Les ruptures nécessaires à l’Église et à un chrétien, les ruptures nécessaires avec le monde pour sauver le monde et les ruptures nécessaires pour que l’Église soit en marche, doivent être placées là où il faut, mais elles sont fondamentales. Je crois qu’il est important que nous prenions conscience des ruptures qui sont les ruptures chrétiennes et sans lesquelles une vie chrétienne n’est pas chrétienne élémentairement, des ruptures qui sont demandées à tout chrétien simplement parce qu’il est un baptisé. On ne peut pas devenir la chair et le sang de l’Église par le baptême, être la chair et le sang de son corps, du corps du Christ, sans qu’il y ait entre le monde et nous des oppositions qui sont des ruptures ; et c’est par ces ruptures que nous devenons aptes à participer à la rédemption du Christ.
« En même temps, dit Paul VI, que l’Église prend plus pleinement conscience de certaines exigences intérieures, elle est sollicitée plus fortement par les besoins du monde auquel elle est destinée. » De même, c’est parce que nous sommes baptisés, parce que nous avons reçu le Saint-Esprit, parce que normalement il doit travailler en nous, qu’il doit nous entraîner dans la marche qu’il imprime à l’Église. Or, tout ce qui bouge rompt avec quelque chose. On pourrait dire que la liberté élémentaire, essentielle des enfants de Dieu, a pour rançon des ruptures. Mais une rupture n’est chrétienne que si elle se motive par l’union au Christ et la participation à l’œuvre du Christ. On ne rompt pas pour rompre. Le corps tout entier, toute l’Église du Christ a besoin de ces ruptures fondamentales. (…) Ce sont des ruptures qui doivent nous rendre libres d’appartenir uniquement et définitivement à Jésus-Christ ; des ruptures qui doivent nous donner la liberté d’essayer par sa grâce de vivre une vie toute de charité selon l’Évangile. Ce sont des ruptures qui doivent nous donner la liberté d’être disponibles à sa volonté au plus intime de l’Église.
Vénérable Madeleine Delbrêl (1904-1964)