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Archive pour le mot-clef ‘barque’

« Il fut saisi de pitié envers eux. »

samedi 7 février 2015

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Jésus, le Verbe de Dieu, était en Judée. Après la nouvelle du meurtre du prophète Jean le Baptiste, dans une barque –- symbole de son corps –- « il est allé dans un pays désert, à l’écart ». Dans ce lieu désert, Jésus s’y trouvait « à l’écart » parce que sa parole y était isolée et que son enseignement allait à l’encontre des coutumes et des idées reçues parmi les nations. Alors les foules des nations, apprenant que celui qui est la Parole de Dieu était venu habiter dans leur désert…, sont venus se mettre à sa suite, quittant leurs cités, c’est-à-dire chacun abandonnant les coutumes superstitieuses de sa patrie et adhérant à la loi du Christ… Jésus était sorti à leur rencontre, car ils n’étaient pas capables de venir à lui ; se mêlant à « ceux qui sont dehors » (Mc 4,11), il les a conduits à l’intérieur.

Elle est nombreuse celle foule du dehors qu’il est allé rencontrer. Répandant sur elle la lumière de sa présence, il la regarde, et voyant quel genre de personnes l’entourent, il les trouve encore plus digne de pitié. Lui qui en tant que Dieu est au-delà de la souffrance, il souffre à cause de son amour pour les hommes ; l’émotion le prend aux entrailles. Non seulement il est ému, mais il les guérit de toutes leurs maladies, il les délivre du mal.

Origène (v. 185-253), prêtre et théologien
Commentaire sur l’évangile de Matthieu, 10, 23 (trad. SC 162, p. 257 rev)

 

« Pourquoi avoir peur ? »

samedi 31 janvier 2015

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L’Église, qui navigue comme un grand vaisseau sur la mer de ce monde, qui en cette vie est battue par les flots d’épreuves de toute sorte, l’Église ne doit pas être abandonnée, mais gouvernée. Nous en avons l’exemple chez les premiers pères : Clément, Corneille et beaucoup d’autres à Rome, Cyprien à Carthage, Athanase à Alexandrie, qui, sous les empereurs païens, gouvernaient le navire du Christ, ou plutôt son épouse très chère, l’Église, en enseignant, en défendant la vérité, en peinant et en souffrant jusqu’à répandre leur sang.

En considérant ces hommes et ceux qui leur ressemblent, je suis plein d’effroi, « crainte et tremblement me pénètrent et je suis comme enveloppé par les ténèbres de mes péchés » (Ps 54,6). Je voudrais bien abandonner entièrement le gouvernail de l’Église qui m’a été confié, si je pouvais trouver une approbation dans les exemples des Pères ou dans la Sainte Écriture.

Aussi, puisqu’il en est ainsi et que la vérité peut bien être harcelée mais non pas se laisser vaincre…, que notre âme accablée se réfugie auprès de celui qui dit par la bouche de Salomon : « Mets ta confiance dans le Seigneur de tout ton cœur et ne t’appuie pas sur ta propre sagesse. Dans toutes tes démarches, pense à lui, et il dirigera tes pas » (Pr 3,5-6)… Restons fermes dans la justice et préparons nos âmes à l’épreuve, pour attendre que le Seigneur nous soutienne, et disons-lui : « D’âge en âge, Seigneur, tu es resté notre refuge » (Ps 89,1). Mettons en lui notre confiance, car c’est lui qui nous a confié notre charge. Ce que nous ne pouvons pas porter par nous-mêmes, portons-le par lui qui est tout-puissant et qui dit : « Mon joug est facile et mon fardeau léger » (Mt 11,30).

Saint Boniface (675-764), moine, missionnaire de la Germanie, martyr
Lettre à Cuthbert ; PL 89, 765 (trad. bréviaire 05/06)

 

 

 

« Voyant qu’ils se débattaient avec les rames…, il vient à eux vers la fin de la nuit. »

mercredi 7 janvier 2015

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Les apôtres traversent le lac. Jésus seul est à terre, tandis qu’ils s’épuisent à ramer sans pouvoir avancer, car le vent est contraire. Jésus prie et dans sa prière il les voit s’efforcer à avancer. Il vient donc à leur rencontre. Il est clair que ce texte est rempli de symboles ecclésiologiques : les apôtres sur la mer et contre le vent, et le Seigneur auprès du Père. Mais ce qui est déterminant c’est que dans sa prière, lorsqu’il est « auprès du Père », il n’est pas absent ; bien au contraire, en priant il les voit. Quand Jésus est auprès du Père, il est présent à l’Église. Le problème de l’avènement final du Christ est ici approfondi et transformé de manière trinitaire : Jésus voit l’Église dans le Père et, par la puissance du Père et par la force de son dialogue avec lui, il est présent auprès d’elle. C’est justement ce dialogue avec le Père lorsqu’il « est sur la montagne » qui le rend présent, et inversement. L’Église est pour ainsi dire objet de l’entretien entre le Père et le Fils, donc elle-même ancrée dans la vie trinitaire.

Cardinal Joseph Ratzinger [Benoît XVI, pape de 2005 à 2013]
Der Gott Jesu Christi (trad. Le Dieu de Jésus Christ, Fayard 1977, p.82)

 

 

 

« Passons sur l’autre rive. » (Lc 8,22)

dimanche 10 août 2014

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« Jésus a obligé les disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renvoyait les foules. » Les foules ne pouvaient pas partir vers l’autre rive ; elles n’étaient pas des Hébreux au sens spirituel du mot, qui se traduit : « les gens de l’autre rive ». Cette œuvre était réservée aux disciples de Jésus : partir pour l’autre rive, dépasser le visible et le corporel, ces réalités temporaires, et arriver les premiers vers l’invisible et l’éternel… Et pourtant les disciples n’ont pas pu précéder Jésus sur l’autre rive…; il voulait peut-être leur apprendre par l’expérience que sans lui il n’était pas possible d’y arriver… Qu’est-ce que cette barque dans laquelle Jésus oblige les disciples à monter ? Ne serait-ce pas la lutte contre les tentations et les circonstances difficiles ?…

Ensuite il a gravi la montagne, à l’écart, pour prier. Pour qui prie-t-il ? Probablement pour les foules, pour que, renvoyées après avoir mangé les pains bénis, elles ne fassent rien de contraire à ce renvoi de Jésus. Pour les disciples aussi…, pour qu’il ne leur arrive rien de mal sur la mer à cause des vagues et du vent contraire. J’ai bien envie de dire que c’est grâce à la prière que Jésus adresse à son Père que les disciples n’ont subi aucun dommage, alors que la mer, les vagues et le vent s’acharnaient contre eux…

Et nous, si un jour nous sommes aux prises avec des tentations inévitables, souvenons-nous que Jésus nous a obligés à nous embarquer ; il n’est pas possible de parvenir à l’autre rive sans supporter l’épreuve des vagues et du vent contraire. Puis, quand nous nous verrons entourés par des difficultés nombreuses et pénibles, fatigués de naviguer au milieu d’elles avec la pauvreté de nos moyens, pensons que notre barque est alors au milieu de la mer, et que ces vagues cherchent à « nous faire naufrage dans notre foi » (1Tm 1,19)… Soyons sûrs alors que vers la fin de la nuit, quand « la nuit sera avancée et le jour tout proche » (Rm 13,12), le Fils de Dieu arrivera près de nous afin de nous rendre la mer bienveillante en marchant sur ses eaux.

Origène (v. 185-253), prêtre et théologien
Commentaire sur l’évangile de Matthieu, livre 11, ch. 5-6 ; PG 13, 913 ; SC 162 (trad. SC p. 287s rev.)

 

 

 

« Seigneur, sauve-moi ! »

lundi 4 août 2014

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 14,22-36. 

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Aussitôt après avoir nourri la foule dans le désert, Jésus obligea ses disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renverrait les foules.
Quand il les eut renvoyées, il se rendit dans la montagne, à l’écart, pour prier. Le soir venu, il était là, seul.
La barque était déjà à une bonne distance de la terre, elle était battue par les vagues, car le vent était contraire.
Vers la fin de la nuit, Jésus vint vers eux en marchant sur la mer.
En le voyant marcher sur la mer, les disciples furent bouleversés. Ils disaient : « C’est un fantôme », et la peur leur fit pousser des cris.
Mais aussitôt Jésus leur parla : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez pas peur ! »
Pierre prit alors la parole : « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur l’eau. »
Jésus lui dit : « Viens ! » Pierre descendit de la barque et marcha sur les eaux pour aller vers Jésus.
Mais, voyant qu’il y avait du vent, il eut peur ; et, comme il commençait à enfoncer, il cria : « Seigneur, sauve-moi ! »
Aussitôt Jésus étendit la main, le saisit et lui dit : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? »
Et quand ils furent montés dans la barque, le vent tomba.
Alors ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant lui, et ils lui dirent : « Vraiment, tu es le Fils de Dieu ! »
Ayant traversé le lac, ils abordèrent à Génésareth.
Les gens de cet endroit reconnurent Jésus ; ils firent avertir toute la région, et on lui amena tous les malades.
Ils le suppliaient de leur laisser seulement toucher la frange de son manteau, et tous ceux qui la touchèrent furent sauvés.

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Ma chère Meg, je ne peux pas manquer de confiance en Dieu ; pourtant je sens que la peur pourrait bien me submerger. Je me rappellerai que saint Pierre, à cause de son peu de foi, commençait à s’enfoncer sous un coup de vent, et je ferai comme lui : j’en appellerai au Christ et lui demanderai son secours. Ainsi j’espère qu’il me tendra la main, me saisira et ne me laissera pas sombrer dans la mer démontée.

Et s’il permet que je joue le rôle de Pierre dans sa conduite ultérieure, que je tombe tout à fait, en jurant et en abjurant (mais que notre Seigneur, dans la tendresse de sa miséricorde, m’en préserve, et qu’une telle chute me nuise plutôt que de me rapporter aucun avantage)…, s’il permet que je tombe, j’espère pourtant que dans sa bonté il jettera sur moi, comme sur Pierre, un regard plein de compassion (cf Lc 22,61) et qu’il me relèvera pour que je confesse de nouveau la vérité et que je libère ma conscience. J’espère aussi qu’il me fera supporter courageusement le châtiment et la honte d’un tel reniement.

Bref, ma chère Margot, je suis absolument certain que, sauf péché de ma part, Dieu ne m’abandonnera pas. En toute espérance et sécurité, je vais donc me confier totalement en lui… Donc, ma chère fille, garde un bon moral, ne te laisse troubler par rien de ce qui peut m’arriver en ce monde. Rien ne peut arriver sans que Dieu le veuille. Et, j’en ai la certitude, tout ce que cela peut être, si mauvais que cela nous paraisse, sera vraiment le meilleur.

Saint Thomas More (1478-1535), homme d’État anglais, martyr
Lettre écrite en prison, 1534 (trad. Rogers/bréviaire 22/06 rev.)

 

 

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 4,35-41.

samedi 1 février 2014

imagesoute la journée, Jésus avait parlé à la foule en paraboles. Le soir venu, il dit à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. »
Quittant la foule, ils emmènent Jésus dans la barque, comme il était ; et d’autres barques le suivaient.
Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait d’eau.
Lui dormait sur le coussin à l’arrière. Ses compagnons le réveillent et lui crient : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? »
Réveillé, il interpelle le vent avec vivacité et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme.
Jésus leur dit : « Pourquoi avoir peur ? Comment se fait-il que vous n’ayez pas la foi ? »
Saisis d’une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »

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La barque de ma vie vogue
Dans le crépuscule et les ombres de la nuit,
Et je ne vois aucun rivage :
Je suis sur les profondeurs de l’étendue de la mer.

La moindre tempête peut me noyer,
Engloutissant ma barque dans le tourbillon des eaux,
Si tu ne veillais toi-même sur moi, mon Dieu,
À chaque instant de ma vie, à chaque moment.

Parmi le fracas et la clameur des vagues,
Je vogue tranquillement avec confiance,
Et tel l’enfant, sans crainte, je regarde au loin,
Car tu es pour moi, Jésus, toute lumière.

Autour, l’épouvante et l’effroi,
Mais en mon âme le calme est plus profond que les profondeurs de la mer,
Car celui qui est avec toi, Seigneur, ne peut pas périr —
Ainsi m’assure ton amour divin.

Malgré tant de dangers autour de moi,
Je ne les redoute pas car je regarde le ciel étoilé,
Et je vogue, courageusement, gaiement,
Comme il convient à un cœur pur.

Mais c’est par-dessus tout,
Uniquement parce que tu es mon timonier, ô Dieu,
Que la barque de ma vie vogue si tranquillement.
Je le confesse dans la plus profonde humilité.

Sainte Faustine Kowalska (1905-1938), religieuse
Petit Journal, 1322 (trad. Parole et Dialogue 2002, p. 448)

 

 

Duc in altum

dimanche 10 février 2013

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 5,1-11. 


n jour, Jésus se trouvait sur le bord du lac de Génésareth : la foule se pressait autour de lui pour écouter la parole de Dieu.
Il vit deux barques amarrées au bord du lac ; les pêcheurs en étaient descendus et lavaient leurs filets.
Jésus monta dans une des barques, qui appartenait à Simon, et lui demanda de s’éloigner un peu du rivage. Puis il s’assit et, de la barque, il enseignait la foule.
Quand il eut fini de parler, il dit à Simon : « Avance au large, et jetez les filets pour prendre du poisson. »
Simon lui répondit : « Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais, sur ton ordre, je vais jeter les filets. »
Ils le firent, et ils prirent une telle quantité de poissons que leurs filets se déchiraient.
Ils firent signe à leurs compagnons de l’autre barque de venir les aider. Ceux-ci vinrent, et ils remplirent les deux barques, à tel point qu’elles enfonçaient.
A cette vue, Simon-Pierre tomba aux pieds de Jésus, en disant : « Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur. »
L’effroi, en effet, l’avait saisi, lui et ceux qui étaient avec lui, devant la quantité de poissons qu’ils avaient prise ;
et de même Jacques et Jean, fils de Zébédée, ses compagnons. Jésus dit à Simon : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras. »
Alors ils ramenèrent les barques au rivage et, laissant tout, ils le suivirent.

Jésus marche sur les eaux

mardi 7 août 2012

(MariaValtorta, «l’Évangile tel qu’il m’a été révélé» tome 3)

La soirée est avancée. Il fait presque nuit car on voit à peine sur le sentier qui grimpe sur un coteau où l’on voit ça et là des arbres qui me semblent être des oliviers mais étant donné le peu de lumière, je ne puis l’assurer. En somme, ce sont des arbres de taille moyenne, avec une épaisse frondaison et tordus comme le sont d’ordinaire les oliviers. Jésus est seul, habillé de blanc avec son manteau bleu foncé. Il monte et s’enfonce parmi les arbres. Il chemine d’un pas allongé et tranquille, sans hâte, mais à cause de la longueur de ses foulées il fait, sans se presser, beaucoup de chemin. Il marche jusqu’à ce qu’il rejoigne une sorte de balcon naturel d’où la vue s’étend sur le lac tout à fait paisible sous la lumière des étoiles dont les yeux de lumière fourmillent maintenant dans le ciel. Le silence enveloppe Jésus de son embrassement reposant. Il le détache des foules et de la terre et les Lui fait oublier, en l’unissant au ciel qui semble s’abaisser pour adorer le Verbe de Dieu et le caresser de la lumière de ses astres. Jésus prie dans sa pose habituelle: debout et les bras en croix. Il a derrière Lui un olivier et paraît crucifié sur ce fût obscur. La frondaison le dépasse de peu, grand comme il est, et remplace, par une parole qui convient au Christ, l’inscription de la croix. Là-bas: « Roi des juifs ». Ici: « Prince de la paix ». L’olivier pacifique s’exprime bien pour qui sait entendre. Jésus prie longuement, puis il s’assied sur le balcon qui sert de base à l’olivier, sur une grosse racine qui dépasse et il prend son attitude habituelle: les mains jointes et les coudes sur les genoux. Il médite. Qui sait quelle divine conversation il échange avec le Père et l’Esprit en ce moment où il est seul et peut être tout à Dieu. Dieu avec Dieu! Il me semble que plusieurs heures passent ainsi car je vois les étoiles se déplacer et plusieurs sont déjà descendues à l’occident. Justement pendant qu’un semblant de lumière, ou plutôt de luminosité parce que cela ne peut encore s’appeler lumière, se dessine à l’extrême horizon du côté de l’orient, un frisson de vent secoue l’olivier. Puis, c’est le calme. Puis, il reprend plus fort. Avec des pauses syncopées, il devient de plus en plus violent. La lumière de l’aube qui commençait à peine, est arrêtée dans sa progression par une masse de nuages noirs qui viennent occuper le ciel, poussée par des rafales de vent toujours plus fortes. Le lac aussi a perdu sa tranquillité. Il me semble qu’il va subir une bourrasque comme celle que j’ai déjà vue dans la vision de la tempête. Le bruissement des feuilles et le grondement des flots remplissent maintenant l’espace, il y a un moment si tranquille. Jésus sort de sa méditation. Il se lève. Il regarde le lac. Il y cherche, à la lumière des étoiles qui restent et de l’aube malade, et il voit la barque de Pierre qui avance péniblement vers la rive opposée, mais n’y arrive pas. Jésus s’enveloppe étroitement dans son manteau dont il relève le bord, qui traîne et qui le gênerait dans la descente, sur sa tête, comme si c’était un capuchon, et il descend rapidement, non par la route qu’il avait suivie mais par un sentier rapide qui rejoint directement le lac. Il va si vite qu’il semble voler.

Il parvient à la rive fouettée par les vagues qui font sur la grève une bordure bruyante et écumeuse. Il poursuit rapidement son Chemin comme s’il ne marchait pas sur l’élément liquide tout agité, mais sur un plancher lisse et solide. Maintenant Lui devient lumière. Il semble que le peu de lumière qui arrive encore des rares étoiles qui s’éteignent et de l’aube orageuse se concentre sur Lui et elle forme une sorte de phosphorescence qui éclaire son corps élancé. Il vole sur les flots, sur les crêtes écumeuses, dans les replis obscurs entre les vagues, les bras tendus en avant avec son manteau qui se gonfle autour des joues et qui flotte, comme il peut, serré comme il est autour du corps, avec un battement d’ailes. Les apôtres le voient et poussent un cri d’effroi que le vent apporte à Jésus.
« Ne craignez pas. C’est Moi. »
La voix de Jésus, malgré le vent contraire, se répand sans difficulté sur le lac.
« Est-ce bien Toi, Maître? » demande Pierre. « Si c’est Toi, dis-moi de venir à ta rencontre en marchant comme Toi sur les eaux. »
Jésus sourit: « Viens » dit-il simplement, comme si c’était la chose la plus naturelle du monde de marcher sur l’eau. Et Pierre, demi-nu comme il est avec une courte tunique sans manches, fait un saut par-dessus bord et va vers Jésus. Mais, quand il est à une cinquantaine de mètres de la barque et à peu près autant de Jésus, il est pris par la peur. Jusque là, il a été soutenu par son élan d’amour. Maintenant l’humanité a raison de lui et… il tremble pour sa vie. Comme quelqu’un qui se trouve sur un sol qui se dérobe ou sur des sables mouvants, il commence à chanceler, à s’agiter, à s’enfoncer. Plus il s’agite et tremble de peur, plus il s’enfonce. Jésus s’est arrêté et le regarde. Sérieux, il attend mais il ne lui tend même pas la main. Il garde ses bras croisés. Il ne fait plus un pas et ne dit plus un mot. Pierre s’enfonce. Disparaissent les chevilles, puis les jambes, puis les genoux. Les eaux arrivent à l’aine, la dépassent, montent vers la ceinture. La terreur se lit sur son visage. Une terreur qui paralyse aussi sa pensée. Ce n’est plus qu’une chair qui a peur de se noyer. Il ne pense même pas à se jeter à l’eau. A rien. Il est hébété par la peur. Finalement, il se décide à regarder Jésus. Et il suffit qu’il le regarde pour que son esprit commence à raisonner, à saisir où se trouve le salut.
« Maître, Seigneur, sauve-moi. »
Jésus desserre ses bras et, comme s’il était porté par le vent et par l’eau, il se précipite vers l’apôtre et lui tend la main en disant:
« Oh! homme de peu de foi. Pourquoi as-tu douté de Moi? Pourquoi as-tu voulu agir tout seul?  »
Pierre, qui s’est agrippé convulsivement à la main de Jésus, ne répond pas. Il le regarde pour voir s’il est en colère, il le regarde avec un reste de peur qui se mêle au repentir qui s’éveille.
Mais Jésus sourit et le tient étroitement par le poignet jusqu’à ce que, après avoir rejoint la barque, ils en franchissent le bord et y entrent. Et Jésus commande:
« Allez à la rive. Lui est tout trempé.  »
Et il sourit en regardant le disciple humilié. Les vagues s’apaisent pour faciliter l’abordage ,et la ville, vue l’autre fois du haut d’une colline, apparaît au-delà de la rive. La vision s’arrête ici.

(Correspondance avec Matthieu 14,22 Marc 6,45 Jean 6,1)

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« Jésus dormait sur le coussin à l’arrière. »

samedi 28 janvier 2012

J’aurais dû, ma Mère chérie, vous parler de la retraite qui précéda ma profession. Elle fut loin de m’apporter des consolations ; l’aridité la plus absolue et presque l’abandon furent mon partage. Jésus dormait comme toujours dans ma petite nacelle ; ah, je vois bien que rarement les âmes le laissent dormir tranquillement en elles. Jésus est si fatigué de toujours faire des frais et des avances qu’il s’empresse de profiter du repos que je lui offre. Il ne se réveillera pas sans doute avant ma grande retraite de l’éternité, mais au lieu de me faire de la peine cela me fait un extrême plaisir.

Vraiment je suis loin d’être une sainte, rien que cela en est une preuve. Je devrais, au lieu de me réjouir de ma sécheresse, l’attribuer à mon peu de ferveur et de fidélité, je devrais me désoler de dormir (depuis sept ans) pendant mes oraisons et mes actions de grâces. Eh bien, je ne me désole pas : je pense que les petits enfants plaisent autant à leurs parents lorsqu’ils dorment que lorsqu’ils sont éveillés ; je pense que pour faire des opérations, les médecins endorment leurs malades. Enfin je pense que « Le Seigneur voit notre fragilité, qu’il se souvient que nous ne sommes que poussière » (Ps 102,14).

Ma retraite de profession fut donc, comme toutes celles qui la suivirent, une retraite de grande aridité. Cependant, le Bon Dieu me montrait clairement, sans que je m’en aperçoive, le moyen de lui plaire et de pratiquer les plus sublimes vertus. J’ai remarqué bien des fois que Jésus ne veut pas me donner de provisions : il me nourrit à chaque instant d’une nourriture toute nouvelle ; je la trouve en moi sans savoir comment elle y est. Je crois tout simplement que c’est Jésus lui-même caché au fond de mon pauvre petit cœur qui me fait la grâce d’agir en moi et me fait penser tout ce qu’il veut que je fasse au moment présent.

Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus (1873-1897), carmélite, docteur de l’Église
Manuscrit autobiographique A, 75 v° – 76 r°

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Pécheurs d’hommes

mardi 30 novembre 2010

Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 4,18-22.
Comme Jésus marchait au bord du lac de Galilée, il vit deux frères, Simon, appelé Pierre, et son frère André, qui jetaient leurs filets dans le lac : c’étaient des pêcheurs.
Jésus leur dit : « Venez derrière moi, et je vous ferai pêcheurs d’hommes. »
Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent.
Plus loin, il vit deux autres frères, Jacques, fils de Zébédée, et son frère Jean, qui étaient dans leur barque avec leur père, en train de préparer leurs filets. Il les appela.
Aussitôt, laissant leur barque et leur père, ils le suivirent.