Il faut considérer qu’il n’y a nulle vocation qui n’ait ses ennuis, ses amertumes et aversions, et, qui plus est – si ce n’est ceux qui sont pleinement résignés en la volonté de Dieu ‒, chacun voudrait volontiers échanger sa condition pour celle des autres : ceux qui sont évêques voudraient ne l’être pas ; ceux qui sont mariés voudraient ne l’être pas, et ceux qui ne le sont le voudraient être.
D’où vient cette générale inquiétude des esprits, sinon d’un certain déplaisir que nous avons à la contrainte, et une malignité d’esprit qui nous fait penser que chacun est mieux que nous ? Mais c’est tout un : quiconque n’est pleinement résigné, qu’il tourne deça et delà, il n’aura jamais repos. Ceux qui ont la fièvre ne trouvent nulle place bonne, ils n’ont pas demeuré un quart d’heure en un lit qu’ils voudraient être en un autre ; ce n’est pas la faute du lit, mais c’est la fièvre qui les tourmente partout. Une personne qui n’a pas la fièvre de sa propre volonté se contente de tout ; pourvu que Dieu soit servi, elle ne se soucie pas en quelle qualité Dieu l’emploie : pourvu qu’elle fasse la volonté divine, cela lui est égal. Mais ce n’est pas tout. Il faut non seulement vouloir faire la volonté de Dieu, mais pour être dévot, il la faut faire gaiement. (…)
Je voudrais bien ceci et cela ; je serais mieux ici et là : ce sont des tentations. Notre Seigneur sait bien ce qu’il fait : faisons ce qu’il veut, demeurons où il nous a mis.
Saint François de Sales (1567-1622)