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Archive pour le mot-clef ‘Eglise’

Discerner les temps où nous sommes

vendredi 27 octobre 2023

Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de notre temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur. Leur communauté, en effet, s’édifie avec des hommes, rassemblés dans le Christ, conduits par l’Esprit Saint dans leur marche vers le Royaume du Père, et porteurs d’un message de salut qu’il faut proposer à tous les hommes. La communauté des chrétiens se reconnaît donc réellement et intimement solidaire du genre humain et de son histoire. (…) C’est pourquoi (…) le deuxième Concile du Vatican n’hésite pas à s’adresser maintenant, non plus aux seuls fils de l’Église et à tous ceux qui se réclament du Christ, mais à tous les hommes. (…)

Pour mener à bien sa tâche, l’Église a le devoir, à tout moment, de scruter les signes des temps et de les interpréter à la lumière de l’Évangile, de telle sorte qu’elle puisse répondre, d’une manière adaptée à chaque génération, aux questions éternelles des hommes sur le sens de la vie présente et future (…). Il importe donc de connaître et de comprendre ce monde dans lequel nous vivons : ses attentes, ses aspirations, son caractère souvent dramatique. (…) Marqués par la situation complexe du monde actuel, un très grand nombre de nos contemporains ont beaucoup de mal à discerner les valeurs permanentes ; en même temps, ils ne savent pas comment les harmoniser avec les découvertes récentes. Une inquiétude les saisit et ils s’interrogent avec un mélange d’espoir et d’angoisse sur l’évolution actuelle du monde. Celle-ci jette à l’homme un défi ; mieux, elle l’oblige à répondre. (…)

L’Église, quant à elle, croit que le Christ, mort et ressuscité pour tous, offre à l’homme, par son Esprit, lumière et forces pour lui permettre de répondre à sa très haute vocation. (…) Elle croit aussi que la clé, le centre et la fin de toute histoire humaine se trouvent en son Seigneur et Maître.

Concile Vatican II

 

 

 

« Je suis venu apporter un feu sur la terre. »

jeudi 26 octobre 2023

Je me souviens, très doux Père, d’une servante de Dieu [sainte Catherine] à laquelle fut révélée combien ce qu’on fait pour l’Église lui est agréable, et je vous le dis afin que vous soyez encouragé à souffrir pour elle.

Je sais qu’une fois entre autres cette servante de Dieu désirait ardemment donner son sang, détruire et consumer tout ce qui était en elle pour l’Épouse du Christ, pour la sainte Église ; elle appliquait son intelligence à comprendre son néant et la bonté de Dieu à son égard ; elle voyait que Dieu, par amour, lui avait donné l’être, et toutes les grâces, tous les dons qu’il y avait ajoutés. En voyant et en goûtant cet amour, cet abîme de charité, elle ne voyait d’autre moyen de remercier Dieu que de l’aimer ; mais comme elle ne pouvait lui être utile, elle ne pouvait lui prouver son amour, et alors elle cherchait à aimer pour lui quelque chose qui lui permit de montrer son amour. Elle voyait que Dieu aime d’un amour infini la créature raisonnable, et cet amour, elle le trouvait en elle-même et dans tous les hommes, car nous sommes tous aimés de Dieu : elle avait donc un moyen de montrer si elle aimait Dieu ou non, puisqu’elle pouvait ainsi lui être utile. Alors elle se livrait avec ardeur à la charité du prochain, et elle ressentait un tel amour pour son salut, qu’elle aurait donné avec joie sa vie pour l’obtenir. (…)

Alors cette âme, voyant tant de grandeur et de profondeur dans la bonté de Dieu, et ce qu’elle devait faire pour lui plaire davantage, augmentait de plus en plus l’ardeur de son désir ; il lui semblait que si elle eût pu donner mille fois sa vie par jour jusqu’au jugement dernier, c’eût été moins qu’une goutte de vin dans la mer ; et c’est aussi la vérité.

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)

 

 

 

 

« Malheur à vous, parce que vous n’êtes pas entrés. »

jeudi 19 octobre 2023

Si nous sommes, en fait, participants à la vie interne de l’Église, l’authenticité et l’intensité de cette participation n’est pas seulement affaire de connaissance. On peut être un excellent théologien et ne vivre que très faiblement de la vie de Dieu ; on peut très bien savoir ce qu’est l’Église et n’en être qu’une cellule anémiée. De même, on peut « vivre la foi » pour tout ce qui est Dieu-nous et ne pas la vivre, mais seulement y adhérer intellectuellement pour ce qui est Église-nous. Même quand nous vivons d’une vie unie à Jésus, il faut, je crois, nous demander si nous ne faisons pas de lui et de son amour quelque choses d’encore un peu « historique », si nous ne le voyons pas surtout comme il a été, et non comme il est, dans l’Église.

Avons-nous compris comme Jeanne d’Arc, que « le Christ et l’Église c’est tout un » ? Nous avons quelquefois, vis-à-vis de l’Église, l’attitude de quelqu’un qui veut un certificat de bonne conduite. L’Église ne conduit pas : elle est, et nous sommes en elle. Elle est le Corps du Christ et nous sommes en elle. Elle est le Corps du Christ et nous sommes membres de ce corps. Notre dépendance, notre dévouement vis-à-vis d’elle, s’ils exigent des actes extérieurs, des signes, sont avant tout une dépendance et un dévouement interne, vital. Notre dépendance, vis-à-vis de ce corps qu’elle est, est considérable.

Vénérable Madeleine Delbrêl (1904-1964)

 

 

 

 

Marie, mère du Christ, mère de l’Église

mardi 26 septembre 2023

Celui qui est le fruit d’une seule Vierge sainte est la gloire et l’honneur de toutes les autres saintes vierges ; car elles sont elles-mêmes, comme Marie, les mères du Christ, si elles font la volonté de son Père. La gloire et le bonheur de Marie d’être la mère de Jésus Christ éclatent surtout dans les paroles du Seigneur : « Quiconque fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, ma sœur et ma mère. » (Mt 12,50)

Il indique ainsi les parentés spirituelles qui le rattachent au peuple qu’il a racheté. Ses frères et ses sœurs sont les saints hommes et les saintes femmes qui ont part avec lui à l’héritage céleste. Sa mère est l’Église tout entière, parce que c’est elle qui, par la grâce de Dieu, enfante les membres de Jésus Christ, c’est-à-dire ceux qui lui sont fidèles. Sa mère est encore toute âme sainte qui fait la volonté de son Père et dont la charité féconde se manifeste dans ceux qu’elle enfante pour lui, jusqu’à ce que lui-même soit formé en eux (Ga 4,19). (…)

Marie est certainement la mère des membres du Corps du Christ, c’est à dire de nous-mêmes, parce que par sa charité elle a coopéré à enfanter dans l’Église les fidèles, qui sont les membres de ce divin chef, dont elle est véritablement la mère selon la chair.

Saint Augustin (354-430)

 

 

« Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon ? »

dimanche 17 septembre 2023

L’Église doit considérer comme un de ses principaux devoirs – à chaque étape de l’histoire, et spécialement à l’époque contemporaine – de proclamer et d’introduire dans la vie le mystère de la miséricorde, révélé à son plus haut degré en Jésus Christ. Ce mystère est, non seulement pour l’Église elle-même comme communauté des croyants, mais aussi en un certain sens pour tous les hommes, source d’une vie différente de celle qu’est capable de construire l’homme exposé aux forces tyranniques de la concupiscence qui sont à l’œuvre en lui. Et c’est au nom de ce mystère que le Christ nous enseigne à toujours pardonner. Combien de fois répétons-nous les paroles de la prière que lui-même nous a enseignée, en demandant : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés » (Mt 6,12), c’est-à-dire à ceux qui sont coupables à notre égard.

Il est vraiment difficile d’exprimer la valeur profonde de l’attitude que de telles paroles définissent et inculquent. Que ne révèlent-elles pas à tout homme, sur son semblable et sur lui-même ! La conscience d’être débiteurs les uns envers les autres va de pair avec l’appel à la solidarité fraternelle que saint Paul a exprimé avec concision en nous invitant à nous « supporter les uns les autres avec charité » (Ep 4,2). Quelle leçon d’humilité est ici renfermée à l’égard de l’homme, du prochain en même temps que de nous-mêmes ! Quelle école de bonne volonté pour la vie en commun de chaque jour, dans les diverses conditions de notre existence !

Saint Jean-Paul II (1920-2005)

 

 

 

L’espérance de la résurrection

mercredi 7 juin 2023

L’espérance de la résurrection est la racine de toute activité vertueuse. L’attente de la récompense incite l’âme à bien agir. Tout ouvrier est prêt à supporter les fatigues s’il voit d’avance la récompense de ses fatigues ; au contraire chez ceux qui peinent sans en être dédommagés, corps et âmes s’écroulent de concert avant la fin de la tâche. Un soldat qui s’attend à recevoir une récompense pour ses combats, est prêt à guerroyer, mais nul homme enrôlé par un chef sans discernement n’est prêt à affronter la mort pour celui qui ne lui propose de sa peine aucune récompense.

Ainsi toute âme qui croit à la résurrection se traite elle-même – et elle a raison – avec respect, tandis que l’âme qui ne croit pas à la résurrection est vouée à la ruine. Celui qui croit que son corps attend la résurrection respecte son vêtement ; il évite de le salir (…) La sainte Église nous enseigne donc comme un grave avertissement la foi en la résurrection des morts. Article important et très nécessaire, combattu par beaucoup, mais établi par la vérité.(…)

Bien instruits et bien formés dans cette sainte Église catholique, nous posséderont le royaume des cieux et nous obtiendrons pour notre partage, la vie éternelle. Pour elle nous supportons tout, afin que le Seigneur nous en donne la jouissance. Car nous ne poursuivons pas un but médiocre, mais l’objectif de notre effort, c’est la vie éternelle. Aussi nous apprend-on, dans la proclamation de la foi, après l’article : « Et en la résurrection de la chair », c’est-à-dire la résurrection des morts, à croire aussi « en la vie éternelle », objet de notre combat, à nous autres chrétiens.

Saint Cyrille de Jérusalem (313-350)

 

 

 

« Ils avaient bien compris que Jésus avait dit la parabole à leur intention. » (Mc 12, 12)

lundi 5 juin 2023

La sainte Église sait garder la vigueur de sa discipline en la tempérant de mansuétude, tantôt n’épargnant pas les méchants en paraissant les épargner, tantôt au contraire les épargnant en paraissant ne pas les épargner. Mais nous le montrerons mieux en exposant ce qui arrive d’ordinaire. Proposons donc aux regards de notre âme deux esprits déviés vivant au sein de l’Église, d’un côté un puissant, un effronté, de l’autre un homme doux, un subalterne. Qu’en cet homme doux, en ce subalterne, un péché sourdement chemine, le prédicateur est là, il semonce, il attaque, il blâme ce péché et, en blâmant le pécheur, il le libère du péché, il le rétablit dans le chemin de la droiture. (…)

Au contraire, apprend-on que ce puissant, cet effronté a commis un forfait, on cherche l’heure de la semonce pour le mal qu’il a commis. Car si le prédicateur ne sait pas attendre l’heure opportune du blâme, il accroît en l’autre le mal qu’il attaque. Il arrive souvent, en effet, qu’un tel homme ne sache pas entendre la moindre parole de semonce. Devant sa faute, le devoir du prédicateur n’est-il donc pas de présenter à ses auditeurs, parmi ses admonestations pour le salut de tous, des fautes semblables aux méfaits de l’homme qui est à sa portée et qui ne peut pas encore accueillir une critique strictement personnelle, si l’on ne veut pas le rendre pire ? Mais que l’invective lancée contre la faute reste générale, la parole de blâme s’avance sans heurt jusqu’en son âme, parce que ce puissant, cet esprit dévié, ne voit pas qu’elle s’adresse particulièrement à lui. Que lui a donc fait son prédicateur ? En l’épargnant il ne l’a pas épargné, il n’a pas lancé des paroles de blâme contre sa personne et pourtant par-delà son admonestation générale, il a touché la plaie.

Saint Grégoire le Grand (v. 540-604)

 

 

 

Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l’Église, mémoire

lundi 29 mai 2023

Vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire,
de t’offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu,
à toi, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant.

Pour célébrer la Vierge Marie,
c’est à toi que s’adressent nos louanges.
En accueillant la Parole dans un cœur immaculé,
elle a mérité de la concevoir dans son sein virginal.
En donnant naissance à son Créateur,
elle a préparé les commencements de l’Église.
En recevant au pied de la croix
le testament d’amour de son Fils,
elle a reçu pour fils tous les hommes
que la mort du Christ a fait naître à la vie divine.
Quand les Apôtres attendaient l’Esprit qui leur était promis,
elle a joint sa supplication à celle des disciples,
devenant ainsi le modèle de l’Église en prière.
Élevée dans la gloire du ciel,
elle accompagne et protège l’Église de son amour maternel
dans sa marche vers la patrie
jusqu’au jour de la venue glorieuse du Seigneur.

Le Missel romain

 

 

 

« Qu’ils soient un ! »

mercredi 24 mai 2023

Il y a une seule Église qui, par sa fécondité toujours croissante, embrasse une multitude toujours plus ample. Le soleil envoie beaucoup de rayons, mais sa source lumineuse est unique ; l’arbre se divise en beaucoup de branches, mais il n’a qu’un tronc vigoureusement appuyé sur des racines tenaces ; d’une source découlent bien des ruisseaux ; cette multiplicité ne s’épanche, semble-t-il, que grâce à la surabondance de ses eaux, et pourtant tout se ramène à une origine unique. Séparez un rayon solaire de la masse du soleil, l’unité de la lumière ne comporte pas un tel fractionnement. Arrachez une branche à un arbre : le rameau brisé ne pourra plus germer. Coupez un ruisseau de la source, l’élément tronqué tarit.

Il en va de même de l’Église du Seigneur : elle diffuse dans l’univers entier les rayons de sa lumière, mais une est la lumière qui se répand ainsi partout, l’unité du corps ne se morcelle pas. Elle étend sur toute la terre ses rameaux d’une puissante vitalité, elle épanche au loin ses eaux surabondantes. Il n’y a cependant qu’une seule source, qu’une seule origine, qu’une seule mère.

Le sacrement de l’unité, ce lien d’une concorde indissolublement cohérente, nous est représenté dans l’Évangile par cette tunique de notre Seigneur Jésus Christ, laquelle n’est point divisée ni déchirée, mais qui, tirée au sort pour savoir qui revêtirait le Christ, arrive intacte à celui qui en devient le maître, sans qu’elle ait été abîmée ni découpée. Le peuple du Christ, lui non plus, ne peut être divisé. Et sa tunique, une, d’une seule pièce, d’un seul tissu, figure la concorde si cohérente de notre peuple, à nous autres qui avons revêtu le Christ.

Indivisible est l’unité ; un corps ne peut perdre sa cohésion ni être mis en pièces, ses entrailles déchirées et dispersées et dispersées en morceaux. Tout ce qui s’éloigne du centre de la vie ne saurait vivre et respirer à part, il perd la substance de son salut.

Saint Cyprien (v. 200-258)

 

 

 

« Quand viendra le Défenseur, l’Esprit de vérité, il rendra témoignage en ma faveur. »

lundi 15 mai 2023

C’est grâce à l’appui du Saint Esprit que l’Église s’accroît. Il est l’âme de cette Église. C’est lui qui explique aux fidèles le sens profond de l’enseignement de Jésus et son mystère. Il est celui qui, aujourd’hui comme aux débuts de l’Église, agit en chaque évangélisateur qui se laisse posséder et conduire par lui, et met dans sa bouche les mots qu’il ne pourrait trouver seul, tout en prédisposant aussi l’âme de celui qui écoute pour le rendre ouvert et accueillant à la Bonne Nouvelle et au Règne annoncé.

Les techniques d’évangélisation sont bonnes mais les plus perfectionnées ne sauraient remplacer l’action discrète de l’Esprit. La préparation la plus raffinée de l’évangélisateur n’opère rien sans lui. Sans lui, la dialectique la plus convaincante est impuissante sur l’esprit des hommes. Sans lui, les schémas sociologiques ou psychologiques les plus élaborés se révèlent vite dépourvus de valeur.

Nous vivons dans l’Église un moment privilégié de l’Esprit. On cherche partout à le connaître mieux, tel que l’Écriture le révèle. On est heureux de se mettre sous sa mouvance. On s’assemble autour de lui. On veut se laisser conduire par lui. Or, si l’Esprit de Dieu a une place éminente dans toute la vie de l’Église, c’est dans la mission évangélisatrice de celle-ci qu’il agit le plus. Ce n’est pas par hasard que le grand départ de l’évangélisation a eu lieu le matin de Pentecôte, sous le souffle de l’Esprit.

On peut dire que l’Esprit Saint est l’agent principal de l’évangélisation… Mais l’on peut dire également qu’il est le terme de l’évangélisation : lui seul suscite la nouvelle création, l’humanité nouvelle à laquelle l’évangélisation doit aboutir, avec l’unité dans la diversité que l’évangélisation voudrait provoquer dans la communauté chrétienne. A travers lui l’Évangile pénètre au cœur du monde car c’est lui qui fait discerner les signes des temps — signes de Dieu — que l’évangélisation découvre et met en valeur à l’intérieur de l’histoire.

Saint Paul VI