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Archive pour le mot-clef ‘colère’

« Dans la colère, souviens-toi de la miséricorde. » (Ha 3, 2 LXX)

vendredi 3 mars 2023

Quelles que soient les injures dont on le charge, le moine gardera la paix, je ne dis pas seulement sur ses lèvres, mais dans le fond de son cœur. S’il se sent troublé le moins du monde, qu’il se contienne dans un absolu silence, et suive exactement ce que dit le Psalmiste : « Je me suis troublé, et je n’ai point parlé » (Ps 76,5 LXX) ; « J’ai dit : Je garderai mes voies, de crainte de pécher par ma langue. J’ai mis une garde à ma bouche, tandis que le pécheur se tenait en face de moi. Je suis resté muet, et je me suis humilié, et j’ai gardé le silence même pour les choses bonnes. » (Ps 38, 2-3 LXX)

Il ne faut pas qu’il s’arrête à considérer le présent ; il ne faut pas que ses lèvres profèrent ce que lui suggère, sur l’heure, une colère emportée, ce que lui dicte son cœur exaspéré. Mais plutôt qu’il repasse en son esprit la grâce de la charité passée ; ou qu’il tourne ses regards vers l’avenir, pour y voir en esprit la paix déjà refaite comme elle était devant ; qu’il s’attache à la contempler, dans le temps même où il se sent ému, avec la pensée qu’elle va revenir sur-le-champ.

Tandis qu’il se réserve pour la douceur de la concorde prochaine, il ne sentira pas l’amertume de la querelle présente, et fera de préférence telle réponse dont il n’ait pas à s’accuser lui-même ni à être repris par son frère, lorsque l’amitié sera rétablie. De cette façon, il accomplira la parole du prophète : « Dans la colère, souviens-toi de la miséricorde. » (Ha 3, 2 LXX)

Saint Jean Cassien (v. 360-435)

 

 

 

Le feu de la colère

jeudi 10 juin 2021

La rancune se distingue de la colère, qui se distingue de l’irritation, qui se distingue encore du trouble. Voici un exemple qui vous fera comprendre. Pour allumer un feu, on n’a d’abord qu’un petit charbon. Celui-ci représente la parole du frère qui t’offense. Ce n’est encore qu’un petit charbon, car qu’est-ce qu’un simple mot de ton frère ? Si tu le supportes, tu éteins le charbon. Si au contraire tu te mets à penser : « Pourquoi m’a-t-il dit cela ? J’ai de quoi lui répondre ! » (…) Comme celui qui allume un feu, tu y jettes des brindilles et tu fais de la fumée, ce qui est le trouble. (…)

En supportant la petite parole de ton frère, tu pouvais éteindre le charbon, avant que n’apparaisse le trouble. Mais même ce trouble, tu peux encore l’apaiser facilement par le silence, par la prière, par un seul mouvement du cœur. Si, au contraire, tu continues à faire de la fumée, c’est-à-dire à exalter et à exciter ton cœur en pensant : « Pourquoi m’a-t-il dit cela ? Moi aussi, je peux lui en dire ! », l’afflux et le choc des pensées, travaillant et échauffant le cœur, provoquent la flamme de l’irritation. (…) Voilà donc venue l’irritation (…).

Si tu veux, tu peux encore l’éteindre, avant qu’elle ne devienne colère. Mais si tu continues à te troubler et à troubler les autres, tu fais comme quelqu’un qui jette du bois dans le foyer et attise le feu : alors on a de belles braises. C’est la colère. (…) Et de même que des braises mises de côté subsistent longtemps, même si on jette de l’eau dessus, la colère qui se prolonge devient de la rancune (…).

Voyez-vous comment d’une seule parole on parvient à un si grand mal ? Si dès le début on avait supporté patiemment la parole de son frère, sans rendre le mal pour le mal (Rm 12,17), on aurait pu échapper à tous ces maux.

Dorothée de Gaza (v. 500-?)

 

 

« La colère de l’homme n’accomplit pas la justice de Dieu. » (Jc 1,20)

jeudi 15 juin 2017

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Le saint et illustre patriarche Joseph, renvoyant ses frères d’Égypte en la maison de son père, leur donna ce seul avis : « Ne vous courroucez point en chemin » (Gn 45,24). Je vous en dis de même : cette misérable vie n’est qu’un acheminement à la vie bienheureuse ; ne nous courrouçons donc point en chemin les uns avec les autres, marchons avec la troupe de nos frères et compagnons doucement et paisiblement. Mais je vous dis nettement et sans exception, ne vous courroucez point du tout, s’il est possible, et ne recevez aucun prétexte quel qu’il soit pour ouvrir la porte de votre cœur au courroux. Car saint Jacques dit tout court et sans réserve que « la colère de l’homme n’opère point la justice de Dieu » (1,20).

Il faut vraiment résister au mal et réprimer les vices de ceux que nous avons en charge, constamment et vaillamment, mais doucement et paisiblement… On ne prise pas tant la correction qui sort de la passion, quoique accompagnée de raison, que celle qui n’a aucune autre origine que la raison seule. Que si la colère gagne la nuit et que « le soleil se couche sur notre ressentiment » (Ep 4,26), se convertissant en haine, il n’y a quasi plus moyen de s’en défaire. Car elle se nourrit de mille fausses persuasions, puisque jamais nul homme courroucé ne pensa son courroux être injuste.

Il est donc mieux d’entreprendre de savoir vivre sans colère que de vouloir user modérément et sagement de la colère, et quand par imperfection et faiblesse nous nous trouvons surpris par elle, il est mieux de la repousser promptement que de vouloir marchander avec elle.

Saint François de Sales (1567-1622), évêque de Genève et docteur de l’Église
Introduction à la vie dévote, III, 8

 

 

 

Dies Iræ

mercredi 2 mars 2011

Pourquoi Jésus se met-il en colère ? C’est tellement inhabituel de sa part. Mais il est sûr que la vue de tous ces marchands faisant commerce de religion, que tous ces changeurs de monnaie arnaquant les gens et que toutes ces bêtes qui encombrent l’accès au Temple agacent Jésus à un tel point qu’il explose : Trop c’est trop !

A ses yeux, le Temple doit être et rester une maison de prières où il est possible de se rapprocher de Dieu et faire l’expérience de sa grâce. Tous ces marchands et leur tintamarre l’en empêchent ! Le prophète Zacharie le dit lui-même : « Il n’y aura plus de marchands. » En ce sens Jésus accomplit les Écritures.

L’amour de la maison de Dieu dévore Jésus comme il nous dévore et nous devons chasser de notre vie tous les marchands qui nous éloignent du Père. Et les exemples ne manquent pas, avec tous ces vendeurs d’illusions et de rêves qui nous amènent à confondre plaisir des sens et bonheur. Sans parler de ceux qui font bassement commerce de la foi…

Refusons la « lâche prostitution des consciences » comme le dit Bossuet et, avec le Christ, faisons place nette autour de nous et dans nos cœurs pour pouvoir accueillir notre Père à tous.

Bernard Vollerin

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