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Archive pour le mot-clef ‘Isaac le Syrien’

« Jésus se retourna et les interpella vivement. »

mardi 1 octobre 2019

Lorsque quelqu’un a été rendu digne de goûter l’amour de Dieu, il a coutume d’oublier toute chose à cause de sa douceur, car une fois goûté cet amour-là, toutes les choses visibles lui semblent sans intérêt. Son âme s’approche joyeusement du bel amour des hommes, sans distinction. Il n’est jamais troublé par leurs faiblesses, qui ne lui font pas peur, tout comme les bienheureux apôtres qui, au milieu de tous les maux qu’ils avaient à supporter de la part de leurs bourreaux, ont été tout à fait incapables de haïr ces derniers et n’étaient pas las de les aimer. Cela a été manifesté dans les faits lorsque, à la fin, ils ont supporté même la mort pour les retrouver un jour, au ciel.

Et pourtant, c’étaient les mêmes qui, peu de temps auparavant, avaient supplié le Christ de faire descendre le feu du ciel sur les Samaritains qui avaient seulement refusé de les accueillir dans leur village. Mais une fois reçu le don de goûter l’amour de Dieu, ils ont été rendus parfaits jusque dans l’amour pour les méchants.

Isaac le Syrien (7e siècle)

 

 

 

« Pourquoi as-tu douté ? »

mardi 7 août 2018

Celui dont le cœur est fondé sur l’espérance de la foi ne manque jamais de quoi que ce soit. Il n’a rien, mais par la foi il possède tout, comme il est écrit : « Ce que vous demanderez dans la prière et la foi, vous le recevrez » et « Le Seigneur est proche, ne vous souciez de rien » (Mt 21,22 ; Ph 4,5-6) L’intellect est toujours à la recherche de moyens qui lui permettent de garder ce qu’elle a acquis ; mais la foi dit que « si le Seigneur ne bâtit pas la maison ni ne la garde, celui qui garde a veillé en vain et celui qui bâtit a travaillé pour rien » (Ps 126,1). Jamais celui qui prie dans la foi ne vit simplement de la connaissance intellectuelle. Ce savoir-là fait l’éloge de la crainte ; un sage a dit : « Celui qui craint dans son cœur est bienheureux ». Mais que dit la foi ? « Quand il a commencé à avoir peur, il se mit à enfoncer. » Et encore : « Vous n’avez pas reçu un esprit de servitude, pour être encore dans la crainte, mais vous avez reçu un esprit de fils adoptifs, qui vous donne la liberté de la foi et de l’espérance de Dieu » (Rm 8,15-24). Toujours le doute suit la peur… ; toujours la peur et le doute se manifestent dans la recherche des causes et l’examen des faits, car l’intellect n’atteint jamais son apaisement. L’âme est souvent exposée aux imprévus, aux difficultés, aux pièges nombreux qui la mettent en péril, mais ni l’intellect ni les différentes formes de la sagesse ne peuvent l’aider en rien. Par contre la foi n’est jamais vaincue par aucune de ces difficultés… Vois-tu la faiblesse de la connaissance, et la puissance de la foi ? … La foi dit : « Tout est possible à celui qui croit. Car rien n’est impossible à Dieu. » (Mc 9,23 ; 10,27) Ô richesse ineffable ! Ô mer qui porte une telle richesse dans ses vagues, dans ses trésors merveilleux dont elle déborde par la puissance de la foi !

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul

 

 

 

« Mon serviteur n’écrasera pas le roseau froissé, n’éteindra pas la mèche qui faiblit…»

samedi 21 juillet 2018

Je veux ouvrir la bouche, frères, pour vous parler du très haut sujet de l’humilité. Et je suis rempli de crainte, comme quelqu’un qui sait qu’il doit parler de Dieu dans le langage de ses propres pensées. Car l’humilité est la parure de la Divinité. En se faisant homme, le Verbe l’a revêtue. Par elle, il a vécu avec nous dans un corps. Et quiconque s’en est entouré, s’est rendu pareil en vérité à Celui qui est descendu de sa hauteur et qui a recouvert sa grandeur et sa gloire par l’humilité, pour qu’à sa vue la création ne soit pas consumée. Car la création n’aurait pas pu le contempler s’il n’avait pas pris sur lui l’humilité et n’avait pas ainsi vécu avec elle. Il n’y aurait pas eu de face à face avec lui. La création n’aurait pas entendu les paroles de sa bouche…

C’est pourquoi lorsque la création voit un homme revêtu de la ressemblance de son Maître, elle le révère et l’honore comme son Maître qu’elle a vu vivre en elle, revêtu d’humilité. Quelle créature, en effet, ne se laisse pas attendrir à la vue de l’humble ? Cependant, tant que la gloire de l’humilité ne s’était pas révélée à tous dans le Christ, on dédaignait cette vision si pleine de sainteté. Mais maintenant, sa grandeur s’est levée aux yeux du monde. Il a été donné à la création de recevoir dans la médiation d’un homme humble la vision de son Créateur. C’est pourquoi l’humble n’est méprisé par personne, pas même par les ennemis de la vérité. Celui qui a appris l’humilité est vénéré, grâce à elle, comme s’il portait la couronne et la pourpre.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série n° 20 (trad. DDB 1981, p. 137)

 

 

 

Le mardi de la 2e semaine de Carême

mardi 27 février 2018

La providence de Dieu, qui veille à donner à chacun de nous ce qui lui est bon, a mené à nous toutes choses pour nous porter à l’humilité. Car si tu t’enorgueillis des grâces de la providence, celle-ci t’abandonne, et tu retombes… Sache donc qu’il ne t’appartient pas, ni à toi ni à ta vertu, de résister aux tendances mauvaises, mais que seule la grâce te tient dans sa main, pour que tu ne craignes pas… Gémis, pleure, souviens-toi de tes fautes au temps de ton épreuve afin d’être délivré de l’orgueil et d’acquérir l’humilité. Cependant ne désespère pas. Prie Dieu humblement de pardonner tes péchés.

L’humilité, même sans les œuvres, efface beaucoup de fautes. Mais au contraire les œuvres sans elle ne servent à rien ; elles nous préparent même bien des maux. Obtiens donc par l’humilité le pardon de tes injustices. Ce que le sel est à toute nourriture, l’humilité l’est à toute vertu. Elle peut briser la force de nombreux péchés… Si nous la possédons, elle fait de nous des fils de Dieu, et elle nous mène à Dieu sans même le secours des œuvres bonnes. C’est pourquoi en dehors d’elle toutes nos œuvres sont vaines, sont vaines toutes les vertus, et sont vaines toutes les peines.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série n°49 (trad. DDB 1981, p.273)

 

 

 

Le jeudi après les Cendres

jeudi 15 février 2018

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Le Seigneur Dieu a livré son propre Fils à la mort sur la croix, à cause de son ardent amour pour la création… Non pas qu’il n’aurait pas pu nous racheter d’une autre façon, mais il a voulu manifester ainsi son amour débordant, comme un enseignement pour nous. Et par la mort de son Fils unique, il nous a rapprochés de lui. Oui, s’il avait possédé quelque chose de plus précieux, il nous l’aurait donné, afin que nous lui appartenions pleinement.

À cause de son grand amour pour nous, il n’appartenait pas à son bon plaisir de faire violence à notre liberté, bien qu’il aurait été capable de le faire, mais il a préféré que nous nous rapprochions de lui par amour de ce que nous pouvions comprendre.

À cause de son amour pour nous et par obéissance à son Père, le Christ a accepté joyeusement les insultes et la détresse… De la même façon, lorsque les saints deviennent parfaits, ils atteignent cette même perfection et ainsi, en déversant abondamment leur amour et leur compassion sur tous les hommes, ils ressemblent à Dieu.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série, 71/74 (trad. Alfeyev, Bellefontaine 2001, p.62)

 

 

 

« Je suis venu apporter un feu sur la terre ! »

jeudi 26 octobre 2017

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Fais-toi violence (cf Mt 11,12), efforce-toi d’imiter l’humilité du Christ, afin que s’allume toujours davantage le feu qu’il a jeté en toi, ce feu par lequel sont consumées toutes les impulsions de ce monde-ci qui détruisent l’homme nouveau et qui souillent les demeures du Seigneur saint et puissant. Car j’affirme avec saint Paul que « nous sommes le temple de Dieu » (2Co 6,16). Purifions donc son temple, « comme lui-même est pur » (1Jn 3,3), afin qu’il ait le désir d’y demeurer ; sanctifions-le, comme lui-même est saint (1P 1,16) ; ornons-le de toutes les œuvres bonnes et dignes.

Emplissons le temple du repos de sa volonté, comme d’un parfum, par la prière pure, la prière du cœur qu’il est impossible d’acquérir en se livrant aux impulsions continuelles de ce monde-ci. Ainsi la nuée de sa gloire couvrira ton âme, et la lumière de sa grandeur brillera dans ton cœur (cf 1R 8,10). Tous ceux qui demeurent dans la maison de Dieu seront emplis de joie et se réjouiront. Mais les insolents et les ignobles disparaîtront sous la flamme du Saint-Esprit.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série, n°2 (trad. Touraille, DDB 1981, p. 66 rev)

 

 

 

« Gardez vos lampes allumées ! »

mardi 24 octobre 2017

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La prière offerte au temps de la nuit possède un grand pouvoir, plus que celle qui est offerte pendant le jour. C’est pourquoi tous les saints ont eu l’habitude de prier la nuit, combattant l’assoupissement du corps et la douceur du sommeil et dépassant leur nature corporelle. Le prophète disait lui aussi : « Je me suis fatigué à gémir ; chaque nuit, je baigne ma couche de mes larmes » (Ps 6,7) pendant qu’il soupirait du fond du cœur dans une prière passionnée. Et ailleurs : « Je me lève au milieu de la nuit pour te louer à cause de tes jugements, toi le Juste. » (Ps 118,62). Pour chacune des requêtes que les saints voulaient adresser à Dieu avec force, ils s’armaient de la prière pendant la nuit et aussitôt ils recevaient ce qu’ils demandaient.

Satan lui-même ne craint rien autant que la prière que l’on offre pendant les veilles. Même si elles s’accompagnent de distractions, elle ne revient pas sans fruit, à moins qu’on ne demande ce qui ne convient pas. C’est pourquoi il engage de sévères combats contre ceux qui veillent, afin de les détourner si possible de cette pratique, surtout s’ils se montrent persévérants. Mais ceux qui sont quelque peu fortifiés contre ses ruses pernicieuses et ont goûté les dons que Dieu accorde durant les veilles, et qui ont expérimenté personnellement la grandeur de l’aide que Dieu leur accorde, le méprisent complètement, lui et tous ses stratagèmes.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques (trad. Deseille, La fournaise de Babylone, Eds. Présence 1974, p. 90)

 

 

 

« Qui s’abaissera sera élevé. »

samedi 26 août 2017

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Il y a une humilité qui vient de la crainte de Dieu, et il y a une humilité qui vient de Dieu lui-même. Il y a celui qui est humble parce qu’il craint Dieu, et il y a celui qui est humble parce qu’il connaît la joie. L’un, celui qui est humble parce qu’il craint Dieu, reçoit la douceur dans son corps, l’équilibre des sens et un cœur brisé en tout temps. L’autre, celui qui est humble parce qu’il connaît la joie, reçoit une grande simplicité et un cœur dilaté que rien ne retient plus.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours 58, 1ère série (trad. Touraille, DDB 1981, p. 313)

 

 

 

« Ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. »

vendredi 5 mai 2017

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L’Arbre de la vie est l’amour de Dieu. Adam l’a perdu dans sa chute et n’a plus jamais retrouvé la joie, mais il travaillait et peinait sur la terre pleine d’épines (Gn 3,18). Ceux qui se sont privés de l’amour de Dieu mangent dans leurs œuvres le pain de leur sueur (Gn 3,19), quand bien même ils marcheraient sur une voie droite ; c’est là le pain qu’il a été donné à la première créature de manger après la chute. Jusqu’à ce que nous trouvions l’amour, notre travail est là, sur la terre des épines… ; quelle que soit notre justice personnelle, c’est à la sueur de notre visage que nous vivons.

Mais quand nous avons trouvé l’amour, nous nous nourrissons du pain céleste, et nous sommes réconfortés en dehors de toute œuvre et de toute peine. Le pain céleste est le Christ, qui est descendu du ciel et a donné la vie au monde. Et telle est la nourriture des anges (Ps 77,25). Celui qui a trouvé l’amour se nourrit du Christ chaque jour et à toute heure, et il en devient immortel. Car il a dit : « Celui qui mange du pain que je lui donnerai ne verra jamais la mort. » Bienheureux est celui qui mange du pain de l’amour, qui est Jésus. Car celui qui se nourrit de l’amour se nourrit du Christ, le Dieu qui domine l’univers, ce dont Jean témoigne quand il dit : « Dieu est amour » (1Jn 4,8).

Donc celui qui vit dans l’amour reçoit de Dieu le fruit de la vie. Il respire dans ce monde l’air même de la résurrection, cet air dont les justes ressuscités font leurs délices. L’amour est le Royaume. C’est de lui que le Seigneur a mystérieusement ordonné à ses apôtres de se nourrir ; manger et boire à la table de mon Royaume (Lc 22,30), qu’est-ce d’autre que l’amour ? Car l’amour est capable de nourrir l’homme au lieu de tout aliment et de toute boisson. Tel est « le vin qui réjouit le cœur de l’homme » (Ps 104,16) ; bienheureux celui qui boit de ce vin.

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série, n° 72 (trad. DDB 1981, p.366)

 

 

 

Premier dimanche de Carême

dimanche 5 mars 2017

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De même que le désir de la lumière suit les yeux sains, de même le désir de la prière suit le jeûne mené avec discernement. Quand un homme commence à jeûner, il désire communier à Dieu dans les pensées de son esprit. En effet le corps qui jeûne ne supporte pas de dormir toute la nuit sur sa couche. Quand le jeûne a scellé la bouche de l’homme, celui-ci médite en état de componction, son cœur prie, son visage est grave, les mauvaises pensées le quittent ; il est l’ennemi des convoitises et des vaines conversations. Jamais on n’a vu un homme jeûner avec discernement et être asservi au désir mauvais. Le jeûne mené avec discernement est une grande demeure abritant tout bien…

Car le jeûne est l’ordre qui a été donné dès le commencement à notre nature, pour la garder de manger le fruit de l’arbre (Gn 2,17), et c’est de là que vient ce qui nous trompe… C’est par là aussi que le Sauveur a commencé, quand il s’est révélé au monde dans le Jourdain. Après le baptême en effet, l’Esprit l’a mené dans le désert, où il a jeûné quarante jours et quarante nuits.

Tous ceux qui partent pour le suivre font désormais de même : c’est sur ce fondement qu’ils posent le commencement de leur combat, car cette arme a été forgée par Dieu… Et quand maintenant le diable voit cette arme dans la main d’un homme, cet adversaire et tyran se met à craindre. Il pense aussitôt à la défaite que lui a infligée le Sauveur dans le désert, il s’en souvient, et sa puissance est brisée. Il se consume dès qu’il voit l’arme que nous a donnée celui qui nous mène au combat. Quelle arme est plus puissante et ranime autant le cœur dans sa lutte contre les esprits du mal ?

Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série, n° 85 (trad. DDB 1981, p. 424)