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Archive pour la catégorie ‘Année liturgique’

Le lundi saint

lundi 25 mars 2024

Le Seigneur [dit à Gertrude] : « Si tu as envie de m’offrir aussi le parfum que d’après l’Écriture, cette femme a répandu dévotement sur ma tête, après avoir brisé son vase (Mt 26,7), en sorte que « la maison fut remplie de l’odeur du parfum » (Jn 12,3), sache que tu le feras excellemment en aimant la vérité. Oui, celui qui aime la vérité et qui, pour la défendre, perd ses amis ou s’expose à d’autres peines, ou encore assume volontairement des fatigues, celui-là vraiment brise le vase et répand abondamment sur ma tête un parfum précieux, si bien que la maison est remplie de sa bonne odeur. Il devient en effet l’occasion d’un bon exemple. (…)

Elle reprit : « Ô Seigneur, il est dit que Marie avait acheté ce parfum précieux ; comment pourrai-je à mon tour vous rendre un hommage aussi grand que si j’avais fait pour vous pareil achat ? » Le Seigneur répondit : « Quiconque m’offre son bon vouloir en une affaire qu’il décide de mener à terme, pour mon amour, si grande que puisse être, par ailleurs, la peine qu’il lui faudra se donner, pourvu qu’il procure ma gloire, celui-là m’achète un parfum extrêmement précieux, et qui m’est on ne peut plus agréable, puisqu’en préférant mon honneur à son avantage, il s’expose volontairement à mille désagréments. Oui, vraiment, il l’achète pour moi, quand bien même il se trouverait toujours empêché d’exécuter son dessein. »

Sainte Gertrude d’Helfta (1256-1301)

 

 

 

Dimanche des Rameaux et de la Passion

dimanche 24 mars 2024

Nous voici donc arrivés à la sainte et grande semaine de l’accomplissement des souffrances du Christ, et à nouveau nous apprenons en quoi, combien de fois, quand et à quel point s’est abaissé pour nous le Seigneur de gloire (1 Co 2,8), notre Dieu et notre créateur. En vérité, nous sommes tout illuminés quand nous nous pénétrons à nouveau de tout cela.

En effet, quelle âme de pierre n’est saisie de componction et ne se laisse fléchir en apprenant que le Seigneur est livré par un disciple aux mains des impies (cf. Ac 2,23) ? Il est lié par la main des soldats, mené devant un tribunal. Il est condamné; lui, la vérité, il s’entend appeler imposteur et charlatan (cf. Mt 27,63), lui, le sauveur de tous, on le frappe au visage et il supporte ; on le couvre de crachats et il ne se défend pas ; par dérision, on le ceint de la couronne d’épines, et il ne réduit pas en cendres ceux qui osent ces outrages ; il est revêtu d’un manteau de pourpre comme un roi et, comme un malfaiteur, frappé à coups de poings. Enfin il est crucifié, transpercé avec une lance. Il goûte à la mort, lui qui est la vie de tous. Et aussitôt, il ressuscite, nous relevant ainsi de notre déchéance, et il nous remet debout pour une inaltérable immortalité.

(…) Qu’allons-nous t’offrir, parce que dans ton inépuisable bonté, tu nous as considérés d’un si grand prix que, loin de mépriser ta créature perdue, tu es venu nous sauver par le moyen d’un extrême, d’un indicible abaissement ? Cependant, tu nous a rendus forts et tu nous as sauvés. Et de nos lèvres pécheresses et indignes, nous t’offrons toute la louange et l’action de grâces dont nous sommes capables. Cet exemple, nous sommes instamment priés de chercher à l’imiter, de nous y conformer dans les choses grandes et importantes et, tout autant, de le prendre pour modèle dans les choses petites et serviles. Car c’est cela rendre grâces dignement.

Saint Théodore le Studite (759-826)

 

 

 

Chaire de saint Pierre, apôtre, fête

jeudi 22 février 2024

Vous êtes venus ici à la veille même du jour où l’Église célèbre la fête de la Chaire de saint Pierre à Rome. (…) Regardez la chaire d’où le premier pape adressait la parole aux premiers chrétiens, comme moi-même en ce moment. C’est là qu’il les excitait à la vigilance contre le diable qui, tel un lion rugissant, rôde autour de nous et cherche qui dévorer (1P 5,8-9) ; c’est là qu’il les exhortait à garder la fermeté dans la foi, pour ne pas être entraînés par les erreurs des faux prophètes (2P 2,1 ; 3,17). Cet enseignement de Pierre continue dans ses successeurs, et il continuera, immuable, à travers les temps, parce que telle est la mission que le Christ lui-même a donnée au chef de l’Église.

Pour relever le caractère universel et indéfectible de cet enseignement, le siège de la primauté spirituelle a été, après une providentielle préparation, fixé dans la ville de Rome. Dieu, selon la remarque de notre prédécesseur Saint Léon le Grand, amena par sa Providence les peuples à se réunir en un seul empire, dont Rome était la capitale, afin que d’elle la lumière de la vérité, révélée pour le salut de tous les peuples, se répandit plus efficacement dans tous ses membres (sermon LXXXII c,3-5).

Les successeurs de Pierre, mortels comme tous les hommes, passent eux aussi, plus ou moins rapidement. Mais la primauté de Pierre subsistera toujours, grâce à l’assistance spéciale qui lui fut promise quand Jésus le chargea de confirmer ses frères dans la foi (Lc 22,32). Qu’importe le nom, le visage, les origines humaines de chaque pape ; c’est toujours Pierre qui vit en lui, c’est Pierre qui dirige et gouverne, c’est Pierre surtout qui enseigne et qui répand sur le monde la lumière de la vérité libératrice. Cela faisait dire à un grand orateur sacré que Dieu a établi à Rome une chaire éternelle : « Pierre vivra dans ses successeurs ; Pierre parlera toujours dans sa chaire. » (Bossuet, sermon sur l’unité de l’Église, 1).

Vénérable Pie XII

 

 

 

L’origine du Carême : accompagner les catéchumènes vers le baptême à Pâques

vendredi 16 février 2024

Après ce temps consacré à l’observance du jeûne, l’âme, purifiée et épuisée, parvient au baptême. Elle reprend des forces en se plongeant dans les eaux de l’Esprit ; tout ce qui avait été brûlé par les flammes des maladies renaît de la rosée de la grâce du ciel. Abandonnant la nature périssable du vieil homme (Ep 4,22), le nouveau baptisé reçoit une nouvelle jeunesse… Par une nouvelle naissance, il renaît autre, alors qu’il est le même que celui qui avait péché.

Par un jeûne ininterrompu de quarante jours et de quarante nuits, Élie a mérité de mettre fin, grâce à l’eau du ciel, à une sécheresse longue et pénible de la terre entière (1R 19,8; 18,41) ; il a étanché la soif brûlante du sol, en lui apportant une pluie abondante. Ces faits se sont produits pour nous servir d’exemple, pour que nous méritions, après un jeûne de quarante jours, la pluie bénie du baptême, afin que l’eau du ciel arrose toute la terre, aride depuis longtemps chez nos frères du monde entier. Le baptême comme une rosée du salut mettra fin à la longue stérilité du monde païen. En effet, c’est de sécheresse et d’aridité spirituelle que souffre quiconque n’a pas été baigné de la grâce du baptême.

Par un jeûne du même nombre de jours et de nuits, le saint Moïse a mérité de parler à Dieu, de demeurer, de séjourner avec lui, de recevoir de ses mains les préceptes de la Loi (Ex 24,18)… Nous aussi, frères très chers, jeûnons avec ferveur pendant toute cette période, pour que…à nous aussi les cieux s’ouvrent et le séjour des morts se ferme.

Saint Maxime de Turin (?-v. 420)

 

 

 

Le mercredi des Cendres

mercredi 14 février 2024

Ce temps fort de l’année liturgique est caractérisé par le message biblique qui peut se résumer en un mot… : « Convertissez-vous »… La cérémonie suggestive des cendres élève notre esprit vers la réalité éternelle qui ne passe jamais, vers Dieu qui est le principe et la fin, l’alpha et l’oméga de notre existence (Ap 21,6). La conversion, en effet, n’est rien d’autre qu’un retour à Dieu, en évaluant les réalités terrestres à la lumière indéfectible de sa vérité. C’est une évaluation qui nous entraîne à avoir toujours plus clairement conscience du fait que nous ne sommes que de passage au milieu des vicissitudes laborieuses de cette terre, et qui nous pousse et nous encourage à accomplir tous les efforts possibles pour que le Royaume de Dieu soit inauguré en nous-mêmes, et pour que sa justice triomphe.

Le terme « pénitence » est également synonyme de « conversion ». Le Carême nous invite à mettre en pratique l’esprit de pénitence, non pas dans sa signification négative de tristesse et de frustration, mais dans celle d’élévation de l’esprit, de libération du mal, de détachement du péché et de toutes les influences qui peuvent entraver notre marche vers la plénitude de la vie. Pénitence comme remède, comme réparation, comme changement de mentalité qui dispose à la foi et à la grâce, mais qui suppose volonté, effort et persévérance. Pénitence comme expression d’un libre et généreux engagement à la suite du Christ.

Saint Jean-Paul II (1920-2005)

 

 

 

Présentation du Seigneur au Temple, fête

vendredi 2 février 2024

Suivant la sainte alliance des Patriarches,
Tu as reçu la circoncision le huitième jour,
Pour que, le cœur incirconcis de l’homme,
Tu le fasses circoncire grâce à ton Esprit.

Toi qui es le Législateur, selon la Loi
Tu es entré au Temple pour y être offert ;
Et Toi qui es l’Ancien des jours, le vieillard
Te caressait l’enfant, dans ses saints bras.

Moi qui par le péché étais né dans le vice,
Tu m’as enfanté de nouveau en la Fontaine sacrée ;
Je me suis dépouillé [de ma nouvelle naissance] par la tromperie du Mauvais,
Je me suis replongé dans la fange des vices.

Purifie-moi derechef par ta Naissance,
En m’offrant au Père qui est au ciel,
Grâce aux supplications de la Mère de Dieu
Et du vieillard Siméon.

Saint Nersès Snorhali (1102-1173)

 

 

 

Fête de la conversion de saint Paul, apôtre

jeudi 25 janvier 2024

C’est avec raison, frères bien-aimés, que la conversion de « celui qui enseigne les nations » (1Tm 2,7) est une fête que tous les peuples célèbrent aujourd’hui avec joie. En effet nombreux sont les surgeons qui ont poussé de cette racine ; une fois converti, Paul est devenu l’instrument de la conversion du monde entier. Autrefois, lorsqu’il vivait encore dans la chair mais non selon la chair (cf Rm 8,5s), il a converti beaucoup à Dieu par sa prédication ; aujourd’hui encore, alors qu’il vit en Dieu une vie plus heureuse, il ne cesse de travailler à la conversion des hommes par son exemple, sa prière et sa doctrine. (…)

Cette fête est une grande source de biens pour ceux qui la célèbrent. (…) Comment désespérer, quelle que soit l’énormité de nos fautes, quand on entend que « Saul, ne respirant encore que menace et meurtre contre les disciples du Seigneur » a été changé soudainement en « un instrument de choix » ? (Ac 9,1.15) Qui pourrait dire, sous le poids de son péché : « Je ne peux pas me relever pour mener une vie meilleure », alors que, sur la route même où le conduisait son cœur assoiffé de haine, le persécuteur acharné est devenu subitement un prédicateur fidèle ? Cette seule conversion nous montre en un jour magnifique la grandeur de la miséricorde de Dieu et la puissance de sa grâce. (…)

Voilà bien, mes frères, un modèle parfait de conversion : « Mon cœur est prêt, Seigneur, mon cœur est prêt. (…) Que veux-tu que je fasse ? » (Ps 56,8; Ac 9,6) Parole brève, mais combien pleine, vivante, efficace et digne d’être exaucée ! Qu’il se trouve peu de gens dans cette disposition d’obéissance parfaite, qui aient renoncé à leur volonté au point que leur cœur même ne leur appartienne plus. Qu’il se trouve bien peu de gens qui à chaque instant cherchent non pas ce qu’ils veulent eux-mêmes mais ce que Dieu veut et qui lui disent sans cesse : « Seigneur, que veux-tu que je fasse ? »

Saint Bernard (1091-1153)

 

 

 

Fête du Baptême de Notre Seigneur

lundi 8 janvier 2024

L’Esprit Saint est descendu au cours du baptême du Christ pour que ne passât point inaperçue la dignité du baptisé, selon l’affirmation de Jean : « Mais celui qui m’a envoyé baptisé dans l’eau, celui-là m’a dit : “ Celui sur qui tu verras descendre et demeurer l’Esprit, c’est lui qui baptise dans l’Esprit Saint ” » (Jn 1,33). Attention : que dit l’Évangile ? « Les cieux s’ouvrirent » ; mais il s’ouvrirent à cause de la dignité de celui qui descendait. « Voici en effet, dit-il, que les cieux s’ouvrirent et il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui » (Mt 3,16) et il descendait, de toute évidence, de son propre mouvement. Il fallait en effet, (…) que l’étrenne et les prémices du Saint-Esprit des baptisés, fussent accordées à l’humanité du Sauveur qui donne cette si grande grâce.

Peut-être aussi est-il descendu sous une forme de colombe pour montrer, comme certains le disent, un modèle de la pure, innocente et simple colombe qui par ses prières travaille pour ses petits et pour le pardon des péchés. (…) Pour une part, la colombe de Noé préfigurait celle-ci. En effet, de même que du temps de Noé, par le bois et par l’eau, les hommes reçurent le salut et commencèrent une nouvelle génération, et de même que la colombe revint vers lui, sur le soir, avec un rameau d’olivier, ainsi, l’Esprit Saint lui aussi descendit vers le véritable Noé, auteur de la seconde génération, qui amenait avec lui dans la même arche des échantillons de toutes les diverses espèces (…) Donc, comme certains l’expliquent, la colombe spirituelle est descendue au temps du baptême afin de montrer que c’est lui-même qui sauve les croyants par le bois de la croix et qui, vers le soir, doit par sa mort apporter le bienfait du salut.

Saint Cyrille de Jérusalem (313-350)

 

 

 

Épiphanie du Seigneur, Solennité

dimanche 7 janvier 2024

Adoration des rois : les puissants de ce monde baissent leur tête devant l’humble berceau d’un enfant. De l’or, de l’encens, de la myrrhe venus d’Orient ; anxiété dans les cœurs, poussière des chemins parcourus la nuit, guidés par une étoile. « Où est-il, celui qui vient de naître ? »… Vingt siècles sont passés : beaucoup d’âmes parcourent les chemins de la terre comme les mages d’Orient et continuent à demander en passant : « Avez-vous vu celui qu’aime mon âme ? » (Ct 3,3) C’est aussi une étoile de lumière qui, illuminant notre chemin, nous conduit à l’humilité d’une crèche, et nous montre ce qui nous a fait sortir « en dehors des murailles de la ville » (He 13,13; cf Lc 16,27). Elle nous montre un Dieu qui, tout en étant Maître de tout, manque de tout. Le Créateur de la lumière et de la chaleur du soleil souffre du froid ; celui qui vient au monde par amour pour les hommes est oublié des hommes.

Maintenant aussi, comme alors, il y a des âmes qui cherchent Dieu… Par malheur, tous n’arrivent pas à le trouver, ils ne regardent pas tous l’étoile qui est la foi ; ils n’osent pas non plus s’aventurer sur ces chemins qui conduisent à lui, qui sont l’humilité, le renoncement, le sacrifice et presque toujours la croix…

Quand cette nuit, dans le chœur, je me souvenais, sans le vouloir, de mes jours d’enfance, de ma maison, des rois, mon habit monastique me disait autre chose : moi aussi, comme les mages, je suis venu à la recherche d’une crèche. Je ne suis plus un enfant auquel il faut donner des jouets : les rêves sont maintenant plus grands et ils ne sont pas de cette vie. Les rêves du monde, comme les jouets des enfants, font le bonheur quand on les attend, mais ensuite tout n’est que du carton. Les rêves de ciel — rêve qui dure toute la vie et ne déçoit pas après. Comme ils ont dû s’en retourner heureux, les mages, après avoir vu Dieu ! Moi aussi je le verrai, il s’agit seulement d’attendre un peu. Le matin arrivera bientôt, et avec lui la lumière. Quel heureux réveil ce sera !

Saint Raphaël Arnáiz Barón (1911-1938)

 

 

 

Fête des saints Innocents, martyrs

jeudi 28 décembre 2023

Le roi traître Hérode, trompé par les mages, envoie ses sbires à Bethléem et dans tous les environs pour tuer les enfants de moins de deux ans… Mais tu n’as donc rien obtenu, barbare cruel et arrogant : tu peux faire des martyrs, tu ne peux pas trouver le Christ. Ce tyran malheureux croyait que l’avènement du Seigneur notre Sauveur le renverserait de son trône royal. Mais il n’en est pas ainsi. Le Christ n’était pas venu pour usurper la gloire d’autrui, mais pour nous faire don de la sienne. Il n’était pas venu pour s’emparer d’un royaume terrestre, mais pour accorder le Royaume des cieux. Il n’était pas venu pour voler des dignités, mais pour souffrir des injures et des sévices. Il n’était pas venu pour préparer sa tête sacrée à un diadème de pierreries, mais à une couronne d’épines. Il n’était pas venu pour siéger glorieusement au-dessus des sceptres, mais pour être bafoué et crucifié.

À la naissance du Seigneur, « Hérode a été troublé et tout Jérusalem avec lui » (Mt 2,3). Quoi d’étonnant, si l’impiété est troublée par la naissance de la bonté ? Voici qu’un homme en armes s’effraie de celui qui est couché dans une mangeoire, un roi orgueilleux tremble devant l’humble, celui qui est revêtu de pourpre redoute le tout-petit enveloppé de langes… Il feignait de vouloir adorer celui qu’il cherchait à faire périr (Mt 2,8). Mais la Vérité ne craint pas les embûches du mensonge… La traîtrise ne peut pas trouver le Christ, car ce n’est pas par la cruauté mais par la foi que l’on doit chercher Dieu, qui vit et règne pour les siècles des siècles. Amen.

Eusèbe le Gallican (5e siècle)