton cou pour te relever, toi qui gisais chargé de péchés, tourné vers la terre ; il te retourne vers le ciel pour que tu puisses y chercher ton Créateur. Le Christ se jette à ton cou, pour dégager ta nuque du joug de l’esclavage et y suspendre son joug de douceur. (…) Il se jette à ton cou, lorsqu’il dit : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et je vous réconforterai ; prenez sur vous mon joug » (Mt 11,28). Telle est la manière dont il t’étreint, si tu te convertis.

Et il fait apporter une robe, un anneau, des chaussures. La robe est le vêtement de la sagesse (…), l’habillement spirituel et le vêtement des noces. L’anneau est-il autre chose que le sceau d’une foi sincère et l’empreinte de la vérité ? Quant aux chaussures, c’est la prédication de la Bonne Nouvelle.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

« Et Judas l’Iscariote, celui-là même qui le livra. »

mercredi 6 juillet 2022

01-enseignement

« Le Christ appela ses disciples et en choisit douze » pour les envoyer, semeurs de la foi, propager le secours et le salut des hommes dans le monde entier. Remarquez ce plan divin : ce ne sont pas des sages, ni des riches, ni des nobles, mais des pécheurs et des publicains qu’il a choisis pour les envoyer, de crainte qu’ils ne semblent avoir été entraînés par l’habileté, rachetés par les richesses, attirés à sa grâce par le prestige du pouvoir et de la notoriété. Il a fait ainsi pour que la victoire vienne du bien-fondé de la vérité, et non pas du prestige du discours.

Judas lui-même est choisi, non par mégarde mais en connaissance de cause. Quelle grandeur de cette vérité que même un serviteur ennemi ne peut pas affaiblir ! Quel trait de caractère du Seigneur, qui préfère compromettre à nos yeux son jugement plutôt que son amour ! Il s’était chargé de la faiblesse humaine et n’a pas refusé même cet aspect de la faiblesse humaine. Il a voulu l’abandon, il a voulu la trahison, il a voulu être livré par son apôtre, pour que toi, si un compagnon t’abandonne, si un compagnon te trahit, tu prennes avec calme cette erreur de jugement et la dilapidation de ta bonté.

Saint Ambroise (v. 340-397), évêque de Milan et docteur de l’Église
Commentaire sur l’évangile de Luc, V, 44-45 (trad. cf SC 45, p. 199)

 

 

 

« Le jour du sabbat…, il enseignait en homme qui a autorité. »

mardi 11 janvier 2022

C’est un jour du sabbat que le Seigneur Jésus commence à accomplir des guérisons, pour signifier que la nouvelle création commence au point où l’ancienne s’était arrêtée, et aussi pour marquer dès le début que le Fils de Dieu n’est pas soumis à la Loi mais supérieur à la Loi, qu’il ne détruit pas la Loi mais l’accomplit (Mt 5,17). Ce n’est pas par la Loi mais par le Verbe que le monde a été fait, comme nous le lisons : « Par la Parole du Seigneur les cieux ont été faits » (Ps 32,6). La Loi n’est donc pas détruite mais accomplie, afin de renouveler l’homme déchu. Voilà pourquoi l’apôtre Paul dit : « Débarrassez-vous de l’homme ancien ; revêtez l’homme nouveau, qui a été créé selon le Christ » (Col 3,9s).

Il est donc juste que le Seigneur commence le jour du sabbat, pour montrer qu’il est le Créateur (…), continuant l’ouvrage qu’il avait commencé jadis lui-même. Comme l’ouvrier qui s’apprête à réparer une maison, il commence, non par les fondations, mais par les toits ; il commence à démolir ce qui est délabré. (…) En délivrant le possédé, il commence par le moindre pour en venir au plus grand : même des hommes peuvent délivrer du démon — par la parole de Dieu, il est vrai — mais commander aux morts de ressusciter n’appartient qu’à la puissance de Dieu.

Saint Ambroise (v. 340-397)