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Archive pour la catégorie ‘Ecritures’

Pardonner jusqu’à soixante-dix fois sept fois !

mardi 5 mars 2024

Lorsque le Roc t’a interrogé
Combien de fois il devait pardonner à son frère,
Tu n’as pas dit : « Sept fois »,
Mais « Quatre cent quatre-vingt-dix fois* » !

En ce nombre sont contenues les années de notre vie ici-bas,
Des sept périodes de notre vie éphémère :
Durant tout le temps que nous sommes en ce corps
Il faut pardonner au repentant.

Et, bien que je fusse le dernier
À ne pas pardonner au débiteur,
À cause de la nature maladive de mon âme,
Et à être imparfait dans le bien,

Cependant qu’en moi s’accomplisse par Toi
La parole de ton commandement, à moi imposé ;
Veuille pardonner mes fautes, dettes envers Toi,
Qui sont plus nombreuses que le sable de la mer.

Que la loi des Septante fois,
Ne soit pas seulement à ma mesure, à moi pauvre,
Mais que davantage encore se renforce ta loi,
Selon ta miséricorde qui ne se compte pas.

Saint Nersès Snorhali (1102-1173)

* Par “490 fois” l’auteur signifie “70 fois 7 fois”

 

 

 

Le Carême conduit au baptême

lundi 4 mars 2024

Tu t’es approché, tu as vu la fontaine baptismale, tu as vu aussi l’évêque près de la fontaine. Et sans doute est-il tombé dans ton âme la même pensée qui s’est insinuée en celle de Naaman, le Syrien. Car, bien qu’il ait été purifié, il avait cependant douté d’abord… Je crains que quelqu’un ait dit : « C’est tout ? » Oui, c’est vraiment tout : là est toute innocence, toute piété, toute grâce, toute sainteté. Tu as vu ce que tu as pu voir des yeux de ton corps… ; ce qu’on ne voit pas est bien plus grand…, car ce qu’on ne voit pas est éternel… Quoi de plus étonnant que la traversée de la Mer Rouge par les Israélites, pour ne parler à présent que du baptême ? Et pourtant ceux qui l’ont traversé sont tous morts dans le désert. Au contraire, celui qui traverse la fontaine baptismale, c’est-à-dire celui qui passe des biens terrestres à ceux du ciel…, ne meurt pas mais ressuscite.

Naaman était lépreux… À son arrivée, le prophète lui a dit : « Va, descends dans le Jourdain, baigne-toi et tu seras guéri. » Il s’est mis à réfléchir en lui-même et s’est dit : « C’est tout ? Je suis venu de Syrie jusqu’en Judée et on me dit : Va au Jourdain, baigne-toi et tu seras guéri. Comme s’il n’y avait pas des fleuves meilleurs dans mon pays ! » Ses serviteurs lui disent : « Maître, pourquoi ne fais-tu pas ce que dit le prophète ? Fais-le plutôt et essaie. » Alors il s’est rendu au Jourdain, s’est baigné et en est sorti guéri.

Qu’est-ce que cela signifie ? Tu as vu de l’eau, mais toute eau ne guérit pas ; par contre, l’eau qui a la grâce du Christ guérit. Il y a une différence entre l’élément et la sanctification, entre l’acte et l’efficacité. L’acte s’accomplit avec de l’eau, mais l’efficacité vient de l’Esprit Saint. L’eau ne guérit pas si l’Esprit Saint n’est descendu et n’a consacré cette eau. Tu as lu que lorsque notre Seigneur Jésus Christ a institué le rite du baptême, il est venu à Jean et celui-ci lui a dit : « C’est moi qui dois être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ? » (Mt 3,14)… Le Christ est descendu ; Jean qui baptisait était à ses côtés ; et voici que, telle une colombe, descendit l’Esprit Saint… Pourquoi le Christ est-il descendu le premier et ensuite l’Esprit Saint ? Pour quelle raison ? Pour que le Seigneur ne paraisse pas avoir besoin du sacrement de la sanctification : c’est lui qui sanctifie, et c’est aussi l’Esprit qui sanctifie.

Saint Ambroise (v. 340-397)

 

 

 

 

« En trois jours je le relèverai. »

dimanche 3 mars 2024

Il est grand, le mystère de notre résurrection, et extrêmement difficile à sonder. Il est annoncé dans beaucoup de textes de l’Écriture, mais surtout dans Ézéchiel (…) : « L’Esprit du Seigneur me déposa dans une vallée pleine d’ossements humains (…) ; ils étaient complètement desséchés. Le Seigneur me dit : Fils d’homme, ces ossements vivront-ils ? Je répondis : Seigneur, c’est toi qui le sais. Il me dit : Prophétise sur ces ossements. Tu leur diras : Ossements desséchés, écoutez la parole du Seigneur » (Ez 37,1-4). (…)

Quels sont donc ces ossements à qui il est dit : « Écoutez la parole du Seigneur » (…) sinon le Corps du Christ, dont le Seigneur disait : « Tous mes os sont disloqués » (Ps 21,15). (…) Comme a eu lieu la résurrection du corps véritable et parfait du Christ, un jour les membres du Christ (…) seront réunis, l’os à son os, la jointure à la jointure. Personne privé de cette jointure n’atteindra « l’homme parfait, à la stature du corps du Christ dans sa plénitude » (Ep 4,13). Alors (…) « tous les membres du corps, à plusieurs, formeront un seul corps » (1Co 12,12). (…)

Je dis cela à propos du Temple dont le Seigneur a dit : « Le zèle pour ta maison me dévore » (Ps 68,10), et à propos des juifs qui lui demandaient de leur montrer un signe, et enfin à propos de sa réponse (…) : « Détruisez ce Temple, et en trois jours je le relèverai ». Car il faut que soit chassé de ce temple, qui est le Corps du Christ, tout ce qui refuse la raison et ce qui relève du commerce, pour qu’à l’avenir ce temple ne soit plus une maison de marchands. Il faut en outre (…) qu’après sa destruction par ceux qui refusent la parole de Dieu, il soit relevé le troisième jour (…) Grâce à la purification de Jésus, ses disciples, ayant abandonné tout ce qui est déraisonnable et toute forme de commerce et à cause du zèle du Verbe, la Parole de Dieu, qui est présent en eux, ses disciples seront « détruits » pour être « relevés » par Jésus en trois jours. (…) Car il faut trois jours entiers pour que cette reconstruction soit achevée. C’est pourquoi l’on peut dire d’une part que la résurrection a eu lieu et d’autre part qu’elle est à venir : vraiment « nous avons été ensevelis avec le Christ » et « avec lui nous nous lèverons » (cf Rm 6,4). (…) « Tous revivront dans le Christ, mais chacun à son rang : comme prémices, le Christ, puis ceux qui seront au Christ lors de son avènement » (1Co 15,22s).

Origène (v. 185-253)

 

 

Tu es venu nous sauver, nous qui étions perdus

samedi 2 mars 2024

Maître de tout, Christ, de tous ces maux délivre-nous,
des passions qui nous détruisent
et des pensées nées des passions.

À cause de toi nous fûmes créés,
afin de jouir des délices où tu nous mis dans le jardin du Paradis
planté par toi.

Nous avons fait venir sur nous le déshonneur présent
pour avoir préféré aux délices bienheureuses la ruine

dont nous avons reçu la rétribution en nous
qui avons échangé pour la mort la vie éternelle.

Maintenant donc, ô Maître, comme tu nous a regardés
à la fin regarde-nous.
Comme tu t’es fait homme, sauve-nous tous.

Car tu es venu nous sauver, nous qui étions perdus.
Ne nous détache pas de la part des sauvés.

Ressuscite les âmes et sauve les corps,
purifie-nous de toute souillure.

Brise les liens des passions qui nous tiennent,
toi qui as brisé les phalanges des démons impurs.

Et délivre-nous de leur tyrannie,
afin que nous puissions te servir toi seul, Lumière éternelle,

ressuscités des morts et avec les anges,
dansant la ronde bienheureuse,
éternelle indissoluble. Amen

Thalassius l’Africain

 

 

 

 

« Voici que nous montons à Jérusalem. »

mercredi 28 février 2024

Dans les « psaumes des montées » le psalmiste aspire à Jérusalem et il dit qu’il veut monter. Où monter ? Désire-t-il atteindre le soleil, la lune, les étoiles ? Non. Dans le ciel se trouve la Jérusalem éternelle, là où habitent les anges, nos concitoyens (He 12,22). Sur cette terre nous sommes en exil, loin d’eux. Sur la route de l’exil, nous poussons des soupirs ; dans la cité, nous tressaillirons d’allégresse.

Au cours de notre voyage, nous trouvons des compagnons qui ont déjà vu cette cité et qui nous encouragent à y courir. Ils ont inspiré au psalmiste un cri d’allégresse : « J’ai tressailli de joie quand on m’a dit : Allons à la maison du Seigneur » (Ps 121,1)… « Nous irons à la maison du Seigneur » : courons donc, courons, puisque nous arriverons à la maison du Seigneur. Courons sans nous lasser ; là-bas il n’y a pas de lassitude. Courons à la maison du Seigneur et tressaillons d’allégresse avec ceux qui nous ont appelés, qui les premiers ont contemplé notre patrie. Ils crient de loin à ceux qui les suivent : « Nous irons dans la maison du Seigneur ; marchez, courez ! » Les apôtres ont vu cette maison et nous appellent : « Courez, marchez, suivez-nous ! Nous irons dans la maison du Seigneur ! »

Et que répond chacun de nous ? « Je me réjouis en ceux qui m’ont dit : Nous irons dans la maison du Seigneur. » Je me suis réjoui dans les prophètes, je me suis réjoui dans les apôtres, car tous ils nous ont dit : « Nous allons à la maison du Seigneur ».

Saint Augustin (354-430)

 

 

 

« Qui s’abaissera sera élevé. »

mardi 27 février 2024

[Sainte Catherine a entendu Dieu lui dire :] Tu demandes à me connaître et à m’aimer, moi, la Vérité suprême. Voici la voie pour quiconque veut arriver à me connaître parfaitement et me goûter, moi la Vérité éternelle : ne sors jamais de la connaissance de toi-même et, abaissée que tu seras dans la vallée de l’humilité, c’est en toi-même que tu me connaîtras. C’est dans cette connaissance que tu puiseras tout ce qui te manque, tout ce qui t’est nécessaire. Aucune vertu n’a de vie en elle-même à moins de la tirer de la charité ; or l’humilité est la nourrice et la gouvernante de la charité. Dans la connaissance de toi-même tu deviendras humble, puisque tu y verras que tu n’es rien par toi-même et que ton être vient de moi puisque je vous ai aimés avant que vous ayez existé. A cause de cet amour inexprimable que j’ai eu pour vous, voulant vous créer de nouveau par la grâce, je vous ai lavés et re-créés dans le sang répandu par mon Fils unique avec un si grand feu d’amour.

Seul ce sang, lui seul, fait connaître la vérité à celui qui a dissipé le brouillard de l’amour-propre par cette connaissance de soi-même. C’est alors que, me connaissant moi-même, l’âme s’embrase d’un amour inexprimable, et c’est à cause de cet amour qu’elle éprouve une douleur continuelle. Non pas une douleur qui l’afflige ou la dessèche (loin de là, puisqu’au contraire elle la féconde) mais parce qu’ayant connu ma vérité, et ses propres fautes, son ingratitude et son aveuglement envers le prochain, elle en ressent une douleur intolérable. Mais si elle en souffre, c’est parce qu’elle m’aime, car si elle ne m’aimait pas elle ne s’en affligerait pas.

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)

 

 

 

Sur le mont Thabor

dimanche 25 février 2024

Sur le mont Thabor, Jésus a fait voir à ses disciples une merveilleuse manifestation divine, comme une image préfigurative du Royaume des cieux. C’est exactement comme s’il leur disait : « Pour que le retard n’engendre pas en vous l’incrédulité, dès maintenant, immédiatement, vraiment je vous le dis, il y en a parmi ceux qui sont ici qui ne connaîtront pas la mort avant d’avoir vu le Fils de l’homme venir dans la gloire de son père » (Mt 16,28)… Telles sont les merveilles divines de cette fête… Car c’est en même temps la mort et la fête du Christ qui nous rassemblent. Afin de pénétrer dans ces mystères avec ceux qui ont été choisis parmi les disciples, écoutons la voix divine et sainte qui, comme d’en haut…, nous convoque de façon pressante : « Venez, criez vers la montagne du Seigneur, au jour du Seigneur, vers le lieu du Seigneur et dans la maison de votre Dieu ». Écoutons, afin qu’illuminés par cette vision, transformés, transportés…, nous invoquions cette lumière en disant : « Qu’il est redoutable ce lieu ; il n’est moins de rien que la maison de Dieu et la porte du ciel » (Gn 28,17).

C’est donc vers la montagne qu’il faut nous hâter, comme l’a fait Jésus qui, là comme dans le ciel, est notre guide et notre avant-coureur. Avec lui nous brillerons pour les regards spirituels, nous serons renouvelés et divinisés dans la constitution de notre âme ; configurés à son image, comme lui, nous serons transfigurés — divinisés pour toujours et transportés dans les hauteurs…

Accourons donc, dans la confiance et l’allégresse, et pénétrons dans la nuée, comme Moïse et Élie, comme Jacques et Jean. Comme Pierre, sois emporté dans cette contemplation et cette manifestation divines, sois magnifiquement transformé, sois transporté hors du monde, enlevé de cette terre. Laisse-là la chair, quitte la création et tourne-toi vers le Créateur à qui Pierre disait, ravi hors de lui-même : « Seigneur, il nous est bon d’être ici ! » Oui, Pierre, il est vraiment bon d’être ici avec Jésus, et d’y être pour toujours.

Anastase du Sinaï (?-après 700)

 

 

 

Jonas, une figure du Christ

mercredi 21 février 2024

Si Jonas est une figure du Seigneur, et évoque par son séjour de trois jours et de trois nuits dans les entrailles du cétacé la Passion du Sauveur, sa prière aussi doit être une expression de la prière du Seigneur.

« Je suis rejeté de devant tes yeux. Mais je reverrai ton saint Temple. » (Jon 2,5) Quand j’étais avec toi, jouissant de ta lumière, je ne disais pas : je suis rejeté. Mais, une fois au fond de la mer, et enveloppé de la chair d’un homme, je prends les sentiments d’un homme, et je dis : je suis rejeté de devant tes yeux. Cela, je l’ai dit en tant qu’homme ; et la suite, je le dis comme Dieu, Moi qui, étant dans ta condition, ne me suis pas prévalu de mon égalité avec toi (cf Phil 2,6), parce que je voulais élever à toi le genre humain. « Mais je reverrai ton saint Temple ». Ainsi le texte de l’Évangile dit-il : « Père, glorifie-moi auprès de toi en m’accordant la gloire que j’avais avant que le monde existât. » (Jn 17,5) et le Père répond : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai » (Jn 12,28). L’unique et même Seigneur demande en tant qu’homme, promet en tant que Dieu, et il est sûr de la possession qui fut toujours la sienne.

« Les eaux m’avaient entouré jusqu’à l’âme, l’abîme me cernait » (Jon 2,6) Que l’enfer ne m’emprisonne pas ! Qu’il ne me refuse pas la sortie ! Librement j’ai fait la descente, que librement je fasse l’ascension. Je suis venu captif volontaire, je dois libérer les captifs pour que soit accompli ce verset : « montant dans les hauteurs, il a emmené les captifs. »(Ps 68,19 ; Ep 4,8) Ceux-là en effet qui auparavant étaient captifs dans la mort, lui les a conquis à la vie.

« Et le Seigneur commanda au poisson, qui rejeta Jonas sur la terre sèche. » (Jon 2,11) Il est donc commandé à ce grand cétacé, aux abîmes et aux enfers de restituer le Sauveur à la terre ; ainsi Celui qui était mort pour libérer les détenus dans les liens de la mort, peut emmener avec lui une foule vers la vie.

Saint Jérôme (347-420)

 

 

 

Qu’est-ce que la vraie charité ?

lundi 19 février 2024

Penser plus au prochain, à ses intérêts, à sa satisfaction, à sa joie, qu’à nous-même, c’est le signe non équivoque d’une vrai charité : car pour agir de cette façon, non pas une fois, mais dix fois, mais toujours, en toute circonstances, à l’égard de tous nos frères sans distinction, il faut aimer vraiment Dieu ; un pareil amour du prochain réclame de nous trop d’abnégation pour pouvoir se soutenir longtemps en s’appuyant sur lui-même : il ne le peut que s’il naît de Dieu. Aussi la charité envers le prochain est-elle donnée par Jésus en personne comme le signe par excellence de la présence de Dieu dans une âme. (…)

Qu’est-ce, en effet, que la charité ? C’est l’amour de Dieu embrassant dans un même élan Dieu et tout ce qui lui est uni : l’humanité du Christ, et dans le Christ, tous les membres de son corps mystique. Le Christ est affligé dans les affligés ; malade dans les malades, triste dans les âmes accablées de tristesse. N’est-ce pas la parole même de la vérité infaillible : « Ce que vous ferez au moindre des miens, c’est à moi que vous l’aurez fait » (Mt 25,40) ? En s’incarnant Notre-Seigneur a pris sur lui toutes nos infirmités (cf. Is 53,4). En les soulageant dans le prochain, c’est lui-même que nous soulageons. (…)

Voyons dans notre frère le Christ lui-même qui se présente à nous, et nous le servirons alors avec empressement. (…) Si nous avons ces vues de la foi, notre amour sera toujours zélé, désintéressé, et nous ne nous plaindrons pas si nous devons souvent nous donner aux autres.

Bienheureux Columba Marmion (1858-1923)

 

 

 

La tentation après le baptême

dimanche 18 février 2024

Si, après le baptême, tu es attaqué par le persécuteur, le tentateur de la lumière, tu auras matière à victoire. Il t’attaquera certainement, puisqu’il s’en est pris au Verbe, mon Dieu, trompé par l’apparence humaine qui lui dérobait la lumière incréée. Ne redoute pas le combat. Oppose-lui l’eau du baptême, oppose-lui l’Esprit Saint dans lequel s’éteignent tous les traits enflammés lancés par le Malin. (…)

S’il t’expose le besoin qui t’accable — il n’a pas manqué de le faire à Jésus —, s’il te rappelle que tu as faim, n’aie pas l’air d’ignorer ses propositions. Apprends-lui ce qu’il ne connaît pas ; oppose-lui la Parole de vie, ce vrai Pain envoyé du ciel et qui donne la vie au monde.

S’il te tend le piège de la vanité — il en usa contre le Christ, lors qu’il le fit monter sur le pinacle du Temple et lui dit : « Jette-toi en bas » pour lui faire manifester sa divinité —, prends garde de ne pas déchoir pour avoir voulu t’élever. (…)

S’il te tente par l’ambition en te montrant, dans une vision instantanée, tous les royaumes de la terre comme soumis à son pouvoir et s’il exige de toi l’adoration, méprise-le : ce n’est qu’un pauvre frère. Dis-lui, confiant dans le sceau divin : « Je suis, moi aussi, l’image de Dieu ; je n’ai pas encore été, comme toi, précipité du haut de ma gloire à cause de mon orgueil ! Je suis revêtu du Christ ; je suis devenu un autre Christ par mon baptême ; c’est à toi de m’adorer. » Il s’en ira, j’en suis sûr, vaincu et mortifié par ces paroles. Venant d’un homme illuminé par le Christ, elles seront ressenties par lui comme si elles émanaient du Christ, la lumière suprême. Voilà les bienfaits qu’apporte l’eau du baptême à ceux qui reconnaissent sa force.

Saint Grégoire de Nazianze (330-390)