« Il connaît celui qui trompe et celui qui est trompé. Il entraîne les conseillers vers un idéal sans sagesse et les juges dans la torpeur. » (Jb 12,16-17 Vg) Si tout homme qui tente de tromper son prochain est injuste et si la Vérité dit aux injustes : « Je ne vous connais pas, écartez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice » (Mt 7,23), en quel sens est-il dit ici que le Seigneur connaît celui qui trompe ?
Mais, pour Dieu, savoir signifie tantôt constater, tantôt approuver ; il connaît donc l’homme injuste parce qu’il le juge en constatant ‒ comment en effet jugerait-il qu’un homme est injuste, s’il ne constatait ? ‒ et cependant il ne connaît pas l’injuste parce qu’il n’approuve pas sa conduite. Il le connaît donc parce qu’il le prend sur le fait, et il ne le connaît pas, parce qu’il ne reconnaît pas un tel homme dans le regard de sa sagesse.
Pareillement, de tout homme véridique on dit qu’il ne connaît pas la fausseté, non qu’il ne sache pas blâmer chez un autre une parole fausse, mais cette tromperie même, s’il la connaît dans l’analyse, il ne la connaît pas dans l’amour, en sorte qu’il ne la commet pas, lui, mais, commise par un autre, il la condamne.
Saint Grégoire le Grand (v. 540-604)
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