Aujourd’hui, le Père souverain nous a envoyé le véritable Joseph « pour revoir ses frères et les troupeaux » (Gn 37,14). Assurément, il est bien ce Joseph aimé par son père « plus que tous ses frères » (v. 3)… C’est lui, plus aimé que tous, plus sage que tous, plus magnifique que tous ; c’est bien lui que Dieu le Père a envoyé aujourd’hui… « Qui donc enverrai-je, dit Dieu le Père, et qui ira pour nous ? » (Is 6,8) Le Fils répond : « Voici que j’irai moi-même à la recherche de mes brebis » (Ez 34,11). Quittant le plus haut des cieux, il descend « dans la vallée d’Hébron » (Gn 37,14).
Adam avait escaladé la montagne de l’orgueil ; le Fils de Dieu descend dans la vallée de l’humilité. Il trouve aujourd’hui une vallée où descendre. Où se trouve-t-elle ? Non pas en toi, Ève, mère de notre malheur, non pas en toi…, mais en la bienheureuse Marie. Elle est bien cette vallée d’Hébron en raison de son humilité et à cause de sa force… Elle est forte parce qu’elle participe à la force de celui dont il est écrit : « Le Seigneur est fort et puissant » (Ps 23,8). Elle est cette femme vaillante ardemment désirée par Salomon qui disait : « Une femme vaillante, qui la trouvera ? » (Pr 31,10)…
Ève, bien que créée dans le paradis, sans corruption, sans infirmité ni douleur, s’est révélée si faible, si infirme. « Qui trouvera donc la femme vaillante ? » Pourra-t-on trouver dans le malheur d’ici-bas ce qu’on n’a pas pu trouver dans le bonheur de là-bas ? Pourra-t-on la trouver en cette vallée de larmes, alors qu’on n’a pas pu la trouver en la béatitude du Paradis ?… Aujourd’hui, oui aujourd’hui, elle a été trouvée. Dieu le Père a trouvé cette femme pour la sanctifier ; le Fils l’a trouvée pour l’habiter ; l’Esprit Saint l’a trouvée pour l’illuminer… L’ange l’a trouvée pour la saluer ainsi : « Salut, pleine de grâce, le Seigneur est avec toi ». La voici, la femme vaillante. En elle, le sérieux, l’humilité et la virginité s’opposent à la curiosité, la vanité, la volupté. « L’ange entra chez elle », est-il écrit. Elle n’a donc pas été trouvée tournée vers l’extérieur, au-dehors ; elle était à l’intérieur, dans sa chambre secrète où elle priait son Père dans le secret (Mt 6,6).
Saint Aelred de Rievaulx (1110-1167), moine cistercien
Sermon 59, 3ème pour l’Annonciation dans la collection de Durham (trad. cf coll. Pain de Cîteaux, n°23, p. 172)


Le sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, à une vierge fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph. Cette vierge s’appelait Marie. L’ange entra et dit : » Je te salue, comblée de grâce ! Le Seigneur est avec toi. » A ces paroles, elle fut toute troublée : elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. L’ange dit alors : » Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu vas être enceinte, et tu enfanteras un fils auquel tu donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé fils du Très Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père. Il régnera sur la maison de Jacob pour toujours et son règne n’aura pas de fin « . Marie dit à l’ange : » Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? » L’ange lui répondit : » L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi l’enfant saint qui naîtra sera appelé fils de Dieu. Et voici qu’Elisabeth ta parente, est enceinte, elle aussi, d’un fils malgré sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, elle qu’on appelait la stérile. Car rien n’est impossible à Dieu. » Marie dit alors : » Je suis la servante du Seigneur. Qu’il m’advienne selon ta parole. » Et l’ange la quitta. Luc, 1, 26-38.