Le Temple juif, visible et matériel, était confiné à un seul endroit. Le monde entier ne pouvait pas y demeurer, même pas toute une nation, mais seulement quelques-uns de la multitude. Mais le temple chrétien est invisible et spirituel, et peut donc être partout (…). Jésus dit à la Samaritaine : « Le temps viendra où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité » (Jn 4,23). « En esprit et en vérité » car, à moins d’être invisible, sa présence ne peut pas être réelle. Ce qui est visible n’est pas le réel ; ce qui est matériel se désagrégera ; ce qui est dans un endroit n’est qu’un fragment.
Le temple de Dieu, en régime chrétien, est partout où se trouvent des chrétiens au nom du Christ ; il est aussi complètement présent en chaque endroit que s’il n’était nulle part ailleurs. Et nous pouvons y entrer et nous joindre aux saints qui l’habitent, à la famille céleste de Dieu, aussi réellement que l’adorateur juif entrait dans les parvis visibles du Temple. Nous ne voyons rien de notre temple spirituel, mais c’est la condition requise pour qu’il soit partout. Il ne serait pas partout si nous le voyions quelque part ; nous ne voyons rien, mais nous jouissons de tout.
Ainsi nous le présentent déjà les prophètes de l’Ancien Testament. Isaïe écrit : « Il arrivera dans l’avenir que la montagne du Temple du Seigneur sera placée sur la tête des montagnes et dominera les collines. Toutes les nations afflueront vers elles » (2,2). Le temple chrétien a été dévoilé à Jacob (…) lorsqu’il a vu en songe « une échelle dressée sur la terre et dont le sommet touchait le ciel ; des anges de Dieu y montaient et descendaient » (Gn 28,12), et aussi au serviteur d’Élisée : « Le Seigneur ouvrit les yeux du serviteur, et voici que la montagne était remplie de chevaux et de chars de feu » (2R 6,17). C’étaient là des anticipations de ce qui allait s’établir lorsque Christ est venu et « a ouvert le Royaume de Dieu à tous les croyants ». Ce qui fait dire à Saint Paul : « Vous vous êtes approchés de la montagne de Sion, de la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste, de milliers d’anges en fête, de l’assemblée des premiers-nés dont les noms sont inscrits dans les cieux » (He 12,22).
Saint John Henry Newman (1801-1890)
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